Dans un article publié par le huffingtonpost.de, le journaliste et politologue Alexander Rahr constate que l'Europe, et en premier lieu l'Allemagne, est devenue un otage de la politique américaine et risque de perdre complètement son indépendance.
«Dieu merci que l'hystérie américaine à propos de l'ingérence russe dans les élections occidentales n'ait pas concerné les élections au Bundestag», écrit-il.
La majorité des Allemands se prononce pour une normalisation des rapports avec la Russie, rejetant l'image d'un ennemi qui lui a été imposée par certains hommes politiques lors de la campagne électorale.
Alexander Rahr signale que la situation évolue sur fond de reprise économique en Russie. Le budget national a été consolidé, l'inflation est faible, les réserves de change ont atteint le niveau d'avant la crise. Le Kremlin envoie des signaux positifs. Et les sociétés allemandes seront aux premiers rangs quand les autorités russes engageront leurs projets de privatisation. L'impatience se manifeste non seulement par le monde des affaires allemand, mais aussi autrichien et turc.
Les autorités allemandes s'opposent au durcissement des sanctions antirusses affirmant qu'il est contraire aux intérêts européens dans le domaine de l'approvisionnement en énergie, mais en attendant, Berlin est seul à mener cette bataille. Les autres pays de l'UE, en premier lieu la France, gardent le silence, tandis que certains pays d'Europe centrale soutiennent les mesures des États-Unis contre la Russie. Alexander Rahr reconnaît qu'on aura du mal à se débarrasser des sanctions américaines qui resteront suspendues, telles une épée de Damoclès, au-dessus des relations économiques entre la Russie et l'Europe. Les sanctions américaines resteront en vigueur même quand l'UE lèvera les siennes.
«L'Europe, en premier lieu l'Allemagne, est devenue un otage de la nouvelle guerre économique menée par les États-Unis contre la Russie. Malheureusement, au cours de ces deux dernières années, l'Allemagne et la France ne sont pas parvenues à remporter des succès dans le processus de Minsk. Au lieu d'assumer le rôle de médiateurs véritables, Berlin et Paris ont fait valoir exceptionnellement les intérêts pro-ukrainiens. On le comprend du point de vue moral, mais du point de vue de la politique réelle, c'est une erreur», écrit M. Rahr.
L'Allemagne et la France sont désormais fortement menacées d'être supplantées par les États-Unis dans le règlement de la crise ukrainienne. Emmanuel Macron n'a plus de temps pour la politique étrangère. Il est concentré sur les problèmes intérieurs. Le même problème se pose à Angela Merkel. Loin de remporter une victoire grandiose qui l'aurait dotée de pouvoirs illimités, la plaçant à la tête de l'Europe et, peut-être, du reste de l'Occident, elle est obligée de lutter pour son existence politique et risque même de perdre son poste si les divergences politiques entre les partis empêchent de créer la soi-disant coalition Jamaïque.
Selon Alexander Rahr, Angela Merkel ne doit pas confier aux États-Unis le règlement de la crise ukrainienne. Dans ce cas de figure, l'UE perdra définitivement son indépendance en matière de politique extérieure et de sécurité.