Maggy Biskupski, l’ensauvagement et les sécessions de la société française

© AFP 2024 PATRICK KOVARIK French police officer Guillaume Lebeau (C) and Maggy Biskupski
French police officer Guillaume Lebeau (C) and Maggy Biskupski - Sputnik Afrique
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Maggy Biskupski, la fonctionnaire de police de 36 ans qui avait créé l'association Mobilisation des policiers en colère après l'attaque au cocktail Molotov de deux voitures de police entre Viry-Châtillon et Grigny en octobre 2016, a été retrouvée morte lundi soir 12 novembre.

Le lendemain, nous commémorions le triste anniversaire du 13 novembre 2015, de l’attentat du Bataclan et des massacres au hasard dans les rues de Paris. Ces deux événements, également tragiques, n’ont en apparence aucun lien entre eux. Pourtant, ils sont des moments importants dans notre manière de regarder les forces de police et l’autorité de l’État.

Le changement de point de vue sur la police

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Le 13 novembre 2015 a été, avec l’attentat contre Charlie-Hebdo en janvier de cette même année un tournant. Pour la première fois depuis fort longtemps on a vu des militants de gauche applaudir les cars de polices qui remontaient la manifestation monstre convoquée à la suite de l’assassinat des journalistes et des travailleurs de Charlie, des policiers en charge de leur sécurité, et de la prise d’otage à l’hyper-casher. Le 13 novembre est venu confirmer ce changement d’attitude.

Bien sûr, le problème des bavures policières, il y en a et il y en aura hélas, existe. Bien sûr, le comportement des forces de l’ordre quand elles répriment une manifestation, et il y en eu pas mal en 2016 et 2017, pose problème. Mais, ces violences là sont le plus souvent «sur ordres», des ordres que le pouvoir n’assume généralement pas. L’affaire Benalla nous en a fourni un exemple, quand ce soi-disant «chargé de mission» à l’Elysée, qui avait en fait monter une cellule parallèle aux gendarmes et policiers chargés de la sécurité du Président de la République, a été pris en flagrant délit de violence non provoquée sur des manifestants. Mais, ces différents événements n’ont pu inverser le changement d’opinion qui s’est produit au sujet de la Police. Elle est aujourd’hui perçue comme une institution dans laquelle les français ont majoritairement confiance, ce qui n’est pas le cas de la presse et des journalistes. Ce changement en dit long sur les temps en lesquels nous vivons.

Les suicides dans la police

Le suicide de Maggy Biskupski est venu, dans ce contexte, confirmer le fait que les forces de police, au même titre que les pompiers et le personnel de santé des urgences, est aujourd’hui en première ligne dans la lutte contre la l’ensauvagement de notre société. Car, pour tragique qu’il soit, la personne de Maggy Biskupski était devenue un symbole de certaines revendications policières, ce suicide n’est – hélas – pas isolé. Il n’est pas une semaine sans que l’on n’apprenne qu’un policier, ou un gendarme, s’est suicidé avec son arme de service ou a tenté de le faire. Sur les 11 premiers mois de l’année 2017, on avait compté 47 suicides (1); l’année 2018 pourrait bien, elle aussi, être une année «noire» (2).

Tous ces suicides n’ont pas la même cause. Cet acte est toujours à mettre dans un contexte, tant professionnel que personnel. Mais, la répétition lancinante de ces actes démontrent qu’il y a bien un problème spécifique dans les forces de l’ordre, problème lié au stress professionnel, mais aussi au manque de soutien dans de nombreux cas de la haute hiérarchie. Répétons-le, les policiers sont au premier rang face à l’ensauvagement de la société, mais cet ensauvagement les personnels médicaux, les pompiers, et désormais les enseignants le subissent.

Ensauvagement et sécessions

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Et, cet ensauvagement n’est pas un phénomène naturel sur lequel nous n’aurions aucune prise. Il renvoie pour parti à la sécession de fractions de la population face au cadre politique français. Le terme de sécession peut paraître fort mais, si l’on considère qu’un peuple est uni par une culture politique et le respect en des institutions, il est alors clair que des fractions de la population ne font pas partie du «peuple» et dans un certain nombre de cas ne veulent plus en faire partie. Car, et c’est la seconde face de ce problème, cette sécession repose bien souvent sur une idéologie, que l’on appelle l’islamisme terroriste ou radical faute d’autres mots. C’est cette idéologie qui a armé les bras meurtriers qui ont tué à Charlie-Hebdo, au Bataclan, et dans de nombreux autres endroits. Les gouvernements successifs ont trop longtemps vécu dans le déni ou dans la minoration de ce phénomène, laissant les forces de police isolées dans la lutte quotidienne où elles sont en permanence confrontées à cet ensauvagement et à certaine de ses causes.

Cette sécession d’une part de la société fait écho à une autre sécession, moins voyante, mais dont les conséquences ne sont pas moins dramatiques: la sécession des élites. Aujourd’hui, une grande partie des élites en France (et c’est à dessein que l’on ne parle pas d’élites françaises) ne se sentent plus tenue par les règles et les institutions qui régissent le peuple français. Certains des comportements d’Emmanuel Macron, ses sorties méprisantes tout comme ses discours politiques sur la pseudo-souveraineté européenne, illustrent cela à la caricature.

De fait, ces deux sécessions sont liées. La sécession des élites, qui inventent des règles et des institutions à son seul usage, a pour effet de pousser à la sécession une fraction des classes populaires et les rend, en réalité, toujours plus perméables à la propagande constante de l’islamisme terroriste et de ses soutiens. Le fait que la lutte contre la pénétration de cet islamisme ne se fasse que très mollement vient du fait que ces élites ne se sentent pas concernées par ce que vivent les français.

Ce que nous devons à Maggy Biskupski

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Maggy Biskupski s’est suicidée pour des raisons qui restent inconnues aujourd’hui. Mais, elle était visée par une procédure de l’Inspection générale de la Police nationale pour un manquement supposé à son obligation de réserve. On ne peut pas ne pas penser que c’est le manque de soutien de la hiérarchie qui a pu précipiter son geste. Et, c’est là que le Bataclan et ce suicide se rejoignent. Face à l’ensauvagement de la société, face aux menaces qui pèsent sur eux, les policiers ne se sentent plus aujourd’hui, et depuis d’ailleurs de longues années, soutenus. Cela en conduit certains aux suicides comme cela peut en conduire d’autres à des bavures, à la volonté, face à l’immensité du problème, de prendre des raccourcis qui, en réalité, ne font qu’aggraver les choses.

Ils nous faut regarder la réalité en face, comme l’ont fait – tardivement – deux journalistes du Monde. Il nous faut aussi comprendre que l’on ne combattra pas la sécession « par le bas » sans s’attaquer résolument et avec toutes les implications que cela nécessite, à la sécession «du haut». Le suicide de Maggy Biskupski et le triste anniversaire du Bataclan nous rappellent l’urgence d’une réaction.

(1) http://www.leparisien.fr/faits-divers/suicides-chez-les-policiers-2017-s-annonce-comme-une-annee-noire-15-11-2017-7393257.php
(2) https://www.bfmtv.com/police-justice/vague-de-suicides-dans-la-police-les-policiers-expriment-leur-malaise-1530229.html

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