Coup d'envoi de la 72e Assemblée générale des Nations unies, ce mardi, à New York. Emmanuel Macron, à la tête de la délégation française, est arrivé hier pour trois jours de marathon diplomatique. Le Président, comme son homologue américain, doivent effectuer leur première intervention face aux représentants des 193 pays membres de l'ONU. Des discours «très attendus» pour reprendre la presse française, bien que celui de Donald Trump soit également «redouté» par nos confrères.
Seulement, voilà, si la France a finalement signé la déclaration politique non contraignante des américains- jusque-là cosignée par 130 pays- au tout dernier moment, Washington n'avait pas convié Paris à la conception de ce projet, contrairement à d'autres capitales européennes comme Londres ou Berlin. N'appréciant guère les formes de cette initiative, le Quai d'Orsay s'était contenté de déclarer prendre «connaissance avec intérêt» des propositions américaines, avant de s'y rallier au tout dernier moment.
Le climat, un thème sur lequel Emmanuel Macron est visiblement attendu par la presse française qui ne manque par ailleurs pas d'étriller la réforme portée par Trump. Nombreux sont les titres mettant en avant le côté «vague» et «controversé» de la proposition américaine, ou que tout ceci s'effectue «sous pression» de Washington.
Principal reproche fait à Donald Trump, sa volonté de couper dans la contribution américaine au budget de l'ONU. Une décision qui aurait, bien évidemment, une incidence sur le fonctionnement de l'organisation internationale et tout particulièrement des opérations de maintien de la paix, même si la principale conséquence mise en avant par la presse concerne le fonctionnement du Haut-Commissariat aux Réfugiés (HCR). Celui-ci est financé à 40% par les États-Unis et, selon certains diplomates, il pourrait ne plus fonctionner du tout si Washington décidait de diviser par deux sa participation budgétaire.
Un point qui fait grincer des dents, tant le secrétaire général de l'ONU, le portugais Antonio Gutérrez, que les autres pays-membres, car les Nations Unies peuvent difficilement se passer des dollars des Américains. En effet, suivant la complexe méthode de calcul des participations nationales, environ ¼ du budget de l'ONU est réglé par l'Oncle Sam, pour 12,7 milliards de dollars tout de même.
Les États-Unis ont donc à cet égard plus que les moyens de jouer sur la corde sensible et Donald Trump ne va certainement pas s'en priver. Néanmoins, sur ce point le Général (2 s) Dominique Trinquand tient à se montrer rassurant, estimant que la proposition américaine est encore bien loin de se concrétiser, qui plus est dans le cadre de l'ONU: «Nous européens, nous connaissons déjà les difficultés de travailler à 28, alors je vous laisse imaginer les difficultés de travailler à 193.»
Fin juin, lors du vote du dernier budget, les États-Unis avaient déjà obtenu une réduction des fonds alloués aux opérations de maintien de la paix. Une réduction de l'ordre de 600 millions de dollars, principalement sur des missions au Soudan et à Haïti, précise le Général Trinquand. Une coupe franche lourde de conséquences pour le fonctionnement de l'ONU, d'autant plus qu'aucune règle de compensation n'est de mise: une baisse dans les contributions américaines se traduit automatiquement par une coupe dans les opérations. Néanmoins, comme le souligne notre expert, certains acteurs en croissance économique émergent peu à peu dans le top 3 des contributeurs, comme la Chine qui vient de supplanter le Japon à la deuxième place. Il tient également à souligner la participation au budget des Nations unies de sociétés privées américaines.
«En fait, ils se sont retrouvés pris à leur propre piège, parce qu'en diminuant le budget des opérations de la paix d'une part et par ailleurs en votant les résolutions permettant les opérations de maintien de la paix, on se retrouve face à une contradiction qu'il est difficile de résoudre.»
Au-delà du discours du Président américain- qu'il estime également «très généraliste»- ce fin connaisseur de l'ONU pointe du doigt une certaine contradiction dans le discours américain à l'encontre de l'organisation internationale.
«Les États-Unis ne peuvent pas d'une part prétendre être l'un des leaders du monde et d'autre part ne pas contribuer à l'enceinte dans lequel le monde s'exprime.»
En témoigne l'engouement médiatique français pour Nikki Haley, ambassadrice américaine à l'ONU. Pressenti pour remplacer Rex Tillerson au département d'État d'ici la fin de l'année, le Figaro louait sa maîtrise de «l'art subtil de la diplomatie». C'est sans doute en référence à ses avertissements à l'Iran et à la Corée du nord, l'un étant menacé de devenir «la prochaine Corée du Nord» et l'autre d'être détruite si les USA avaient à se défendre.
Relevons à la décharge de l'ambassadrice que les Nord-Coréens n'y sont pas allés avec le dos de la cuillère en la qualifiant dans un communiqué de «prostituée politique» adoptant une «attitude hystérique».
Difficile de distinguer quel côté manie la diplomatie avec le plus de subtilité, mais quoi qu'il en soit cette assemblée générale de l'ONU nous promet décidément bien des surprises.