Quand Macron pourrait donner des leçons d’«en même temps» à Merkel

© REUTERS / Fabrizio BenschMacron et Merkel
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C’est l’impasse en Allemagne: faute de compromis, les libéraux-démocrates claquent la porte des négociations visant à former une coalition gouvernementale. Un échec de «Mutti» qui peut paradoxalement être mis en regard avec le succès d’Emmanuel Macron à allier les contraires sur sa personne. Et si c’était lui le vainqueur de la crise allemande?

«Il est préférable de ne pas gouverner que de mal gouverner»: c'est sur ces mots du libéral-démocrate Christian Lindner que son parti, le Freie Demokratische Partei (FDP), a claqué le 19 novembre la porte des négociations en vue de former une coalition de gouvernement en Allemagne. Fiscalité, écologie, énergie mais surtout immigration: les divisions auront été trop importantes et trop nombreuses entre la CDU d'Angela Merkel, les Verts et les libéraux-démocrates pour faire vivre l'hypothétique coalition «jamaïcaine» noire-jaune-verte.

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Merkel s’accroche au pouvoir: un scrutin anticipé plutôt qu’un gouvernement minoritaire
Alors qu'un retour des sociaux-démocrates (SPD) au gouvernement n'est toujours pas d'actualité, puisque le parti de Martin Schulz réaffirme sa volonté de «se ressourcer» dans l'opposition, il s'agit d'ores et déjà de la plus grave crise politique de l'ère Merkel, au pouvoir depuis plus de onze ans. Un cas de figure par ailleurs inédit dans le pays depuis 1949 et qui s'inscrit dans un contexte de scores historiquement bas pour les deux principaux partis que sont les conservateurs de la CDU-CSU et les sociaux-démocrates du SPD.

Ce 20 novembre à la mi-journée, le président fédéral allemand Frank-Walter Steinmeier (dont le rôle, essentiellement honorifique, est d'assurer la continuité de l'État et d'être garant des institutions), appelle à la reprise des pourparlers. De fait, les deux scénarios catastrophe à éviter pour l'exécutif allemand sont d'une part la tenue de nouvelles élections, qui acteraient l'échec, et d'autre part la constitution d'un gouvernement minoritaire exclusivement CDU, par essence fragile. C'est pourtant ce premier cas de figure de retour aux urnes qui semble le plus probable selon la plupart des observateurs, et qui pourrait se solder par une mise à l'écart de la chancelière. Mais la principale intéressée se dit prête à mener son parti dans de nouvelles élections, qui seraient selon elle «une voie préférable».

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Le SPD dit définitivement «nein» à une coalition avec Merkel
Le syndrome belge n'est pas loin, même si Angela Merkel reste pour l'instant au pouvoir pour gérer les affaires courantes. Au Royaume-Uni, on se souvient que Theresa May a dû se résoudre en juin à une «alliance de la carpe et du lapin» avec le très minoritaire Parti unioniste démocrate nord-irlandais (DUP). Et si la question était surtout le fait qu'Angela Merkel est peut-être en train d'échouer là où Emmanuel Macron a «réussi»? Alors que le régime présidentiel français, surtout depuis la réforme du quinquennat, favorise une alternance de partis présidentiels, l'Allemagne au contraire, avec son régime parlementaire, est connue pour la constitution de coalitions de compromis.

Et c'est bien le tour de force paradoxal auquel était parvenu le candidat d'En Marche pendant la campagne présidentielle, puis dans la composition de son gouvernement: unir autour de sa personne le communiste Robert Hue et en même temps le néolibéral Alain Madelin, l'antinucléaire Nicolas Hulot et en même temps l'ancien cadre d'Areva Édouard Philippe, la pro-PMA Marlène Schiappa et en même temps l'anti-mariage pour tous Gérald Darmanin. Un méli-mélo idéologique qui a déjà été abondamment commenté et qui constitue, là aussi dans un contexte d'affaiblissement des partis «traditionnels», une certaine forme de coalition. Inattendue inversion des rôles entre Paris et Berlin…

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L’échec de la coalition enfonce l’Allemagne dans sa crise «la plus grave depuis 70 ans»
Du côté de Paris justement, Emmanuel Macron exprimait lundi matin son inquiétude face à la situation outre-Rhin, la France n'ayant selon lui «pas intérêt à ce que ça se crispe». Pourtant, un affaiblissement d'Angela Merkel pourrait bien faire les affaires du président de la République, en lui donnant l'occasion de chiper à l'Allemagne le leadership politique sur la scène européenne. D'autant que ces derniers mois, les points de désaccord se sont multipliés entre Paris et Berlin, comme sur les questions de défense européenne ou d'intégration de la zone euro. Nouvel alignement des astres pour Emmanuel Macron? Affaire à suivre…

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