Le Service fédéral de sécurité (FSB) russe, dont l'une des principales missions est le contre-espionnage, fête son 100e anniversaire. Passage en revue des hauts faits de ce métier à risque.
4.000 agents étrangers
Selon le département judiciaire de la Cour suprême, en 2016 13 Russes ont été condamnés pour haute trahison, et trois étrangers ont été condamnés pour espionnage. Selon les experts, ces chiffres modestes ne reflètent pas l'activité réelle des renseignements étrangers en Russie.
D'après Alexandre Mikhaïlov, très peu d'agents étrangers démasqués se retrouvent en prison. En règle générale, l'affaire se limite à leur expulsion sans fuite dans les médias. Certains agents découverts ne se doutent même pas qu'ils sont surveillés et sont utilisés par les renseignements comme un canal de désinformation. Au total, selon les informations officielles, rien qu'au premier semestre 2017 l'activité de 30 agents étrangers et de plus de 200 personnes soupçonnées de coopérer avec les renseignements étrangers a été stoppée en Russie.
Face à la CIA
Selon les experts, les USA restent l'un des principaux adversaires de la Russie en matière de renseignement. L'espion américain le plus haut placé démasqué par les agents russes du contre-espionnage dernièrement était le troisième secrétaire de l'ambassade américaine et concurremment agent de la CIA Ryan Fogle. Ce dernier a été arrêté en mai 2013 alors qu'il tentait de recruter un officier des renseignements russes dans les meilleures traditions du genre d'espionnage: Fogle est venu au rendez-vous avec une perruque, des lunettes, une boussole et la carte de Moscou.
Après le rattachement de la Crimée et le début de la guerre dans le Donbass, l'Ukraine a engagé une activité de renseignement effervescente en Russie. Les agents de la Direction générale du renseignement du ministère de la Défense et du Service du renseignement extérieur de ce pays se font régulièrement remarquer par les renseignements russes. La destination la plus populaire des agents ukrainiens est la Crimée, sachant que leurs missions ne se limitent pas au recueil d'informations. Les membres d'au moins trois groupes de renseignement ukrainiens démasqués en Crimée préparaient des sabotages de sites d'infrastructure. Les combattants ukrainiens du front invisible font également leur apparition dans la partie continentale de la Russie: en octobre 2017 à Togliatti a été arrêté l'ouvrier d'un chantier naval qui avait été chargé par les renseignements de recueillir des informations sur le travail de l'entreprise. L'agent malchanceux a finalement été expulsé vers l'Ukraine.
Les réseaux sociaux, avant-poste de l'espionnage
L'intensification de l'activité des renseignements étrangers n'est pas seulement liée à l'aggravation des relations entre la Russie et l'Occident. Selon les experts, les renseignements étrangers s'intéressent tout particulièrement au programme national d'armement dans le cadre duquel l'armée reçoit les tout derniers modèles de matériel militaire. Ainsi Alexeï Jitniouk, 24 ans, Moscovite qui d'après l'enquête recueillait des informations sur la marine russe et les transmettait via un agent à la CIA, a été arrêté le 12 décembre à Moscou.
«Aujourd'hui la préparation au recrutement d'un homme ne nécessite aucune approche particulière, estime Alexandre Mikhaïlov. Les gens publient sur internet non seulement leur biographie, mais également les lieux qu'ils visitent, leurs liens d'amitié et même ce qu'ils mangent. C'est pourquoi les réseaux modernes représentent un avant-poste colossal pour le renseignement. En ce qui concerne l'espionnage électronique ou les attaques de hackers, les événements de ces dernières années montrent que nos services, à l'exception de cas isolés de trahison, n'admettent pas d'importantes fuites d'informations confidentielles. Dans le même temps les fuites aux USA sont majeures avec Snowden ou encore WikiLeaks — mais ces fuites n'étaient pas une grande révélation pour nous car nous savions déjà tout cela depuis longtemps.»
Actuellement, la structure principale du contre-espionnage russe est le Service de contre-espionnage du FSB qui regroupe des unités pour le contre-espionnage militaire, industriel et économique. Plusieurs autres renseignements disposent de leurs propres sections de contre-espionnage, notamment le Service du renseignement extérieur (SVR) et la Direction générale de l'État-major des forces armées (GRU).