Francis Mvemba : la jeunesse qui veut redresser la République démocratique du Congo

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Francis Mvemba incarne-t-il un renouvellement dans la vie politique de la République démocratique du Congo (RDC)? Entrepreneur à succès, il ne brigue pas moins que la magistrature suprême de son pays. Il a partagé avec Sputnik son programme pour la RDC, sa vision de l’Afrique et des relations entre son pays et la Russie. Entretien.

«Je porte en moi, l'espoir de la jeunesse, pour l'espoir et le renouveau du Congo. Je suis candidat à l'élection présidentielle dans mon pays». Par cette déclaration fracassante, Francis Mvemba annonce son entrée dans la vie politique de la République démocratique du Congo (RDC). Entrepreneur à succès, appartenant à une jeunesse africaine active, partisane d'un cadre multipolaire du monde, il développe pour Sputnik ses projets pour la RDC et le continent.

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Sputnik: Vous annoncez votre candidature à l'élection présidentielle de la République démocratique du Congo. Pourquoi maintenant et quel est votre objectif politique?

Francis Mvemba: Mon engagement pour la RDC est une mission sacerdotale, avec une détermination sans faille, qui me permettra de rendre à la nation congolaise sa souveraineté mise à mal par la prédation organisée et la forfaiture sans précédent, de permettre à tout le monde d'espérer et croire en sa chance.

La destinée d'un peuple s'accomplit lorsque celui-ci se trouve dans une autosuffisance alimentaire, le goût intrinsèque d'apprendre et la sublimation de ses connaissances au service de la nation.
L'amalgame de ces ingrédients, qui constituent la cheville ouvrière de la réussite d'une nation pérenne donnera la possibilité, à ce peuple aujourd'hui décrié, d'accéder à la liberté de choix de leur vie, ouvrant par voie de conséquence, les portes de la vraie démocratie tant espérée par tous…

Frantz Fanon illustrait bien, dans sa description métaphorique sur l'Afrique, qu'elle avait la forme d'un revolver et la gâchette se trouve au Congo. Dans sa position géopolitique et géostratégique, la RDC indubitablement, devrait reprendre sa place d'antan, de leader incontesté, qui faisait rêver d'autres nations africaines.

Sputnik: Vous avez décidé de ne pas vous joindre à un quelconque rassemblement de l'opposition, qu'est-ce qui vous différencie des autres candidats?

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Francis Mvemba: Tout d'abord, je ne suis pas le produit des systèmes ou des alliances politiques du passé. J'incarne la jeunesse et le changement. Un changement qui se décline sur un leitmotiv, que tout le monde doit intégrer, l'espoir d'un peuple… Mon challenge, qui n'est pas d'ailleurs un rêve insensé que chaque Congolais puisse croire en sa nation et en ses dirigeants.

Au travail et à la méritocratie, avec l'apport de la jeunesse dépourvue du tribalisme, du régionalisme et du népotisme qui gangrènent la terre de nos ancêtres, afin de bâtir ensemble une nation équilibrée, équitable, synergique à la lumière de ses 435 ethnies.

Sputnik: Quel constat faite-vous de la situation de votre pays? Quelle est votre analyse?

Francis Mvemba: La RDC, depuis 40 ans, n'est plus sur le chemin de la prospérité, de l'émergence, mais sur celui de la souffrance et du désespoir, mettant nos populations entières dans une paupérisation insupportable. Or, ce pays qui m'a vu naître possède une potentialité énorme, avec la première richesse dont nous disposons: celle de nos filles et fils qui font le socle de notre futur épanouissement.

C'est avec ce peuple que je vais pouvoir dessiner les contours des nouvelles fondations d'un État au demeurant en faillite, laissé à l'abandon… Une faillite morale, idéologique, institutionnelle, sociétale et matérielle sciemment entretenue par ceux qui ont fait de ce pays, le grand Congo aux pieds d'argile, devenu la risée de tous.

