Le rôle de la France dans la «guerre en col blanc» en Syrie, selon Le Corf

© Sputnik . Ekaterina Yanson Grande mosquée d'Alep
Grande mosquée d'Alep - Sputnik Afrique
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Présentant un «millefeuille d'intérêts», la Syrie est le théâtre d'une «guerre en col blanc» dont la fin n'est pas réellement souhaitée par les pays occidentaux, affirme Pierre Le Corf, humanitaire français vivant à Alep, dans une interview à Sputnik. Et la France cherche-t-elle uniquement à apporter des solutions diplomatiques, s'interroge-t-il.

Si le cessez-le-feu à Idlib, discuté notamment par les participants au sommet quadripartite d'Istanbul, est maintenu malgré des violations périodiques, l'humanitaire français Pierre Le Corf n'est pas convaincu que la France ait absolument «abandonné son idée de maintenir la guerre en Syrie». Selon le fondateur de l'ONG WeAreSuperheroes, qui habite à Alep, on ne peut pas être sûr que Paris n'«ait pour objectif que d'apporter uniquement des solutions diplomatiques»:

«La France serait un des acteurs majeurs dans la guerre et pour la guerre, malheureusement», estime-t-il.

Le rôle réservé pour Daech*

Alors que les États-Unis, tout comme leurs alliés, ont à maintes reprises révisé leurs objectifs en Syrie, qui ont alternativement été l'éradication de Daech*, le renversement du gouvernement syrien ou le retrait des forces iraniennes de Syrie, actuellement les terroristes n'occupent que de «petites poches» de terrain et ne sont qu'un «prétexte» pour continuer le combat.

«On utilise ISIS [de l'anglais Islamic State of Iraq and Syria, ndlr] comme étant le porte-drapeau du terrorisme de manière à donner une cible et à dire que voilà: ISIS, Daech*, c'est le terrorisme, le reste, c'est la rébellion. Ce qui est faux», met en valeur l'humanitaire.

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Selon lui, on a marqueté le terrorisme sous un seul drapeau et d'autres groupes de radicaux sont «blanchis». «Je n'ai jamais vu à Alep pendant la guerre que des drapeaux noirs, je n'ai jamais vu autre chose sur la ligne de front, je n'ai jamais vu autre chose. Les bombardements qu'on a subis à Alep, la mort au quotidien, c'est près de 11.000 morts à Alep-Ouest qui ont été effacés, on n'en a jamais parlé», se souvient Pierre Le Corf.

Et encore aujourd'hui 30% de la ville d'Alep est bombardée par ces mêmes groupes armés, poursuit-il.

Tentatives pour «maintenir la guerre»

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Si le peuple tente de se reconstruire et de recommencer à croire en demain, bien qu'«en arrière-plan il y ait beaucoup de décisions tant politiques que militaires qui sont très inquiétantes sur le terrain», parmi les acteurs majeurs sur l'échiquier syrien il existe un «millefeuille d'intérêts» dont la reconstruction de la vie normale pour les Syriens ne fait pas toujours partie.

Parmi les préoccupations tout récentes: les forces américaines s'avèrent créer, dans l'est de la Syrie, des bases militaires pour entraînement des djihadistes de Daech* pour leur faire ensuite mener des combats contre l'armée syrienne, affirme le chef de la diplomatie syrienne Walid al-Mouallem qui confirme ainsi les inquiétudes de Pierre Le Corf.

«Le gouvernement syrien n'acceptera jamais qu'il y ait une répartition du pays, des bases militaires américaines, françaises, etc. Mais je pense que pour le moment tout le monde est en train de négocier un morceau de la Syrie, un morceau de la situation diplomatique», fait remarquer l'interlocuteur de Sputnik évoquant y compris ceux qui étaient assis à la table des négociations à Istanbul.

L'objectif des puissances occidentales semble donc ne pas être et ne pas avoir été «de défendre la Syrie, mais de maintenir la guerre»: les No Fly Zones à l'époque à Alep «n'avaient pas pour objectif d'empêcher les civils de mourir sous les bombes des avions, mais était de maintenir les zones terroristes, [… ] le siège et éventuellement de faire tomber Alep, comme de faire tomber d'autres villes».

«Reconstruire les Syriens»

Le résultat observé aujourd'hui: la situation économique, humanitaire est «catastrophique», on n'arrive pas à faire importer des molécules des médicaments de l'extérieur.

«C'est une guerre en col blanc. […] Moi, c'est ce que je ressens, c'est ce que les Syriens ressentent, et c'est très difficile pour les gens d'arriver encore à imaginer qu'est-ce qui sera demain», indique Pierre Le Corf.

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Sur ce point, où la guerre semble être hors d'Alep mais dont les traces restent toujours sur les visages terrifiés, il espère que des associations humanitaires françaises viennent finalement «travailler directement sur le terrain», quoique la France «fasse partie des pays qui votent les sanctions contre la Syrie, qui bloquent l'acheminement initial de ces aides humanitaires».

«J'attends de voir aujourd'hui des organisations françaises, du gouvernement français envoyer des initiatives qui puissent réellement aider les gens sur le terrain parce que les gens ont besoin, il y a énormément de travail aujourd'hui non pas seulement reconstruire la Syrie, mais reconstruire les Syriens, reconstruire la situation économique», met-il en valeur.

«Quiconque voudrait vraiment venir aider ici, peut venir aider ici, il n'y a pas besoin d'avoir d'autorisation, résume Pierre Le Corf, ajoutant que le gouvernement syrien reste ouvert à toute initiative gouvernementale ou individuelle.

*Organisation terroriste interdite en Russie

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