On serait tenté d'expliquer ces évènements avec la même grille de lecture que les Printemps arabes, mais à lire attentivement la nouvelle stratégie américaine de sécurité nationale, il apparaît clairement que les États-Unis considèrent toujours l'Iran comme un pays menaçant ses intérêts vitaux et plus encore, la Chine et la Russie. Viendrait alors la question cruciale: qu'est-ce qui peut expliquer la vision de Washington envers ces pays, et y'aurait-t-il un lien entre eux?
La réponse est que les pays désignés, et les États-Unis, seraient les éléments clés d'une guerre financière globale, vu leurs positions dans l'économie mondiale, et en particulier à cause du fait que la Chine, la Russie et l'Iran sont en train de façonner une énorme zone monétaire alternative à celle dominée par le dollar, malgré que ce dernier soit aussi parfois attaqué sur son programme balistique.
Alors quels seraient les vrais dessous des cartes du théâtre géopolitique qui se déroule sous nos yeux?
Les limites du cap défini aux États-Unis et les évènements en Iran
La réponse est une ruée sur les bons du Trésor américain sans risque, chose que les États-Unis ont toujours réussi à susciter en provoquant des crises militaires majeures, pour pouvoir garder les taux d'intérêt bas d'un côté, et ramener les dollars se trouvant hors de leur pays de l'autre. Mais, actuellement, pour que cela puisse marcher, il faut que le dollar garde sa place de monnaie de change dominante sur les marchés internationaux, ce qui est loin d'être gagné.
L'arme financière américaine a déjà frappé l'Iran en 2012, quand Washington a bloqué des avoirs, de 32 milliards de dollars, des banques iraniennes provoquant une inflation massive dans le pays qui a conduit à l'effondrement de la monnaie nationale.
Qu'en est-il pour la Chine et la Russie?
La Chine qui considère que les États-Unis essayent de régler leur crise en récupérant la richesse des autres pays, en particulier la sienne vu sa taille, est certainement, avec la Russie, la clé de la future architecture financière hors dollar.
En effet… Et c'est là que résiderait le nœud de sa stratégie, quelques années avant que le yuan ne devienne une monnaie de réserve majeure, la Chine avec ses partenaires veut rattacher le pétrole, dont l'Iran est son principal fournisseur, et toutes les marchandises à l'or, comme cela existait avant le 15 août 1971. Pour cela, le Shanghai International Energy Exchange (INE) a déjà effectué quatre tests d'environnement de production pour les contrats à terme sur le pétrole brut. Ce dernier sera convertible en or physique sur les marchés aurifères de Shanghai ou de Hong Kong. À plus long terme, le pétrole devenant directement lié à l'or plutôt qu'au dollar, il sera possible de réévaluer le prix du métal par rapport à la monnaie américaine, et c'est là où se trouve la clé de changement de système.
Entre les menaces contre les Corée du Nord et l'ingérence en Iran, les États-Unis ne semblent pas vouloir abandonner leur politique. Pékin et Moscou continuent à garder leurs sang-froid, en espérant que Washington ne les pousse pas à mettre sur le marché financier mondial ce qu'ils possèdent comme dollars et bons du Trésor américains, ce qui porterait le coup de grâce à la monnaie américaine. C'est à cette éventualité que Guerman Gref, le PDG de la plus grande banque commerciale de Russie, la Sberbank, dans un entretien accordé au Financial Times, a fait allusion en déclarant que:
«tout nouveau durcissement des sanctions antirusses, y compris l'exclusion potentielle des banques et des entreprises russes du système de paiement SWIFT [le réseau mondial de services de messagerie financière sécurisés, ndlr] aurait un effet tellement dévastateur qu'il ferait passer la guerre froide pour un jeu d'enfant».
De son côté, lors du sommet des BRICS en septembre 2017, Vladimir Poutine a insisté sur «les inquiétudes des pays des BRICS par rapport à l'injustice de l'architecture financière et économique mondiale qui ne peut pas tenir dûment compte du poids croissant des économies émergentes», tout en soulignant la nécessité de «surmonter la domination excessive d'un nombre limité de monnaies de réserve».
Qu'apportera l'évolution future de la situation?
D'importants pays commencent à rejoindre la dynamique de dédollarisation. Le Venezuela, possédant les premières réserves mondiales de pétrole et allié de l'Iran dans l'OPEP, a enclenché la publication d'un indice des prix de l'or noir libellé en yuan. Si celui-ci est rejoint par d'autres États exportateurs d'or noir comme l'Arabie saoudite, on verrait certainement un déplacement du système pétrodollar vers le yuan.
La Chine peut accélérer le processus en passant à l'échange de biens exclusivement en yuan, déclassant ainsi complètement le dollar comme premier moyen de transaction. Avec la Russie, elles seraient rejointes par l'Iran, qui d'ailleurs aspire à rentrer dans l'Organisation de coopération de Shanghai (OCS), en plus des autres pays des BRICS (Brésil, Inde, Afrique du Sud), ce qui permettra ainsi de constituer un bloc de plus de 43% de la population mondiale.
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