Sputnik: Vous nous avez parlé à plusieurs reprises de votre programme et de votre projet, quelles sont les solutions de redressement de votre pays?

Francis Mvemba: En circulant à travers toute l'étendue du territoire congolais, j'ai mesuré les priorités de mon peuple et pu toucher du doigt les vraies réalités qui prévalent dans ce vaste territoire, grand comme toute l'Europe occidentale réunie.

Dans la recherche des solutions pour le redressement économique de mon pays, j'ai vu, la mort dans l'âme, comme dans la Russie des années 1990, comment les ressources de ma nation sont détournées et sorties en contrebande. Nous ne laisserons plus les provinces et autres zones de non-droit devenir le refuge de rebelles, de pilleurs et de contrebandiers. Selon un rapport de African Business Magazine, la richesse minérale totale de notre sol est estimée à 20.000 milliards d'euros et notre nation atteindra un marché potentiel de 100 millions d'habitants.

En établissant de façon honnête, responsable et pérenne les partenariats politiques, économiques, technologiques et financiers, pour le bien-être et le vivre ensemble de nos populations respectives, nous nous hisserons en étendard, en porte flambeau, à la lumière de nos ressources naturelles incommensurables, en carrefour économique, sous-régional, digne d'une nation souveraine et réconciliée avec les vraies valeurs d'un État de droit.

Sputnik: Mais pourquoi avoir pris cette décision de se présenter à l'élection présidentielle?

Francis Mvemba: J'ai pris la ferme résolution, une décision mûrement réfléchie, de me présenter comme candidat à l'élection présidentielle en République démocratique du Congo. Ayant pris conscience de la gravité de la situation catastrophique que mon pays traverse, une mission d'urgence patriotique pour sauver le Congo était nécessaire. Une mission qui est celle de la libération du peuple du joug de la souffrance dans laquelle il s'est englué depuis des décennies. Je réponds naturellement, en tant que patriote, à l'appel de ma conscience et je suis prêt à relever ce défi. J'en ai la force et les convictions. Aucun obstacle, aussi grand soit-il, ne m'empêchera de prendre en main la destinée de mon pays.

J'en appelle à tous les Congolais, tant ceux de l'étranger, qui sont le cordon ombilical économique de notre patrie, qu'à tous ceux d'entre nous vivant au pays. J'invite solennellement et fraternellement tous mes compatriotes à faire bloc derrière cette candidature d'espoir qui est une chance pour le renouveau du Congo. Cette révolution démocratique ne pourra en aucun cas se faire, sans les forces vives de la nation.

Sputnik: Concrètement, quels sont vos engagements politiques? Avez-vous des priorités dans votre programme?

Francis Mvemba: L'enjeu, sans prétention aucune, à la lumière de mon expertise et connaissance du terrain, est de redonner l'espoir à mon peuple meurtri, qui vit avec moins de 1,8 $ par jour dans une misère absolue. De rétablir l'autorité de l'État, de l'appareil judiciaire et policier. De lutter activement contre la corruption institutionnalisée…
Je souhaite redorer le blason de l'armée nationale en déliquescence, fleuron de la patrie, la mise en place, dans un court délai, d'une classe moyenne et compétitive, rétablir enfin, la souveraineté du territoire national, en bonne entente avec nos neuf voisins éternels.

Notre programme s'articulera sur trois volets spécifiques, qui sont regroupés dans la devise emblématique de la Nation congolaise, à savoir, Justice, Paix et travail.

Dans le volet justice: l'un des postes régaliens qui est le régulateur des Institutions, de tous les appareils de notre démocratie, devrait avoir une place sans conteste prépondérante dans nos actions pour l'établissement d'un État véritablement de droit: la justice pour tous, et l'impunité sera bannie à jamais. L'indépendance de la justice et l'impartialité de juges seront renforcées par un arsenal juridique et judiciaire qui sera verrouillé par le vote à l'Assemblée nationale.

