L'Union Européenne est donc en crise, et cette crise s'est approfondie depuis les élections générales qui ont eu lieu en Autriche, et dont l'effet se combine avec la crise entre l'Espagne et la Catalogne, la probabilité d'un Brexit « dur », ou encore les référendums sur l'autonomie de deux régions italiennes. C'est dans ce contexte que Jean-Luc Mélenchon a fait, le 23 octobre, une déclaration pour le moins étonnante, mais aussi significative, sur la question de l'UE. Il a, dans le cadre d'un débat sur la politique agricole, remis en cause le versement par la France de sommes « nettes » à l'Union Européenne. Cela mérite que l'on s'y arrête.
La contribution française
Si l'on fait le calcul depuis le début des années 2000 et donc depuis l'élargissement de l'Union européenne, on observe que les versements de la France à l'Union européenne n'ont cessé d'augmenter tandis que les retours de l'UE vers la France, ce que l'on a appelé les subventions, sont restés globalement stables. De ce fait, le solde net de la contribution française a largement augmenté pour atteindre environ 8 milliards d'euros depuis 2009. Ainsi, en tenant compte de l'inflation, autrement dit en calculant à « monnaie constante » on s'aperçoit que, au cours des 25 dernières années, les transferts nets de la France à l'Union européenne ont représenté environ 100 milliards d'euros. Cela plaçait la France en troisième position des contributeurs nets au budget européens, derrière l'Allemagne et l'a Grande Bretagne. Avec la sortie de cette dernière de l'UE, la France deviendra le deuxième contributeur net.
L'évolution de Jean-Luc Mélenchon
Est-ce pour cette raison que Jean-Luc Mélenchon s'est décidé à emprunter pour la forme, mais dans un fond absolument différent, la rhétorique de Mme Thatcher: « I want my money back »?
Un problème de cohérence
Car, cette déclaration souligne un problème de cohérence chez Jean-Luc Mélenchon. On ne peut à la fois dire que l'on veut une autre Union européenne et se battre pour que la contribution de la France soit en équilibre avec les subventions.
Mais, si telle est bien la position de Jean-Luc Mélenchon, il doit impérativement la préciser rapidement. Car, la meilleure manière de casser cette UE qui ne fonctionne pas, qui n'a d'ailleurs jamais réellement fonctionnée, c'est de présenter un projet alternatif. Un projet que unissent des nations souveraines et qui ne mettent pas ces nations sous la tutelle de Bruxelles et de Berlin. Le problème est ici politique et non juridique. Il faut encore réaffirmer, à rebours des dispositions de ces 20 dernières années, la supériorité du droit français sur le droit européen, ce qu'a fait l'Allemagne en particulier. Il doit avancer sur la question de l'Euro, car on ne peut vouloir construire une « autre Europe » sur les ruines d'une défunte UE et préserver l'Euro. Et de ce point de vue, il est clair que la revendication voulant ramener l'Euro à parité avec le Dollar, idée que Jean-Luc Mélenchon a défendue, ne règlerait rien. Il suffit de regarder les déséquilibres entre le taux de change réel de l'Allemagne et de la France, déséquilibres qui ont été calculés par la FMI, pour s'en rendre compte.
De la cohérence à la crédibilité
Faute de quoi, sa position actuelle apparaîtra comme incohérente, contradictoire avec d'autres éléments de son discours. Et cette incohérence lui retirera sa crédibilité pour rassembler autour de lui toutes celles et tous ceux qui pensent qu'il faut liquider l'UE pour pouvoir sauver la France et sauver l'Europe, une Europe qui aujourd'hui moins que jamais ne s'identifie ni dans les frontières ni dans l'idéologie de l'UE.
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