«Matignon et le groupe L'Oréal verrouillent tout. Cela s'appelle de la communication, pas du journalisme.»
Dans une vidéo au vitriol, Marie Roussel, une journaliste de France 3, ne décolère pas. En effet, elle s'est vue refuser l'entrée lors d'un déplacement du Premier ministre le 17 février dernier, malgré une accréditation en bonne et due forme. Les cameramen qui l'accompagnaient ont été autorisés à suivre l'événement, mais, comme l'explique ironiquement la journaliste, dans les 45.000 m2 de l'usine, «il n'y avait de place ni pour [elle] ni pour [ses] questions».
⚡🇫🇷 VIDÉO — Le coup de gueule d'une journaliste de France 3 Hauts-de-France, Marie Roussel, en marge d'une visite du 1er ministre dans l'#Oise: "Cela s'appelle de la communication, pas du journalisme…" (📹France 3) #compol pic.twitter.com/TCIPV7hmVP
— AlertesInfos (@AlertesInfos) 17 февраля 2018 г.
Une situation qui semble se répéter de plus en plus fréquemment depuis l'entrée d'Emmanuel Macron en politique. Durant la campagne présidentielle, le candidat En Marche! avait refusé à certains médias l'accès à son QG. Accusés d'être des «agences de propagandes d'État», Sputnik et RT avaient ainsi été refoulés au soir du premier tour. Depuis, nos confrères ont été refoulés à plusieurs reprises d'événements élyséens, en France et à l'étranger.
La communication de l'exécutif s'est verrouillée au point d'inquiéter très rapidement les principaux organes de presse du pays: le jeune chef de l'État s'était fait remarquer à l'occasion de son premier déplacement officiel.
Alors qu'il s'apprêtait à partir pour le Mali, Emmanuel Macron avait choisi ad hominem les journalistes désignés pour l'accompagner, ce qui avait engendré une levée de boucliers de l'ensemble des professionnels de la presse, qui avait répondu par une lettre ouverte au Président.
Dénonçant des méthodes qu'aucun Président n'avait employé «au nom de la liberté de la presse», les organes de presse signataires argumentaient que, dans un contexte où les fake news sont de plus en plus au cœur du débat, le fait de choisir les journalistes chargés de couvrir un événement «nuit à la démocratie» et alimente les soupçons de collusion entre l'exécutif et les médias.
Les mots de Franck Pavloff, dans une nouvelle décrivant l'installation insidieuse d'un État totalitaire au travers de mesures a priori sensées, justifiées, mais qui entravent les libertés, résonnent aujourd'hui encore de manière particulière:
«On aurait dû dire non. Résister davantage, mais comment? Ça va si vite, il y a le boulot, les soucis de tous les jours. Les autres aussi baissent les bras pour être un peu tranquilles, non?» Franck Pavloff, Matins Bruns, 1998.