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Dans le volet paix: ce volet porte bien son appellation, «paix». Pour avoir une paix durable, il faut reconstruire l'armée nationale qui sécurisera nos frontières et les intérêts de la nation. La mise en place d'une armée professionnelle avec des unités et centres de formation avec instructeurs aguerris, disséminés dans toute l'étendue du territoire.
Recensement de l'armée congolaise qui est infiltrée par des éléments subversifs portant atteinte à l'intégrité territoriale. Rendre obligatoire, «l'engagement citoyen», service militaire d'un an, dans l'une des unités de l'armée nationale, après ses études secondaires.

Réformer également, la police nationale et mise à la retraite anticipée de tous ceux qui se sont enrichis illicitement dans l'exercice de leurs fonctions. Former la police nationale dans le respect de la population, tout en jouant le rôle du gardien de la paix.

La création d'une unité de surveillance du territoire, dédiée au renseignement extérieur. Tout en redonnant une autre vocation à l'Agence Nationale du Renseignement, ANR en sigle, un conglomérat et agglomérat d'agents sans formation spécifique, qui devraient être au service de la nation. Le recensement et refonte de cette agence paraît urgent pour la sauvegarde des intérêts stratégiques du pays.
La réactivation de la police militaire, qui assurera la sécurité et l'application des lois au sein de l'armée congolaise qui s'est illustrée dans l'incivisme à outrance.

Dans le volet travail: en 1963, le Congo avait plus de 3.000 industries rentables qui employaient les enfants du pays. Elles ont quasi toutes disparu, avec également la zaïrianisation, impulsée par la folie mégalomaniaque de feu Mobutu. Un emploi, en RDC, équivaut à 7 personnes qui vivent ou survivent sur un salaire. Lorsqu'on crée 150.000 emplois, ces emplois créés soutiennent à hauteur d'un million de Congolais… Et nous allons en créer, des emplois, en utilisant notre projet de société qui produit des richesses.

Nous allons reformer et alléger les charges de ceux qui vont investir dans la politique agraire, en mettant en place une réforme agraire qui favorisera les autochtones, les locaux qui seront en plus subventionnés. Nous produirons localement nos produits, en mettant l'accent sur les produits de la première nécessité. Tobanga Nzambe! Que Dieu bénisse le Congo.

Sputnik: dernière question. Au vu du rapprochement observé actuellement entre la Russie et la RDC, le tout au moment d'un plein retour de Moscou sur le continent africain, quelle analyse en faites-vous? Quelle est cette place de la Russie dans ses rapports, aussi bien avec la République démocratique du Congo, que plus généralement avec l'Afrique?

Francis Mvemba: Le Président Vladimir Poutine avait lancé, lorsqu'il est arrivé au pouvoir, un message fort significatif, à l'endroit de l'Afrique et des Africains, définissant sa politique en Afrique.
Dans son pragmatisme, il s'imposera comme l'un des meilleurs garants du monde multipolaire, et dira sans ambages: «Je déteste l'instabilité politique. Par conséquent, je ne peux pas m'installer dans des endroits ou établir des relations fortes avec des nations, des régimes, qui ne sont pas solidement ou durablement installés. Par contre, toute nation qui s'installe dans une démarche de pérennité, de stabilité, j'essayerai d'établir un certain nombre de contrats dans l'économie, sur le terrain politique, social et sur le terrain du conseil militaire également.»

Pour joindre l'acte à la parole, il apportera symboliquement à l'OUA, l'Union africaine actuelle, une enveloppe de 2 millions de dollars et ajouta: «cette somme est une invitation aux Africains à se prendre en charge pour aller vers leur autosuffisance, leur indépendance. Il faut cesser les grands financements extérieurs et commencer à vous autofinancer intérieurement. Vous avez la possibilité de le faire avec l'active participation de vos États respectifs. Autodéterminez-vous et fuyez l'aide extérieure. La main qui vous donne est celle qui vous asservira!»

