Selon lui, c'est l'entente entre la Russie et l'Arabie saoudite qui a permis de conclure un accord sur la réduction de la production pétrolière. Mohammed Barkindo parle aussi du dialogue entre l'Opep et les USA. A-t-on surmonté la crise dans le secteur pétrolier? Selon RT.
- Le prix du baril a atteint un record depuis 2015 en dépassant la barre des 60 dollars. La demande mondiale en pétrole augmente également. Vous avez présenté un pronostic global annuel sur la situation. Ce marché se dirige-t-il vers une reprise totale?
Tout le monde remplit ses engagements et en moyenne plus qu'à 100%. De plus, depuis le premier semestre 2017, la demande en pétrole continue de croître. Avec le début de la saison automne-hiver nous assistons à une hausse importante de 2 millions de barils par jour. Donc, dans l'ensemble, tout suit la direction donnée. Au final, nous pourrons déboucher sur une situation équilibrée sur le marché.
- Vous avez dit que la disposition de la Russie et de l'Arabie saoudite à prolonger de neuf mois l'accord sur la réduction de la production pétrolière «dissipait le brouillard» avant la réunion de Vienne le 30 novembre, où doit être prise la décision finale sur le sort de ce document. Pensez-vous que l'accord entre Moscou et Riyad représente pratiquement la même chose que l'accord de tout le groupe?
— L'Arabie saoudite et la Russie sont les plus grands producteurs de pétrole. De plus, le ministre saoudien de l'Énergie Khaled al-Faleh et son homologue russe Alexandre Novak ont tous les deux joué en 2016 un rôle clef dans la réunion de ce groupe, qui a permis d'aboutir pour la première fois de l'histoire à un tel accord sur les quotas de production. Cela impliquait entre autres la création de nouveaux organes afin d'effectuer un suivi à part entière de la mise en œuvre de l'accord. Donc oui, ces pays occupent une place à part à l'intérieur du groupe.
— Nous avons réussi à faire abstraction de la géopolitique et de son influence sur le secteur pétrolier. L'Opep a probablement entrepris plus d'efforts que toute autre organisation pour dépolitiser le secteur pétrolier. Par le passé, quand certains membres de l'Opep étaient en état de guerre entre eux, nous avons connu des situations très complexes. Mais nous coopérions tout de même pour trouver des solutions en faisant abstraction des facteurs extérieurs changeants. Nous nous occupions uniquement du pétrole et prenions des décisions de concert pour les mettre en œuvre ensuite. Je pense qu'il en sera de même cette fois.
Tous les pays de l'Opep sont fermement disposés à la mise en œuvre de l'accord sur la réduction de la production pétrolière.
Nous avons reçu l'approbation des autorités des pays de l'organisation. Le président russe Vladimir Poutine a soutenu l'idée de prolonger cet accord, appelé non seulement à rétablir la stabilité dans le secteur mais également à garantir son développement ainsi qu'à le protéger de l'influence des facteurs négatifs qui se font sentir ces dernières années.
- Avec la hausse des prix du pétrole et l'apparition de stimulations supplémentaires, les USA alimenteront indéniablement le marché de plus en plus activement. L'Opep peut-elle faire face à l'Amérique?
— Ces dernières années, les USA ont joué un rôle majeur grâce à l'exploitation de leurs gisements de schiste. Ils ont réussi à mettre en place des fournitures d'hydrocarbures dans des conditions de déficit de l'offre de la part de plusieurs pays membres de l'Opep. Ces derniers étaient confrontés à différentes difficultés menaçant les livraisons pétrolières.
Par exemple, la production a pratiquement cessé en Libye. Avant le début des troubles, ce pays produisait plus de 1,5 million de barils par jour. Au Nigeria, cet indicateur a chuté de presque un million de barils par jour. Les exportations pétrolières iraniennes ont été suspendues à cause des sanctions, et ainsi de suite.
Certains oublient qu'en l'absence de fournitures supplémentaires de pétrole de schiste nous connaîtrions une crise énergétique encore plus grave. En utilisant leurs technologies, leur système financier efficace et leurs méthodes intransigeantes de gestion, les USA ont commis ce qu'on pourrait appeler une révolution de schiste. Aujourd'hui la production pétrolière chute aux USA, notamment à cause du pétrole léger des réservoirs étanches. Le nombre de plate-formes de forage diminue. Les actionnaires et les investisseurs doutent de l'utilité du modèle actuel basé sur le rapport quantité-coût. On assiste à une réduction significative des flux de capitaux de Wall Street — la chute est approximativement de 60 à 6 milliards de dollars. Or c'est cet argent qui finançait l'augmentation de la production.
Il faut noter que, malgré toutes les restrictions législatives des USA, les compagnies américaines ont accepté pour la première fois de rencontrer l'Opep. Voilà ce qui est important. Quelque chose a forcément dû les pousser à le faire. Je suis ravi que la communication ait été ouverte et honnête.
Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur de l'article repris d'un média russe et traduit dans son intégralité en français.