« Les inégalités augmentent en France », confirme l'économiste David Cayla, commentant le rapport que l'ONG Oxfam a publié aujourd'hui. Cette dernière profite du sommet Davos, en Suisse, pour tirer la sonnette d'alarme: l'année dernière, 82 % des richesses engendrées ont profité au 1 % les plus riches de la population mondiale. La France ne fait pas exception: l'année dernière également, les 10 % les plus riches détenaient plus de la moitié des richesses, alors que les 50 % les plus pauvres ne s'en partageaient que 5 %… « Le fossé entre riches et pauvres atteint également des sommets », lit-on dans le rapport.
« Effectivement, les plus riches ne cessent de s'enrichir. Mais ça ne veut pas forcément dire que les plus pauvres s'appauvrissent », estime David Cayla, économiste à l'université d'Angers et membre des Economistes atterrés, tout en soulignant que les classes moyennes peuvent se sentir lésées: « C'est tout l'aspect un peu révoltant et qui, du coup, donne l'impression à la plupart des gens d'être exclus des politiques menées actuellement ».
« Quand le gouvernement Macron décide de supprimer l'ISF, et notamment sur la fortune financière et de le remplacer par l'impôt immobilier, lorsqu'il propose une taxe forfaitaire sur le revenu du capital, clairement il avantage et il tend à pousser vers le haut ceux qui gagnent le plus ».
L'objectif affiché du gouvernement, avec la loi de finances 2018, est de faire en sorte que cette fiscalité, avantageuse pour les plus favorisés, encourage les investissements étrangers sur le sol français, afin de faire revenir les capitaux. Mais cette théorie du ruissellement, qui consiste à favoriser les riches sur le plan fiscal pour que tout le monde, à terme, en profite, est-elle vraiment efficace? Rien n'est moins sûr, estime David Cayla:
« Ce n'est pas qu'il [le gouvernement, ndlr] croit qu'en devenant plus riche, les riches s'enrichiront. C'est qu'il croit qu'en favorisant ceux dont le capital est le plus mobile, il va attirer une partie du capital international qui va venir en France. Le problème, c'est que tous les pays font ça ».
« Je crois que le gouvernement est sincère lorsqu'il croit qu'en attirant les capitaux de l'étranger, on va créer de l'emploi. Mais c'est une démarche dont le cœur est une logique de compétitivité », estime l'économiste « c'est la concurrence avec les autres pays qui est au cœur de la logique. Pas simplement l'idée que la richesse va ruisseler vers le bas ».
« Macron qui a réuni à Versailles 140 chefs d'entreprises, c'est tout à fait logique. ‘Regardez la France, on est attractifs, on ne taxe pas les gens'. C'est une politique mercantiliste du capital, c'est-à-dire qu'on essaie de récupérer du capital sur le dos de nos partenaires. C'est une politique qui n'a de sens que dans un monde global, dans lequel le capital circule ».
« Oui, mais ce n'est pas que la France, c'est le monde entier. Tous les pays font la même politique et qui se veut le plus attractif pour les plus riches. Les conséquences de ça, c'est un monde qui devient de plus en plus inégalitaire », constate David Cayla.
L'ONG Oxfam lance une pétition, baptisée "Loi inégalités", pour soutenir les propositions de mesures qu'elle a soumises à Emmanuel Macron, afin de faire de la France « un pays pionnier dans la lutte contre les inégalités et de donner forme à une économie plus humaine, inclusive et responsable ». Reste à savoir si le gouvernement suivra.