«Le gouvernement devra répondre de son inaction» en matière d’écologie

© AFP 2024 John MACDOUGALLEmmanuel Macron et Nicolas Hulot
Emmanuel Macron et Nicolas Hulot - Sputnik Afrique
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Dix ONG ont adressé une tribune au gouvernement, suite à la démission de Nicolas Hulot. Elles exhortent Emmanuel Macron à «changer de cap» sur la transition énergétique, rappelant les limites du «en même temps» en matière d’écologie. Sputnik a interrogé Générations futures, signataire de cet appel.

«La transition écologique n'est ni une promenade de santé ni un supplément d'âme pour politiciens sans imagination. Emmanuel Macron aurait tort de mésestimer le symbole que représente cette démission-surprise.»

Nicolas Hulot - Sputnik Afrique
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C'est l'avertissement envoyé par dix ONG écologistes à la suite du départ fracassant de Nicolas Hulot, ex-ministre d'État à la Transition écologique et solidaire. Dans une tribune publiée sur France Info, ce jeudi 30 août, ces associations exhortent Emmanuel Macron à «changer de cap» sur la question de la transition écologique, «tout en osant rompre avec la facilité des Trente glorieuses et "cinquante" gaspilleuses.»

Elles expliquent également que le Président «devra faire sien l'aphorisme de Pierre Mendès-France, "gouverner, c'est choisir".» En effet, selon elles, la politique du «en même temps» en matière d'écologie n'est pas tenable. Sputnik a interrogé François Veillerette, président de l'ONG Générations futures, l'une des ONG signataires de la tribune.

Sputnik France: Nicolas Hulot a été contraint de reculer sur des thématiques très importantes comme le nucléaire, la loi transition énergétique ou encore le glyphosate, sa démission est-elle réellement si étonnante?

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François Veillerette: La démission de Nicolas Hulot n'est pas une vraie surprise. Il l'avait dit lui-même: c'était devenu difficile. En effet, il se donnait du temps pour prendre une décision, car il avait été transparent. À la sortie de l'été, il a constaté que le compte n'y était pas, que les résultats n'étaient pas au rendez-vous, que finalement il était seul, sans soutien véritable dans le gouvernement. Il ne pouvait donc pas rester pour occuper une place sans avoir les avancées escomptées.

La manière dont il l'a fait était plus surprenante, mais surprenante dans le bon sens pour nous, c'est-à-dire qu'il a été extrêmement sincère, direct et explicatif sur les raisons de son départ, avec un jugement assez sévère sur l'action du gouvernement et du chef de l'État sur les questions écologiques.

Comment expliquez-vous que Nicolas Hulot n'ait pas réussi à influer sur la politique du gouvernement? Les lobbies ont-ils eu raison de lui?

Nicolas Hulot et Emmanuel Macron - Sputnik Afrique
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François Veillerette: Les lobbies sont toujours à l'œuvre, quelles que soient les majorités en place. Les lobbies essaient toujours, et c'est leur boulot, d'influer sur la décision publique, après ils réussissent avec plus ou moins de succès. Apparemment, ils ont eu beaucoup plus de succès que Nicolas Hulot dans son entreprise. Ce que dénonce Nicolas Hulot c'est ça: une oreille trop attentive à certains lobbies d'intérêts privés et pas assez attentive à l'intérêt général, qui commanderait d'agir sévèrement et fortement sur le climat, sur la préservation de la biodiversité et sur les problématiques de santé en lien avec la dégradation de l'environnement. C'est donc un déséquilibre dans l'action publique qu'il a dénoncé, à mon avis, à juste titre.

Avec cette tribune, vous appelez à un passage à l'action, à un changement de cap du gouvernement sur les questions environnementales, mais n'est-ce pas un vœu pieux, étant donnée l'orientation politique du gouvernement?

François Veillerette: Nous n'avons pas le pouvoir. Les ONG ne peuvent évidemment que demander des choses. C'est vrai que les premiers mois, la première année de l'exercice de cette nouvelle majorité ne nous rendent pas très optimistes sur leur capacité à changer complètement, radicalement, leur politique environnementale.

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Pourtant, c'est de cela dont nous avons besoin pour répondre à ces crises écologiques gravissimes, crises de la biodiversité, crise climatique, crise des ressources naturelles et énergétiques, puis également crise de la santé en lien avec la dégradation de l'environnement.

Néanmoins, c'est également notre travail de rappeler la responsabilité de l'État face à ces crises majeures qui ont des impacts non seulement sur la biodiversité, mais aussi sur la santé publique et in fine sur l'économie. Quand vous avez un climat hors de contrôle, quand vous avez des problèmes de santé avec des maladies chroniques qui explosent, vous avez aussi un impact en termes d'économie. C'est notre responsabilité de rappeler cela. Après, on verra si on a du succès ou pas. Personnellement, je ne crois pas aux miracles et le fait que Nicolas Hulot n'y soit pas arrivé pendant un an donne des chances assez minces, mais le gouvernement devra répondre de son inaction s'il continue dans cette voie. C'est en ce sens que l'on pose cette tribune.

«On appelle à l'action et si par malheur notre appel n'était pas entendu, la responsabilité sera bien du côté du gouvernement.»

Selon vous, est-il possible de protéger l'environnement et «en même temps» mener une politique capitaliste?

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François Veillerette: Le système capitaliste peut avoir des déclinaisons variées et variables. On ne peut, évidemment, pas avoir un système ultra-capitaliste, ultralibéral, déréglementé au maximum et faire une politique environnementale, ou sociale d'ailleurs, correcte. La seule façon de pouvoir le faire dans le cadre d'un système capitaliste, c'est d'avoir un système capitaliste aménagé avec des filets de sécurité, des garde-fous, avec des textes de loi qui édictent des règles du jeu strictes à l'économie […] Lorsque que ce système cherche à se débarrasser des règles, notamment avec des traités internationaux comme le CETA et autres, qui visent finalement à placer le pouvoir des firmes transnationales au-dessus du pouvoir des États, à ce moment cela devient totalement impossible.

On reste optimiste et on continue de croire que l'on peut, dans une économie de marché, mettre en place des règles du jeu si on veut avoir une chance que nos civilisations continuent à se développer. Si on laisse, effectivement, aux acteurs économiques les clés de la maison, c'est le capitalisme sauvage qui gouvernera et on sait ce qu'il se passe dans ce cas-là. Il n'y a qu'à regarder du côté des États-Unis, où l'on a un gouvernement qui s'assoit sur tous les problèmes environnementaux de manière extrême et contribue à accélérer la catastrophe en cours. J'espère que la France ne se rangera pas dans ce camp-là et va revenir à la nécessité d'entendre l'intérêt général plutôt que la somme des intérêts particuliers.

Les autres signataires de la tribune: Fondation pour la nature et l'homme, Agir pour l'environnement, France nature environnement, Les amis de la terre, Réseau sortir du nucléaire, Action des citoyens pour le désarmement nucléaire, Association pour la protection des animaux sauvages, Virages énergies et la Société nationale de protection de la nature.

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