Cocaïne saisie à Oran par l’Armée: le chef de la DGSN débarqué par Bouteflika

© AFP 2024 Arnulfo FrancoBrique de cocaïne
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Le Président algérien Bouteflika a mis fin, le 26 juin, aux fonctions du directeur général de la Sûreté nationale, suite à la critique que ce dernier a porté à l’adresse de la marine algérienne dans l’affaire de la cocaïne saisie à Oran. Contrairement à lui, le chef d’état-major de l’armée a félicité les forces navales pour le travail accompli.

L'affaire de la saisie, le 29 mai, de 701 kg de cocaïne à bord d'un bateau dans le port de la ville d'Oran, supposé transporter de la viande rouge importée du Brésil pour le compte de Kamel Chikhi surnommé «Kamel le boucher» continue de défrayer la chronique en Algérie. En effet, suite à ses déclarations concernant cette affaire, le 26 juin, le général-major Abdelghani Hamel, le directeur général de la Sûreté nationale (DGSN), a été limogé par le Président Abdelaziz Bouteflika et remplacé par le colonel Mustapha-Lakhdar El-Habiri, selon un communiqué de la présidence de la république cité par l'Algérie Presse Service (APS).

​Le général Hamel a ouvertement critiqué la manière avec laquelle a été menée l'enquête préliminaire par les forces navales algériennes dénonçant des dépassements. Le même jour, en visite à la 2e région militaire à Oran, le général de corps d'armée Ahmed Gaïd Salah, chef d'état-major de l'armée algérienne et vice-ministre de la Défense nationale, a félicité les efforts menés par la marine algérienne ayant abouti à l'interception de cette cargaison de cocaïne.

​«Il y a eu des dépassements et des violations lors de l'enquête préliminaire, mais les juges étaient vigilants et ont tranché en évitant la dilution des choses», a déclaré à la presse l'ancien chef de la police algérienne. «Là, je dis que celui qui veut lutter contre la corruption doit être propre», a-t-il ajouté, en affirmant que «l'institution de la police est déterminée à poursuivre son travail et à continuer la lutte contre la corruption».

Tout en affirmant que la police transmettra tous les dossiers en sa possession sur l'affaire de la cocaïne à la justice, M.Hamel a souligné que «personne ne peut arrêter l'institution policière avec les allégations, les manipulations ou en lui faisant peur. Nous résistons».

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Le fait que ce sont les forces navales de l'armée algérienne, informées par les services de renseignement espagnols, qui sont intervenues pour intercepter cette cargaison en place et lieu de la police nationale et des services de douanes aurait semé beaucoup de doute sur les tenants et aboutissants de cette affaire. Mais pas uniquement. Des informations ont circulé faisant état de la complicité du chauffeur personnel de l'ex chef de la DGSN. Cette dernière a démenti ces informations, dans un communiqué publié le 22 juin, en précisant que le suspect est «un chauffeur des services du parc automobile de la direction et non pas le chauffeur personnel du directeur général de la Sûreté nationale». «Ces rumeurs sont l'œuvre d'individus qui ont des objectifs précis pour semer la zizanie au lieu de laisser la justice faire son travail conformément à la loi», a précisé le même communiqué.

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Pour sa part, Ahmed Gaïd Salah a déclaré, le 26 juin, lors de sa visite à la 2e région militaire à Oran, évoquant les efforts que les forces navales déploient dans la protection des eaux territoriales du pays, que «la grande quantité de cocaïne interceptée récemment est la meilleure preuve de l'efficience de ces efforts». «Nous avons veillé au sein de l'Armée nationale populaire, ces dernières années, à accorder une importance absolue à la sécurisation de l'ensemble de nos frontières nationales», a-t-il ajouté, selon un communiqué du ministère de la Défense.

Les officiels algériens semblent divisés sur l'explication des dessous de cette affaire de saisie de la cocaïne. Il y a ceux qui voient en elle une agression extérieure et ceux qui la lie uniquement à la corruption.

En effet, le Premier ministre algérien Ahmed Ouyahia a déclaré, le 23 juin, à Alger, lors d'une conférence de presse que «lorsqu'on voit le flot de drogue qui s'abat sur nos frontières de plusieurs destinations, nous considérons que nous ne sommes pas dans l'excès de qualifier cela d'agression».

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Alors que Tayeb Louh, le ministre de la Justice et garde des sceaux, a affirmé le 25 juin, lors d'une conférence de presse, que l'enquête sur l'affaire de la saisie de plus de 701 kg de cocaïne au port d'Oran a révélé «l'implication de plusieurs personnes dans des faits liés à la corruption et de pots-de-vin versés en contrepartie de facilitations».

Mohammed Elias Rahmani, un ancien haut officier de l'ANP et fondateur du parti politique Front des forces vives à Paris, a une toute autre analyse de cette affaire. Dans une vidéo publiée le 25 juin sur la chaîne YouTube de son parti, il a estimé que la cocaïne interceptée à Oran rentrait dans le cadre du narco-terrorisme et non pas dans celui du narcotrafic et de la corruption, comme veut bien le faire croire la vague de déclarations de certains officiels et le traitement médiatique qui s'en est suivi. Pour lui, le fait que c'est l'armée algérienne qui a intercepté cette cargaison confirme la thèse qu'il avance.

«Ils sont en train d'orienter l'opinion publique dans une fausse piste sur cette question de la cocaïne. Ils parlent de corruption autour de cette affaire mais dans le but de la noyer», a déclaré l'ancien officier. «Le fond de cette affaire est la cocaïne. Qui a payé cette cocaïne, comment l'argent est sorti du pays et qu'elle était sa destination finale?», a-t-il ajouté.

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Dénonçant la tournure que l'enquête autour de ce scandale a pris, en se focalisant sur des aspects marginaux liés à des affaires de corruption et de trafic d'influence, pour lesquelles des personnalités importantes ont été arrêtées, l'ancien militaire a affirmé que «nous l'avons dit dans une vidéo précédente [postée le 4 juin sur la même chaîne, ndlr] que ce n'est pas du narcotrafic mais c'est du narco-terrorisme. Pour moi, cette cocaïne est une valise d'argent destinée à des trafiquants d'armes pour fournir des bases logistiques pour déstabiliser l'Algérie». Pour ce spécialiste du renseignement l'hypothèse que la mafia locale ait profité de cette opération pour sauvegarder ses privilèges, à l'aune de la prochaine élection présidentielle qui pourrait engendrer un changement de pouvoir, n‘est pas à écarter.

Pour rappel plusieurs magistrats et plusieurs hautes personnalités, dont le fils d'un ancien Premier ministre ou encore plusieurs maires et walis ont été inculpé pour trafic d'influence, dans cette affaire qui est sans précédent dans l'histoire de l'Algérie.

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