Dure, dure la légalisation du cannabis… Parlez-en au Premier ministre Justin Trudeau qui en avait fait une promesse électorale en 2015. En octobre 2018, la marijuana récréative est devenue légale au Canada, mais la légalisation est un processus long et complexe…
Au Québec, par exemple, le gouvernement a mis sur pied la Société québécoise du cannabis (SQDC), une société d'État. Le jour de l'ouverture des succursales de la SQDC, des centaines de clients ont fait la queue, à travers tout le Québec, pour être les premiers à se procurer de la marijuana légale. Mais l'engouement s'est rapidement dissipé quand la SQDC a annoncé qu'elle connaissait déjà une pénurie de marijuana.
Déjà une pénurie de marijuana légale?
Contacté par Sputnik, le porte-parole de la SQDC, Fabrice Giguère, a affirmé que l'approvisionnement était un défi important pour son organisation. Pour faire face au problème, la SQDC a décidé de diminuer ses heures d'ouverture. Depuis plusieurs semaines, les 12 succursales de la SQDC sont ouvertes quatre jours par semaine, alors que l'objectif de départ était de sept jours par semaine.
«Notre souhait est d'avoir des succursales qui sont ouvertes 7 jour sur 7, mais nous allons seulement y parvenir quand l'approvisionnement va le justifier et quand nous pourrons offrir un service de qualité à nos clients. Nous travaillons en étroite collaboration avec les fournisseurs et nous les suivons très près. Ils travaillent très fort pour subvenir à notre demande», a mentionné M.Giguère en entrevue avec Sputnik.
Pour M.Oscapella, le prix du cannabis légal est trop élevé pour faire disparaître le marché noir. Selon certaines études, le prix du pot légal serait actuellement jusqu'à 50% plus élevé. Le criminologue rappelle que plusieurs facteurs influencent la décision d'un consommateur d'acheter un produit plutôt qu'un autre, mais que le prix demeure un facteur central. Il souligne que l'offre de cannabis doit être constante et régulière, sans quoi les acheteurs reprendront leurs anciennes habitudes et retourneront voir leurs vendeurs illégaux.
«Si un consommateur a une bonne relation avec un vendeur illégal, il va peut-être décider de continuer à lui acheter sa marijuana, même si le prix légal devenait moins élevé. […] Il faut trois choses pour acheter du cannabis sur le marché légal: le prix doit être raisonnable, il est accessible (il y a un approvisionnement suffisant et les points de distribution sont accessibles) et il faut un produit vendu sous la forme voulue par les consommateurs», a expliqué M.Oscapella au micro de Sputnik.
Eugène Oscapella estime aussi que le gouvernement canadien se trouve dans une position difficile, car il doit écarter le crime organisé tout en restant à l'affût de ses pratiques. Une position ambivalente qui pose certaines questions sur le plan éthique. Il s'agirait de trouver un équilibre entre les buts visés par le gouvernement et la réalité du terrain.
«Le gouvernement se trouve dans une position difficile, parce qu'officiellement, on veut baser le marché légal sur des pratiques de santé publique. On ne veut donc pas encourager la consommation du cannabis. […] Si on met le prix trop bas, on va encourager l'utilisation de cannabis, et si on le met trop haut sur le marché légal, on va aider le marché illégal à continuer. Ce sont deux buts du gouvernement qui sont en conflit l'un avec l'autre».
Dans une autre perspective, le criminologue croit que la légalisation pourrait aider des pays comme le Mexique à combattre le crime organisé. Des pays où de grandes organisations criminelles font pousser et exportent de la marijuana. Il n'écarte toutefois pas la possibilité que puisse se constituer un marché illégal de drogues légales (notamment à l'international), une éventualité qu'avait d'ailleurs soulevé le gouvernement russe en octobre 2018.