Il n'a pas mâché ses mots: le chef d'état-major des armées a laissé éclater sa colère devant la cinquantaine de députés réunis mercredi au sein de la commission de la Défense de l'Assemblée nationale. Face aux coupes budgétaires, Pierre de Villiers ne se laissera pas «baiser» par Bercy. Comment gérer l'écart entre les missions demandées et la réduction des crédits de 850 millions d'euros en 2017? Des députés volent au secours des militaires, après plusieurs jours de polémique, et devraient faire de nouvelles propositions dès lundi.
«La situation est grave. Parce qu'évidemment, 850 millions d'euros en moins, il va falloir que les chefs d'état-major fassent des choix: moins d'équipement, des matériels qui viendront plus tard, des difficultés pour payer un certain nombre d'opérations à l'extérieur. Tout ça a des conséquences extrêmement importantes et qui en plus ont un effet sur la sécurité de notre pays», s'insurge le général Bertrand Soubelet, ancien numéro trois de la gendarmerie nationale.
Jusqu'à présent, le surcoût des opérations extérieures était réparti entre les autres ministères, au nom de l'effort collectif de défense. La proposition de Bercy est déconnectée de la réalité, selon le général, d'autant plus qu'Emmanuel Macron n'a cessé de répéter l'objectif d'un budget de défense à 50 milliards d'euros en 2025 (soit 2% du PIB), soit une augmentation de 17,3 milliards d'euros en huit ans:
«La différence entre un politique et un chef militaire, c'est que lui est responsable de la vie de ses hommes. S'il pousse un coup de gueule, c'est parce qu'à des milliers de kilomètres des gens sur le terrain risquent leur vie pour faire en sorte que les engagements de la France dans le monde soient respectés et que la sécurité des Français sur le territoire nationale soit assurée», explique Bertrand Soubelet.
Le président du Sénat, Gérard Larcher est également monté au créneau en évoquant des coupes qui risquent de compromettre les missions des armées. Le général de Villiers insiste sur la difficulté de se battre sans moyens, rappelant les trois nouveaux blessés récemment ramenés en France.
«Là, il s'agit de taper dans la soldes des gars, la soldes futures des hommes et des femmes sur le territoire extérieur. Il s'agit de taper sur leur matériel, et ça, on ne peut pas se le permettre dans les circonstances actuelles, avec une crise, une pression au terrorisme, avec des crises qui vont être de plus en plus violentes. Nous ne pouvons pas faire d'économies de ce côté-là», estime-t-il.
Le président n'a cessé de répéter l'objectif d'un budget de défense à 50 milliards d'euros en 2025 (soit 2% du PIB), ce qui représente une augmentation de 17,3 milliards d'euros en huit ans… Pour le député Philippe Michel-Kleisbauer, cet objectif reste atteignable.
«Mon engagement est d'apporter des propositions qui nous permettront de ne pas toucher à cet enveloppe des 850 millions d'euros. Le programme du 2% du PIB à l'horizon de 2025 va être respecté. Les débats aujourd'hui à l'Assemblée nationale, sur la réforme du code du travail, la loi de la modernisation de la vie économique, y contribuent», conclut le député.
Le président Emmanuel Macron qui s'est rendu dans la soirée de jeudi 13 juillet au ministère de la Défense était formel à ce sujet.
« Je considère pour ma part qu'il n'est pas digne d'étaler des débats sur la place publique. J'ai pris des engagements, je suis votre chef. Les engagements que je prends devant les concitoyens, devant les armées, je sais les tenir et je n'ai à cet égard besoin de nulle pression, de nul commentaire », a-t-il lancé.