Theresa May a survécu le 16 janvier dernier à la motion de censure qui menaçait son gouvernement. Malheureusement pour le Premier ministre britannique, sa survie politique n'efface pas la débâcle historique qu'elle a vécue la veille, en soumettant son plan de sortie de l'Union européenne. La locataire du 10 Downing Street a en effet subi le plus grand revers de l'histoire politique britannique du dernier siècle, en soumettant au vote du Parlement son accord sur le Brexit.
«Dépêchez-vous, car le 29 mars, c'est demain», a déclaré Nathalie Loiseau, ministre des Affaires européennes, à l'attention de Londres.
Certains membres de l'Union européenne ont rapidement réagi afin d'annoncer qu'ils accéléreraient les préparatifs de leur plan national en cas de «Hard Brexit».
Logiquement, l'Irlande, qui est le pays le plus directement affecté par la sortie de Londres de l'Union européenne, a été l'un des premiers États à réagir. Dans un communiqué publié peu après l'annonce des résultats du vote à Westminster, Dublin a déclaré «intensifier les préparatifs pour [faire face à] un Brexit désordonné».
Même son de cloche à Rome, où le Premier ministre, Giuseppe Conte, a annoncé que l'Italie «[intensifierait] ses efforts pour être prête à tous les scénarios, y compris celui d'un retrait sans accord» et ce, afin de «limiter les conséquences négatives du Brexit.»
«Juridiquement et techniquement, c'est possible», affirmait sur France Inter la ministre des Affaires européennes à propos d'un éventuel report de la date du Brexit au lendemain du vote du Parlement britannique. Elle a ajouté qu'il faudrait que Londres «le demande et qu'il y ait un accord à l'unanimité des 27 autres membres de l'Union européenne».
Une possibilité également évoquée par le Président de la République lors de l'ouverture du grand débat national à Grand Bourgtherould, le 16 janvier dernier. Devant un public de pêcheurs, en première ligne sur la question du Brexit à cause des questions de droit maritime, notamment dans le canal de la Manche, Emmanuel Macron a déclaré:
«Première option: ils vont vers le no-deal. […] Deuxième option, ils disent "on va essayer d'améliorer ce qu'on peut obtenir des Européens." […] Troisième option —et à mon avis, ils vont commencer par la deuxième et ça finira par la troisième- ils vont dire "au fond, on va prendre plus de temps", donc ils vont demander à avoir un plus grand délai.»
«Nous voulons que les dommages, et il y en aura dans tous les cas, soient aussi faibles que possible. Alors bien sûr, nous essaierons de trouver une solution ordonnée ensemble. Nous avons encore le temps de négocier, mais nous attendons maintenant ce que la Première ministre propose.»
En résumé: un report, pourquoi pas, à condition que Londres soit force de proposition. Mais si pour les Européens, la date d'effet du Brexit peut être discutée, ce n'est pas le cas de l'accord en lui-même.
«On était au bout de ce qu'on pouvait faire dans l'accord, et on ne va pas, pour essayer de régler un problème de politique intérieure britannique, ne pas défendre les intérêts des Européens», a déclaré Emmanuel Macron le 16 janvier dernier.
Et il n'est pas le seul à penser que l'accord sur le Brexit «ne peut pas être rouvert», puisque d'autres États membres, à l'instar de l'Autriche, ont écarté toute éventuelle renégociation de l'accord de sortie déjà rédigé, coupant ainsi l'herbe sous le pied de Theresa May, qui espérait pouvoir arracher de nouvelles concessions à Bruxelles.