Ce qui est clair aujourd'hui, c'est que nous sommes à l'aube de grandes avancées dans la diplomatie africaine de la Russie, à la lumière de ces deux dernières actions concrètes en Afrique centrale, où celle-ci vient de poser sa marque de fabrique:
Une quarantaine d'éléments des forces spéciales russes ont été affectés à la garde rapprochée du président Touadéra, faisant grincer les dents de ceux qui entretiennent l'instabilité dans cette zone, riche en ressources naturelles. Ces militaires ont une capacité d'adaptabilité étonnement professionnelle et font partie des instructeurs russes déployés en République centrafricaine pour une mission de formation et de sécurisation, dans le cadre d'une livraison d'armes en janvier 2018.

À l'heure où les radars et les projecteurs de la communauté internationale étaient braqués sur les prochaines élections en RDC, la Russie dans sa stratégie silencieuse, adepte de la realpolitik, souverainiste convaincue, s'implante au Congo, où tous les enjeux stratégiques se dessinent, et dame le pion à tout le monde au grand dam de ses adversaires. Cette coopération militaire marque un tournant historique dans la politique souverainiste de Moscou, pour la stabilité en Afrique subsaharienne.

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À terme, comme le président Poutine l'avait spécifié et martelé dans son message aux Africains et à l'Union africaine, à propos de leur indépendance véritable, cette coopération ne s'arrêtera pas que dans le domaine militaire, mais aussi économique, commercial, énergétique et plus loin encore, dans le secteur des mines et de l'agriculture.

Il faudra se rappeler un tant soit peu des faits historiques de la Russie en Afrique où elle a, à plusieurs reprises, tenté de s'imposer. Au XVIIe siècle, où la Russie avait le projet de s'établir en Éthiopie ancienne, où elle partageait un certain nombre de points communs avec la communauté de foi de l'orthodoxie chrétienne. Une alliance qui avait pour but de faire un contrepoint contre l'invasion étrangère, notamment italienne.
Elle tentera également de s'installer du côté de Madagascar à l'époque de Pierre le Grand. Le but était clair, d'arrêter les velléités, l'influence de la Grande-Bretagne dans l'océan indien. Avec deux angles stratégiques, celui de l'océan indien et de se tourner vers l'Afrique.
Un fait historique sans précédent; la Russie voulait installer la nouvelle Moscou à Sagala, actuelle Djibouti. La Russie sera ostracisée par certaines puissances pour qu'elle ne puisse pas avoir pied en Afrique.

Géopolitiquement, dans sa position éloignée de notre continent, elle n'a pas pu avoir le même rôle que les Occidentaux, qui avaient opté pour la conquête de notre Afrique tant convoitée. Cela a créé une certaine frustration, qui se définit et se traduit aujourd'hui par son engagement ferme d'aider ce continent en proie à des visées expansionnistes.

C'est dans les années 50 qu'on verra apparaître ce concept issu d'une doctrine souverainiste qui a commencé à profiter à la Russie. Il a fallu attendre l'arrivée de Khrouchtchev, avec sa diplomatie et son approche militaire, pour qu'on vive l'avènement des révolutionnaires souverainistes, comme Sekou Touré, Patrice Lumumba et Kwame Nkrumah aidés, soutenus par la Russie avec l'optique de refuser la colonisation.

La Russie a accompagné structurellement dans leur émancipation l'ANC en Afrique du Sud, le MPLA en Angola, Frelimo et le Mozambique, jouant le rôle, de garante du monde libre. Le mur de Berlin tombera en nombre 1989, la Russie perd pied et son influence en Afrique. Ses ambassades ferment, les conseillers militaires sont rappelés, et la Russie plie bagage.
Aujourd'hui donc, le paradigme évolue et une nouvelle lecture géopolitique et géostratégique se fait avec la Russie de Vladimir Poutine, offrant une autre alternative.

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