Avantages fiscaux et subventions: quand Amazon pousse les villes américaines aux enchères

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New York et Arlington sont les heureuses gagnantes d'une féroce compétition entre 238 communes américaines. En échange de milliard de dollars d'aides et de réductions d'impôts, ces deux villes accueilleront une partie des locaux du nouveau siège d'Amazon et la moitié de ses 50.000 emplois. Pourtant, Amazon ne fait pas que des heureux...

Fin du suspense pour la vingtaine de villes qui étaient encore en lice pour décrocher le futur siège d'Amazon. Le géant de la distribution en ligne a annoncé mardi 13 novembre avoir choisi d'établir son «HQ2» à Long-Island (Queens) et à Arlington (Virginie), non loin de Washington, la capitale fédérale. Une annonce qui met fin à un suspense de 14 mois durant lesquels pas moins de 238 communes américaines ont redoublé d'arguments —et d'inventivité- afin de s'attirer les faveurs de Jeff Bezos, PDG d'Amazon, à la tête de la plus grosse fortune du monde.

Mais ni le cactus Saguaro de 6,5 mètres de haut offert par la ville de Tucson (Arizona) ni les 1.000 commentaires élogieux de produits Amazon postés aléatoirement par le maire de Kansas City (Missouri) ne semblent avoir fait la différence.

Il faut dire que depuis septembre 2017 la firme de Seattle cherchait, en premier lieu, à installer ses futurs locaux au sein d'une métropole de plus d'un million d'habitants, dotée de transports publics ainsi que d'un aéroport international desservant Seattle. Quelques mois plus tard, en janvier 2018, le groupe avait dévoilé la liste des 20 villes finalistes.

​Pour autant, les infrastructures publiques et le vivier de talents semblent ne pas avoir été les seules considérations déterminantes dans le choix définitif d'Amazon. En effet, comme le souligne le Wall Street Journal, le membre des GAFA aurait touché pour plus de 1,52 milliard de dollars de réductions d'impôts et d'aides publiques de la part du seul État de New-York, en échange des perspectives de retombées économiques promises par Amazon.

La firme de Seattle a fait miroiter pas moins de 5 milliards d'investissements ainsi que la création de 50.000 emplois sur les deux sites qui constitueront son second siège. Emplois dont la moyenne des rémunérations dépassera les 150.000 dollars (132.000 euros) annuels. Un haut niveau de revenu qui tranche significativement avec le salaire médian de l'entreprise —hors celui du PDG- qui, en 2017, était de 28.446 dollars.

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Dans le détail, la firme a ainsi annoncé qu'elle devrait recevoir de l'État de New York un crédit d'impôts de 1,2 milliard de dollars et 325 millions de dollars en subventions, si les emplois promis sont bels et bien créés. Par ailleurs, la ville de New York met sur la table 1,28 milliards d'allégement fiscaux. Même son de cloche du côté d'Arlington où l'État et le comté offriront 573 millions de dollars de subventions si Amazon tient ses engagements.

Le géant du commerce en ligne a également annoncé la création de 5.000 emplois supplémentaires à Nashville (Tennessee), où il construira un centre d'opérations d'«excellence», représentant un investissement de 230 millions de dollars. Nashville qui, par ailleurs, a offert 102 millions de dollars de subventions. Mis bout à bout, ces cadeaux dont l'entreprise de Seattle pourrait bénéficier avoisinent les 3 milliards de dollars.

Pour autant, tous ne sont pas aussi désireux de voir Amazon débarquer. En Europe, notamment en France, le géant du Net est dans le collimateur du fisc ainsi que de l'Autorité de la concurrence. Il faut dire que ses méthodes commerciales sont aussi implacables qu'agressives: user de ses moyens logistiques pléthoriques pour casser les prix — et livrer rapidement un client roi — afin de pénétrer les marchés avec la ferme intention d'y établir un monopole et redéfinir ses règles.

Premiers à avoir tiré la sonnette d'alarme, les libraires. Rappelons que la vente de livres en ligne fut, avant sa diversification, l'activité qui fit le succès d'Amazon. Qu'ils soient français ou américains, les professionnels du livre ont depuis créé des groupements pour ne pas être écrasés par «la machine de guerre» Amazon, ou plutôt l'«ogre de Seattle».

«Amazon, cette inexorable machine de guerre qui étrangle la concurrence, dégrade le travail et menace nos centres-villes»,

titrait un rapport de l'institut américain de recherche Institute for local self-reliance (ILSR). Les auteurs de ce rapport, traduit en français par le Syndicat de la Librairie Française (SLF), constatent qu'Amazon «a éliminé 150.000 emplois de plus qu'il n'en a créé» aux États-Unis. Le rapport original de cet institut date de novembre 2016.

Car Amazon n'est pas qu'un fossoyeur de libraires, de TPE ou PME. Derniers secteurs en date dans son collimateur, la santé, la banque et l'immobilier après ceux de l'assurance, de la téléphonie, du streaming musical ou encore de l'alimentation.

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Son arrivée sur ce dernier a d'ailleurs porté un coup dur à Carrefour, qui a liquidé le quart des effectifs de son siège et prévoit déjà une réduction de voilure au niveau de ses magasins en France. Relégué à la 9e place mondiale de la distribution — cédant deux places — l'ex n°2 mondial est à présent dépassé par Amazon (6e) — qui bondit de quatre places — dans le dernier classement annuel des plus grands groupes de commerce établi par Deloitte. En septembre 2018, Amazon rejoignait Apple dans le club très fermé des entreprises pesant plus de 1.000 milliards de dollars en bourse.

Dans l'Hexagone, où les ouvertures de ses entrepôts se multiplient — sous les applaudissements d'élus qui saluent la création d'emplois et les retombées fiscales — Amazon a déjà coulé la chaîne de magasins de jouets La Grande Récré et ses 233 magasins. Même bilan au Royaume-Uni avec la fermeture des 200 points de vente de biens électroniques Maplin Electronics. Les États-Unis sont logés à la même enseigne, Amazon ayant poussé le géant de la distribution de jouets Toys'R'us à mettre la clef sous la porte.

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