Il ne s'agit pas tellement de la popularité de Jair Bolsonaro lui-même, mais plutôt de l'impopularité de tous les autres candidats, a déclaré à Sputnik Viktor Kheïfets, professeur de théorie et d'histoire des relations internationales à l'université d'État de Saint-Pétersbourg, commentant les résultats du scrutin de dimanche à l'élection présidentielle au Brésil.
«C'est un échec absolu de tous les partis centristes, dont les candidats n'ont pratiquement rien récolté. C'est une discréditation totale des actuelles élites politiques qui n'ont pas réussi à venir à bout de la crise politique et de la corruption endémique dans le pays, qui se sont enlisées elles-mêmes dans des scandales de corruption. Sur ce fond, Bolsonaro, en tant que candidat antisystème, a réussi à accumuler ces états d'esprit [de l'électorat brésilien, ndlr] mieux que tous les autres», a estimé l'interlocuteur de l'agence.
Quant aux déclarations selon lesquelles Jair Bolsonaro serait pour le Brésil ce que Donald Trump est pour les États-Unis, il a admis que certaines comparaisons s'y imposaient effectivement.
«Des parallèles y sont possibles, notamment parce que c'est aussi un candidat antisystème. Un candidat ultra en politique extérieure, candidat qui n'hésite pas à offenser les femmes, ainsi que des minorités ethniques […] et ce dans un pays dont la population est noire dans sa majorité», a poursuivi l'universitaire.
Il a rappelé par ailleurs que Jair Bolsonaro était un partisan ouvert de la dictature militaire, de la peine de mort et de la torture, ce qui plaisait toutefois à beaucoup en temps de crise et de criminalité omniprésente.
«Mais il y a une différence très sérieuse avec Trump. Les institutions politiques américaines sont beaucoup plus solides que les brésiliennes. C'est pourquoi, la victoire de Trump a été un séisme politique, mais elle ne menaçait pas, à mon avis, le système démocratique des États-Unis. En cas de victoire éventuelle de Bolsonaro, un tel pronostic ne pourrait toutefois pas être donné avec certitude, les institutions démocratiques étant de loin moins solides», a insisté en conclusion l'interlocuteur de Sputnik.
Jair Bolsonaro est arrivé en tête du premier tour de l'élection présidentielle brésilienne dimanche. Le candidat a récolté 46,2% des voix. Il est suivi par Fernando Haddad, candidat de gauche, avec 29% des voix. Jair Bolsonaro affrontera au second tour de cette élection présidentielle, le 28 octobre, Fernando Haddad.
Ces chiffres témoignent, selon les médias, d'un tournant à droite à tous les niveaux du pouvoir au Brésil. Écœurés par une corruption endémique, les Brésiliens s'attendent à ce que ce scrutin apporte le «changement» dans leur pays rongé par une crise économique et politique.