C'est une première. La police des polices, autrement dit l'inspection générale de la police nationale (IGPN), a avancé mardi le chiffre de personnes tuées ou blessées lors d'interventions policières. En près d'un an, de juillet 2017 à mai 2018, 14 personnes ont été tuées et une centaine d'autres blessés (avec plus de huit jours d'incapacité de travail, tel est le critère retenu).
«Ce recensement n'est pas le recensement des bavures policières», a précisé la patronne de l'IGPN, Mme Monéger-Guyomarc'h.
Selon l'IGPN, chacun des 394 coups de feu tirés, considérés comme de la légitime défense, a été suivi d'une enquête administrative. Plus en détail: sur les 14 décès constatés depuis le 1er juillet 2017, quatre concernent des personnes s'étant suicidées ou étant décédées en ayant pris la fuite lors d'une intervention de police. Les autres concernent des personnes tuées alors qu'elles venaient de commettre une action terroriste, comme l'assaillant de la gare Saint-Charles en octobre à Marseille ou celui du quartier de l'Opéra à Paris en mai.
Un tiers des tirs est dû à des véhicules en fuite:
«C'est le fait d'un durcissement des relations avec la police, de plus en plus de conducteurs en faute refusant de se soumettre aux contrôles, y compris pour des infractions telles que l'absence de permis ou d'assurance», explique Mme Monéger-Guyomarc'h.
Une tendance déjà soulignée par Christophe Soullez, chef de l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) à l'Agence France-Presse (AFP) en octobre dernier lors de la publication d'un bilan annuel montrant que le nombre de policiers blessés par arme était passé de 430 à 687 entre 2015 et 2016:
«L'augmentation du nombre d'agressions sur des policiers ou des gendarmes en service actif est une tendance qui s'inscrit sur le long terme.»
Autre tendance remarquée, et qui inquiétait alors l'IGPN en 2017, celle des «tirs accidentels recensés», qui dépassent aujourd'hui «le caractère exceptionnel». L'instance plaidait pour un renforcement des niveaux d'entraînement exigés.
«L'institution commence à être capable de rendre publiques des informations sur ce qui est essentiel. Et l'un des objectifs essentiels de la police est d'arriver à ne pas tuer ou blesser»,
souligne Sebastian Roché, directeur de recherche au CNRS et auteur de «La police en démocratie», cité par l'AFP.
Un bilan plus complet devrait être communiqué début 2019, après une pleine année de recensement, et assorti de comparaisons internationales.