Coup de filet mené par la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) et la sous-direction antiterroriste (SDAT), dans le milieu de l'ultra-droite. Une dizaine d'individus âgés de 17 à 25 ont été arrêtés mardi. Ils sont soupçonnés d'avoir fomenté des attentats contre des lieux de culte musulmans et des personnalités politiques telles que Jean-Luc Mélenchon et Christophe Castaner. À la tête de ce groupuscule, Logan Alexandre Nisin, adorateur de Breivik et militant navigant entre l'extrême droite et l'ultra-droite. Il est notamment passé brièvement par le Front national et divers mouvements radicaux comme les Jeunesses nationalistes, le Mouvement populaire nouvelle aurore (MPNA) ou encore l'Action française.
«On peut craindre que des individus agissent de manière isolée. Des gens qui se radicalisent dans leurs actes au point de vouloir de commettre des actes terroristes (…) Dire qu'il y aura une vague, je n'y crois pas trop, car ce sont des cas isolés. Ils ne sont pas structurés et il n'y a pas de structuration comme il peut exister dans un phénomène comme Daesh» analyse Anaïs Voy-Gillis, spécialiste de l'extrême droite européenne.
Selon l'experte, cette radicalisation se nourrit d'une multitude de facteurs tels que la «perte de repères», le «sentiment que la nation est en danger, qu'elle est attaquée, que les valeurs sont remises en cause par les étrangers.» Ces individus peuvent développer la certitude qu'ils sont «le dernier rempart face à la barbarie.» En outre, les actes de terrorismes djihadistes commis en France, qui conditionnent un certain courant d'idées politiques, peuvent également être des facteurs déclencheurs de ces projets d'attentats.
«Aujourd'hui, je vois un catalyseur qui explique que des gens peuvent décider de passer à l'acte. Il y a eu beaucoup d'actes terroristes qui ont touché le sol français depuis 2015. Le leitmotiv que l'on retrouve dans le discours d'extrême droite, c'est la théorie du grand remplacement, qui est un grand classique de l'extrême droite.»
Anaïs Voy-Gillis souligne que des facteurs socio-économiques peuvent entrer en ligne de compte.
«Il y avait des cibles qui étaient des mosquées, mais aussi une cible qui est les gens qui incarnent l'élite politique. Une élite qui est vu comme corrompue, multiculturaliste, qui va à l'encontre du discours prôné par ces gens et qui est finalement la cause des dérangements, donc on peut la cibler.»
Dans une interview de Patrick Calvar accordée à Marianne en 2016, l'ex-patron de la DGSI (direction générale de la sécurité intérieure) expliquait qu'il redoutait une confrontation entre l'ultra-droite et le monde musulman. Le risque d'une sorte de «guerre civile» est-il envisageable? Pour Anaïs Voy-Gillis, cela est peu probable.
«Contrairement aux rixes que l'on peut avoir entre extrême gauche et extrême droite dans la rue, parce qu'il y avait des lieux où ils pouvaient se croiser, je pense que les lieux de confrontation entre les djihadistes et les militants d'extrême droite existent moins, car ce sont des gens qui restent chacun de leur côté.»
Pour l'experte, le risque se situe dans l'amalgame qui pourrait conduire certains individus à viser une catégorie de la population en particulier.
«Le risque avec cet amalgame, c'est que certaines personnes veuillent s'en prendre à des musulmans qui se rendent tranquillement à la prière, estimant que ces gens sont, finalement, des djihadistes en puissance. La confrontation peut être là.»