«Nous ne sommes pas partis pour faire un pique-nique géant sur un carré d'herbe, mais bien pour faire une mobilisation citoyenne dans les rues de Paris.»
Laëtitia Dewalle ne veut pas entendre parler du Champ-de-Mars pour la prochaine manifestation des Gilets jaunes, prévue samedi 24 novembre à Paris. La porte-parole du mouvement dans le Val d'Oise s'exprimait le 23 novembre chez nos confrères de BFMTV. Elle réagissait à l'annonce faite la veille par le ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, et de Laurent Nunez, son secrétaire d'État: «Plusieurs demandes ont été déposées pour organiser cette manifestation au Champ-de-Mars. Ce lieu offrant les conditions de sécurité nécessaires, il pourra accueillir les manifestants.»
Mais les Gilets jaunes n'entendent pas se faire dicter leurs conditions par la place Beauvau, comme l'a martelé Laëtitia Dewalle sur BFMTV:
«Se retrouver parqués comme des petits moutons qui vont brouter de l'herbe, ce n'est pas du tout notre objectif. Nous nous voulons être sur le terrain, nous voulons être entendus, écoutés, vus. Et le Champ-de-Mars ne répond en rien à la raison de notre mobilisation. Nous le collectif du Val d'Oise, nous n'irons pas là-bas.»
Alors, quelle destination pour les protestataires? «Acte 2: Toute la France à Paris!», un événement lancé sur Facebook par Éric Drouet, l'un des initiateurs de la fronde populaire, appelle les contestataires à se rendre sur la place de la Concorde dès 8 h 00. Une option qu'a balayée le ministère de l'Intérieur:
«La liberté de manifester est un droit fondamental, et qu'il n'est donc évidemment pas question d'interdire la manifestation. Il est en revanche exclu qu'elle se déroule place de la Concorde, pour d'évidentes raisons de sécurité.»
Plusieurs Gilets jaunes appellent dorénavant à se rendre sur les Champs-Élysées. Priscillia Ludosky, l'une des initiatrices du mouvement en Île-de-France, a clairement refusé la proposition de se rassembler au Champ-de-Mars sur le plateau de LCI: «La manifestation n'aura pas lieu à cet endroit.» Elle a assuré qu'une annonce serait faite le 23 novembre et que le rassemblement des Gilets jaunes aurait sûrement lieu «au cœur de Paris, très certainement au niveau des Champs-Élysées».
Benjamin Cauchy, porte-parole des Gilets jaunes à Toulouse, a sensiblement dit la même chose au micro de BFMTV: «à titre personnel, comme tout Gilet jaune, en liberté et en responsabilité individuelle, nous nous rendrons aux abords des Champs-Élysées.» Avant de rappeler le caractère inédit du mouvement:
«Ce que vous ne comprenez pas c'est que les Gilets jaunes, c'est un mouvement inédit. Nous ne sommes ni un syndicat ni un parti politique. Les Gilets jaunes sont un conglomérat d'initiatives citoyennes.»
Marine Le Pen, la patronne du Rassemblement national, a quant à elle twitté pour s'interroger sur le choix du ministère de l'Intérieur:
«Qu'est-ce qui justifie que le peuple français ne puisse pas manifester sur les Champs-Élysées, où beaucoup d'autres rassemblements (Coupe du Monde, Nouvel An…) ont lieu?»
Le 22 novembre, cette dernière avait accusé le gouvernement de souhaiter «minimiser le mouvement» en proposant le Champ-de-Mars, «qui est une place gigantesque».
Qu’est-ce qui justifie que le peuple français ne puisse pas manifester sur les Champs-Elysées, où beaucoup d'autres rassemblements (Coupe du Monde, Nouvel An,…) ont lieu? MLP#24NovembreParis #GiletsJaunes
— Marine Le Pen (@MLP_officiel) 23 novembre 2018
Le gouvernement a d'ores et déjà prévenu que plusieurs «lieux sensibles» de la capitale seraient bouclés. Services de renseignement et autorités craignent des débordements, notamment à cause de la possible présence de groupuscules violents, tels que les fameux Blacks blocks, membres de l'ultra gauche.
«Dans chaque manifestation, il y a des risques de débordements. Traditionnellement, quand les partenaires sociaux organisent une manifestation, ils organisent leur propre système de sécurité. Demain, qui assure la sécurité? On pourra chercher d'autres responsabilités, mais si on décide d'organiser une manifestation, il faut assumer», a déclaré Christophe Castaner alors qu'il visitait une école de police nîmoise ce 23 novembre.
Le syndicat France Police —Policiers en colère, qui craint des débordements, a publié un communiqué le 22 novembre demandant au gouvernement de revoir ses positions:
«Les Gilets jaunes rejettent massivement le Champ-de-Mars comme lieu de rassemblement pour la manifestation ce samedi 24 novembre. France Police —Policiers en colère demande au ministre de l'Intérieur Christophe Castaner de faire une autre proposition de lieu de rassemblement, faute de quoi nous risquons d'assister à un éparpillement des Gilets jaunes sur Paris avec toutes les conséquences en matière de sécurité que nous connaissons. Le droit de manifester est essentiel et doit s'exercer en concertation, dans le dialogue, avec les Français en colère.»