Cachés dans des silos souterrains renforcés, ces missiles intercontinentaux de 200 tonnes sont la principale épine dans le pied des spécialistes de la défense antimissile des États-Unis. En effet, il est impossible de les neutraliser, même par une frappe nucléaire préventive contre leur zone de stationnement. Quels sont les principaux avantages des silos à missiles?
Un géant nucléaire
Les RVSN sont prêtes à lancer simultanément plusieurs dizaines de missiles R-36M dotés de dix ogives séparables à guidage individuel chacun, et pouvant frapper le territoire ennemi avec une charge thermonucléaire d'une puissance comprise entre 5 et 8 mégatonnes. Outre les ogives réelles, le Satan embarque plusieurs leurres légers et lourds qui désinforment les systèmes antimissiles (ABM) de l'ennemi à l'approche des ogives.
A cette époque, l'arsenal de l'URSS comptait plus de 300 missiles de classe Satan. Le traité exigeait d'en détruire la moitié.
Vers un stationnement souterrain
Un silo à missile se présentait alors sous la forme d'un puits de 30 m de profondeur et de 6 m de diamètre. Une plateforme de lancement était installée au fond avec les structures porteuses et les systèmes de ventilation permettant de maintenir la température et l'humidité nécessaires. Le tout était recouvert par un couvercle de béton de plusieurs tonnes — un dispositif de protection qui, si besoin, se déplaçait sur des rails. Dans un tel bunker, les missiles pouvaient être stockés pendant des années en état opérationnel permanent.
Un coffre impénétrable
Le silo du missile stratégique Voevoda est une construction encore plus complexe. Pour la première fois au monde a été utilisé le principe de lancement du mortier: un générateur de gaz à combustible solide crée une pression accrue dans la partie inférieure du conteneur de transport et de lancement, qui propulse le missile de 200 tonnes à environ 20 mètres de haut. A cette altitude, le moteur du premier étage se met en route et le missile adopte alors la trajectoire qui lui a été donnée.
«Il faut un impact extrêmement puissant pour détruire les silos. Nos silos ont été conçus pour une pression excessive jusqu'à 100 bars, explique Piotr Belov. A titre de comparaison: les fenêtres des maisons se brisent sous une pression de 0,05 bar, et un bâtiment est détruit à 0,2 bar. De plus, les spécialistes ont même envisagé un scénario où le dispositif de protection serait enseveli: un système spécial de déblayage avec des charges de poudre a été prévu, qui balaye tout ce qui se trouve sur le couvercle.»
Le poste de commandement, qui contrôle tout un groupe de missiles installés à quelques kilomètres les uns des autres, possède une structure similaire. La liaison est assurée par des canaux filaires souterrains. Le conteneur habité de 3 mètres de diamètre est séparé à la verticale en 12 compartiments avec différents équipements, des groupes électrogènes, des systèmes de ventilation et de refroidissement. Le personnel se trouve dans les deux compartiments inférieurs. Le complexe est entièrement autonome: en cas de déclenchement des hostilités, il peut fonctionner en autonomie pendant trois jours.
Selon lui, il serait inutile d'orienter plusieurs ogives contre un seul silo: de toute manière elles ne s'approcheraient pas de l'objectif en même temps, et l'explosion de la première ogive détruirait celles qui la suivent.
En ce qui concerne les missiles de croisière conventionnels, leur vitesse est trop faible pour atteindre les silos situés dans le centre du pays: ils seront abattus par les systèmes antimissiles ou par des avions d'interception. Même si certains parvenaient à percer la barrière antiaérienne, jusqu'à dix missiles seraient nécessaires pour détruire un seul couvercle de silo.
Aucune alternative
Après la signature du traité START, la Russie a détruit des centaines de silos contenant des missiles lourds. Ils ont été inondés, ensevelis avec du béton, les missiles ont été recyclés. Actuellement, les RVSN disposent de près de 50 missiles R-36M Voevoda, de plusieurs dizaines de UR-100, et de versions à silo des Topol-M légers.
Mais chaque médaille a son revers: si un silo stationnaire blindé pouvait être détruit uniquement par l'impact direct d'une munition brisante, un complexe mobile peut être neutralisé même par un groupe commando réduit muni de lance-roquettes. Ou encore par une puissante mine antichar posée sur son itinéraire. Ces véhicules sont modernisés parallèlement au renforcement des capacités des groupes commandos.
Nul n'a toutefois l'intention de renoncer aux silos à missiles: outre les missiles mobiles, les RVSN reçoivent également des versions à silo des Iars. Et dans les années à venir, le successeur du Voevoda entrera en service: il s'agit du missile lourd de nouvelle génération RS-28 Sarmat dont la portée dépasse 11.000 km, et qui peut embarquer jusqu'à 15 ogives séparées de 750 kt chacune. Les silos des nouveaux missiles seront extrêmement bien protégés physiquement: la destruction totale d'un silo nécessiterait au moins sept frappes nucléaires de haute précision.