«Apologie du terrorisme». Cette accusation portée à l'encontre du journaliste camerounais Michel Biem Tong, pourrait lui valoir la peine capitale.
Promoteur du site internet hurineuws.com (actuellement fermé), il a été arrêté le 23 octobre dernier et a été maintenu en détention dans une cellule du Secrétariat d'État à la Défense à Yaoundé pour des faits allégués d'«apologie» de sécession. Le journaliste a comparu le jeudi 15 novembre dernier devant le tribunal militaire de Yaoundé.
Il a été auditionné par le commissaire du gouvernement et conduit à la prison centrale de Kondengui à Yaoundé, placé sous mandat de dépôt «pour des faits d'outrage au Chef de l'État, déclarations mensongères et apologie du terrorisme». Il risque de ce fait la peine de mort, prévue à l'article 2 de la Loi N° 2014/028 du 23 décembre 2014 portant sur la répression des actes de terrorisme au Cameroun.
Les autorités militaires de Yaoundé ont indiqué que «le concerné était depuis des mois dans le viseur des services de sécurité. Et n'a pas été interpellé dans le cadre de l'exercice d'une quelconque profession ayant à quelque degré près un lien avec le journalisme.»
Les défenseurs des droits de l'homme, des avocats, des journalistes, activistes politiques et autres leaders d'opinion condamnent cette arrestation, se disent inquiets et préoccupés quant à la situation des libertés individuelles et publiques au Cameroun. Dans un communiqué publié le 3 novembre dernier, le Syndicat national des journalistes du Cameroun (SNJC) s'est offusqué
«que notre confrère et camarade soit poursuivi devant une juridiction d'exception en toute violation avec la loi. À cet effet, nous invitons les autorités judiciaires et sécuritaires à permettre à ce que soit garanti à notre confrère Michel Biem Tong, un traitement digne et humain devant une juridiction conforme à son statut.»
Le Syndicat sollicitait par la même occasion
Un appel qui n'a été entendu par les autorités judiciaires, au vu de la suite des événements avec l'incarcération du journaliste quelques jours plus tard à la prison de Yaoundé. Dans une déclaration, le Réseau des Défenseurs des Droits Humains en Afrique Centrale (REDHAC), demande aux ONG internationales et représentations diplomatiques au Cameroun
«De saisir les autorités administratives et judiciaires pour exiger la libération immédiate et sans condition de M. Michel Biem Tong.»
Le REDHAC, conduit par sa directrice exécutive Maximilienne Ngo Mbe, a organisé une manifestation vendredi 16 novembre devant la prison de Kondengui à Yaoundé pour demander la libération du journaliste.
Des membres du REDHAC (Réseau des défenseurs des droits humains en Afrique centrale), vendredi 16 novembre devant la prison de Yaoundé.
Un autre collectif constitué de leaders d'opinion et qui milite pour la libération du journaliste dans un communiqué publié la semaine dernière
«appelle l'attention du Président de la République en vue de la mise en liberté du journaliste» et lance également un appel à «la communauté nationale et internationale à exiger la protection des droits fondamentaux de Michel Biem Tong.»
Une autre journaliste camerounaise avait été écrouée à la prison de Douala le 7 novembre dernier, puis libérée le 10 novembre après une vague d'indignation collective. La journaliste Mimi Mefo était inculpée par un tribunal militaire d'atteinte à la sûreté de l'État et d'avoir publié de fausses informations. La journaliste avait relayé les propos d'une source affirmant que le missionnaire américain Charles Wesco, décédé le 30 octobre au cours d'un accrochage entre séparatistes anglophones et forces de sécurité camerounaises dans le Nord-Ouest, aurait été tué par des balles de l'armée régulière. Après sa remise en liberté, le tribunal va «ordonner l'arrêt des poursuites et le classement du dossier». Le porte-parole de l'armée camerounaise, le colonel Didier Badjeck, avait indiqué sur les réseaux sociaux que la décision avait été prise «personnellement» par le président Paul Biya.