La politique de sanctions américaines à l'égard de la Russie continue son cheminement, allant de tentatives à «pousser le Kremlin dans la direction voulue» au désir de causer «les plus grandes souffrances». Or il s'agit «d'une pente glissante et il est temps de réfléchir aux conséquences pour la Russie, les États-Unis et leurs alliés», a indiqué l'observateur de Bloomberg Leonid Bershidsky.
«Sa frustration est compréhensible», note l'auteur. Les États-Unis ont imposé ou promettent d'imposer des sanctions en réponse à certaines démarches de Moscou, notamment la soi-disant «annexion» de la Crimée, «la fomentation» d'une rébellion pro-russe dans l'est de l'Ukraine et de présumées cyberattaques. Pourtant, ces mesures n'ont aucun impact sur la politique de Vladimir Poutine, constate-t-il.
Le sous-secrétaire américain au Trésor, Sigal Mandelker, a affirmé que «la douleur économique» provoquée par les sanctions avait aidé à endiguer «l'aventurisme» de la Russie. Mais en fait une telle déclaration signifie qu'elle prend «des vessies pour les lanternes», affirme Leonid Bershidsky. En effet, selon lui, rien ne prouve que les sanctions ont affecté les projets de Vladimir Poutine. Et le fait qu'il souhaite leur levée ne prouve absolument rien.
«Tout le monde aimerait que de tels problèmes disparaissent. Cependant, la position intransigeante de la Russie et l'absence de quelque démarche que ce soit de la part de Poutine pouvant être interprétée comme une proposition de paix prouvent que le Kremlin n'est pas prêt à donner aux États-Unis un motif pour faire marche arrière. Ce qui incite Washington à durcir la pression. Même si l'administration Trump ne le veut pas, nombreux sont les législateurs qui le désirent», affirme-t-il.
Leonid Bershidsky rappelle dans ce contexte que six sénateurs ont rédigé un projet de loi concernant les investissements dans les projets énergétiques russes, les obligations d'État et les transactions dans le secteur des hautes technologies. Avec les sanctions contre les sociétés européennes participant à la construction du Nord Stream 2, ces mesures représentent en fait la limite des possibilités américaines.
En outre, de nouvelles restrictions contre les secteurs énergétiques et des hautes technologies russes pourraient entraîner des représailles contre les entreprises américaines opérant dans le pays. Or les ventes des 50 plus grandes d'entre elles, comme Philip Morris International, PepsiCo et Procter & Gamble, se montent à 16 milliards de dollars (environ 13,8 milliards d'euros), selon Forbes Russia, poursuit Leonid Bershidsky.
Ainsi, avant d'envisager «une guerre économique totale, les USA doivent répondre à deux questions stratégiques: quel est le prix qu'ils sont prêts à payer pour obtenir des concessions du gouvernement de Vladimir Poutine et combien de temps ils sont prêts à attendre».
Et sans mesures radicales de «souffrance», la Russie pourrait survivre pendant plusieurs années avec une croissance économique faible. «C'est la base des calculs de Poutine. Ce qui n'augure rien de bon pour la politique américaine actuelle. Si Washington lui inflige une douleur maximale et que rien ne change, ce sera un échec amer pour la superpuissance», conclut-il.