La combinaison de deux affaires, par ailleurs liées, l'affaire Benalla et l'affaire DisinfoLab, expose de manière crue non seulement les méthodes de la Présidence de la République et du parti qui est sont principal soutien, La République En Marche (LREM), mais surtout l'atmosphère et l'idéologie qui règnent dans les milieux proches du pouvoir. Au-delà des conséquences judiciaires que ces deux affaires sont susceptibles d'avoir, au-delà des conséquences politiques qu'elles auront très vraisemblablement, se pose désormais la question institutionnelle: est-il possible de laisser « ces gens là » continuer à gouverner?
Le « Benalla-Gate »
L'affaire Benalla ne se réduit pas aux agissements, condamnables, de ce triste personnage. Il y a eu des à l'évidence des manquements graves d'un point de vue judiciaire. Cette affaire met gravement en cause le Directeur de cabinet de l'Elysée, qui gérait les hommes, mais aussi le Secrétaire général, M. Kohler, par ailleurs objet de deux procédures disjointes par l'association Anticor pour conflits d'intérêts et une possible corruption. Dans toute République autre que Bananière, ces deux hommes auraient dû démissionner. Il est patent qu'il n'en a rien été. Benalla, certes mis en examen, est parti pour le Maroc ou, au dernières nouvelles, il coule des jours heureux…
Mais il y a pire. On a appris qu'il y avait une véritable cellule autour d'Alexandre Benalla, pour s'occuper de manière privée, et en conflit quasi permanent avec les instances chargées légalement de la faire, de la sécurité du Président. La présence de Benalla et de ses acolytes de l'Elysée au sein des forces polices lors de la manifestation du 1er mai est maintenant bien établie. Il faut alors mettre cela en parallèle avec la décision, assez inouïe, d'Emmanuel Macron de prendre le contrôle de la lutte antiterroriste et du renseignement. On touche ici à la dimension institutionnelle du problème.
Emmanuel Macron cherche à constituer l'appareil de la Présidence en un centre de décision autonome, supérieur au gouvernement de la République. Cela ne répond ni à la lettre ni à l'esprit de la Constitution, qui organise en réalité un système ou le Président n'est pas un acteur direct. Rappelons que « Le Gouvernement détermine et conduit la politique de la nation» suivant l'article 20 de la Constitution. C'est le Premier-ministre qui est en charge de la définition et de la mise en œuvre de la politique du pays. D'ailleurs, l'irresponsabilité du Président en découle. Par ailleurs, le comportement même d'Emmanuel Macron qui est allé se justifier le 24 juillet au soir devant les députés LREM, constitue une seconde entorse au moins aussi grave à sa fonction. Nous sommes confrontés à un véritable problème de respect de la Constitution.
L'affaire DisinfoLab
A l'affaire Benalla est venue s'ajouter l'affaire DisinfoLab. Au départ, il y a la volonté de certains, téléguidés par l'Elysée ou non, de créer un contrefeu à l'affaire Benalla, en prétendant que l'émotion autour de cette dernière aurait été « gonflée » artificiellement par la « russosphère » sur Twitter. Tout cela est parti de la présentation sur le blog ReputatioLab, tenu par M. Nicolas Vanderbiest, d'une première étude. Mais, la méthode pour définir la soi-disant « russosphère » est extrêmement discutable. On peut parler d'une reductio ad Putinem.
De plus, Monsieur Nicolas Vanderbliest fut l'homme qui a rédigé une bonne part de la très contestée « loi anti-Fake news » qui fut rejeté par le Sénat en juillet. La boucle ici se referme. Nous avons donc un militant proche d'Emmanuel Macron faisant un travail (bâclé) pour tenter d'accuser une soi-disant « russosphère » et mettre implicitement sur le dos de Poutine le scandale provoqué par l'affaire Benalla, afin de créer un contre-feu devant la légitime émotion engendrée par cette affaire. Mais, ce faisant, ce même militant a clairement enfreint la loi et s'est livré à un fichage politique. La CNIL s'en est émue et s'en est saisie. Diffamé par un communiqué de DisinfoLab, Olivier Berruyer a, lui-aussi, porté plainte.
Des allégories du pouvoir macroniste
Emmanuel Macron représente un danger pour la République à travers sa volonté de se constituer comme une force politique « en surplomb » par rapport tant à la société qu'aux institutions. Si les oppositions acceptaient de faire front commun, la réalité du système Macron ne tarderait pas à être révélée et bientôt paralysée. Car, en dépit de toutes ces affaires et de l'opprobre qui grandit, il faut se souvenir que la force d'Emmanuel Macron repose, encore et toujours, sur la division de ses opposants.
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