Depuis l'affaire Skripal, les milieux politiques et médiatiques ne cessent de se déchaîner et de lancer des piques contre la Russie dans l'affaire d'Amesbury, mais… sans aucune preuve présentée, écrit Simon Jenkins, journaliste de The Guardian.
Quatre mois se sont écoulés depuis les événements de Salisbury, mais les Skripal sont toujours coupés du monde entier et sont dans un «abri secret», écrit l'auteur. Dans le même temps, Theresa May accuse constamment la Russie, qualifiant l'incident de Salisbury de «flagrant et dégoûtant» et le MI5 notant «des violations flagrantes du droit international». «Cependant, quand personne ne sait rien, je ne vois aucun avantage diplomatique ou autre dans des jugements déraisonnables sur cette question», souligne le journaliste.
Quant à l'incident d'Amesbury, la situation ici est encore plus confuse, elle ressemble plus à une sorte de «négligence joyeuse». «Ce couple a-t-il ramassé un agent chimique de la première scène de crime, à douze kilomètres d'Amesbury? Ce nouvel empoisonnement était-il une tentative de détourner l'attention de la précédente? Ou est-ce un plan intelligent conçu pour montrer que le "Novitchok" peut être obtenu dans n'importe quel coin via un dealer local?», s'interroge-t-il.
«Je ne sais pas quel motif le Kremlin pourrait avoir à commettre des meurtres sur un sol étranger pendant les préparatifs — sans parler de la tenue — d'un événement sportif qui est d'une importance chauvine gigantesque pour la Russie», souligne-t-il.
«Le motif le plus évident de ces attaques serait sûrement pour quelqu'un d'embarrasser le Président russe, Vladimir Poutine, l'un de ses ennemis, plutôt que ses amis ou employés. Mais encore une fois nous n'en avons aucune idée», poursuit-il.
Enfin, il existe une explication facile. «Alors que nous pataugeons dans un marais de "Novitchok" sans aucune preuve», ces crimes devraient être traités comme des cas locaux de tentative de meurtre: ils doivent être détachés des jeux de pouvoir mondiaux, de la démagogie politique, des tirs au but et doivent appartenir à la police du Wiltshire.
«Si rien n'indique enfin l'implication de Moscou dans les empoisonnements, les politiciens resteront encore les pires crétins. S'il s'agissait bien d'un complot russe, il est temps de se mettre en colère à juste titre quand cela a été prouvé. En attendant, je recommande le tennis», conclut l'auteur.
Deux personnes, un homme et une femme, toutes deux quadragénaires, ont été retrouvées inconscientes samedi 30 juin dans une habitation dans la ville d'Amesbury (sud de l'Angleterre), située à une dizaine de kilomètres de Salisbury. La police britannique avait initialement émis l'hypothèse d'une contamination liée à l'absorption d'héroïne ou de crack.
La Russie a toujours démenti les allégations de Londres. Début avril, les chercheurs du laboratoire britannique de Porton Down avaient reconnu ne pas être en mesure d'établir le pays d'où provenait l'agent innervant utilisé dans cette tentative d'assassinat. Le gouvernement russe a à plusieurs reprises demandé à Londres de lui permettre de participer à cette enquête.