La chaîne ARD diffuse de nouveaux fakes sur les préparatifs de la Coupe du Monde en Russie

© AP Photo / Daniel MaurerEine Fernsehkamera des Ersten Deutschen Fernsehens, ARD
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La chaîne allemande ARD, qui avait tourné l'an dernier plusieurs reportages sulfureux sur le dopage dans le sport russe, a diffusé une nouvelle "info sensationnelle". Le film Poutine, répétition générale: la Russie, la FIFA et la Coupe des Confédérations s'attarde sur les grandes compétitions de football qui se dérouleront prochainement en Russie.

Cette fois, les auteurs s'intéressent aux violations des droits des travailleurs sur les sites de construction des stades et affirment que certains sont érigés par des "esclaves de Corée du Nord".

Retour au thème des supporters violents

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La chaîne allemande ARD est visiblement jalouse de la gloire de la BBC et The Mirror, deux médias britanniques qui ont publié de grands reportages sur les excès des supporters russes à l'approche du début de la Coupe des Confédérations et de la Coupe du Monde. Cependant, les combats du Mardi gras n'ont pas semblé suffisants aux Allemands qui ont décidé de creuser plus profondément un sujet complètement différent: l'oppression des ouvriers qui construisent les stades en Russie.

La chaîne allemande n'est pas la seule à s'être intéressée à ce thème: le journal britannique The Guardian avait publié la veille un article sur le même sujet. On y apprenait que le président de la FIFA Gianni Infantino avait personnellement reconnu la violation des droits des travailleurs construisant le stade Krestovski de Saint-Pétersbourg — même si le haut fonctionnaire n'a jamais rien dit de tel. Apparemment, les hooligans russes ne bouleversent plus la conscience des Européens.

Tout a commencé par une lettre envoyée par les chefs des fédérations suédoise, danoise, norvégienne et islandaise au nom d'un avocat suisse. Ils ont demandé au dirigeant de la FIFA de s'occuper du problème de l'oppression des droits des travailleurs nord-coréens construisant le stade de Saint-Pétersbourg, sans apporter la moindre preuve pour appuyer leurs suppositions.

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Le vice-premier ministre russe Vitali Moutko a délicatement insinué que cette information était fausse car tout l'argent dû pour les travaux accomplis avait été versé sans retard. "Tout le monde a été payé. Tout était conforme aux exigences de la FIFA. Nous avons mis en place un suivi des conditions de travail, qui est constamment publié. Aucune question ne s'est jamais posée. Dans notre pays la loi du travail est rigoureuse", a-t-il expliqué.

Toutefois, aussi étrange que cela puisse paraître, le reportage a tout de même commencé par un focus sur les supporters. Les téléspectateurs ont ainsi revu les fameuses images du "massacre de Marseille" pendant l'Euro 2016, sur lesquelles la voix off soulignait que la bagarre avait été initiée par les "hooligans russes" et que, suite à l'échauffourée, deux Britanniques étaient tombés dans le coma et avaient été hospitalisés. Par contre, si les journalistes britanniques avaient obtenu des réponses provocantes face caméra, ARD n'a pas réussi à capter les mêmes images.

Les Allemands ont posé quelques questions à l'ex-président de l'Association des supporters russes Alexandre Chpryguine, qualifié de "visage des émeutes", mais ce dernier n'a rien dit d'intéressant: "Seule la police française est responsable de ce qui s'est produit dans le sud de la France, et cela ne pourrait pas se produire en Russie car une préparation est en cours au niveau gouvernemental pour la Coupe des Confédérations 2017 et la Coupe du Monde 2018".

Un ouvrier qui n'exprime pas son mécontentement

En présentant, pour apporter un peu de piquant, d'autres images avec des bagarres de supporters russes, visiblement empruntées à la BBC, ARD passe à un thème plus frais. Si auparavant les journalistes allemands se focalisaient sur le dopage, cette fois ils ont décidé de critiquer la Russie sous prétexte qu'elle opprimerait les travailleurs. Ils se sont rendus sur le site de construction du stade de Rostov-sur-le-Don, où ils ont interviewé un ouvrier immigré, Sacha, qui a reconnu que les travailleurs n'étaient pas payés depuis cinq mois.

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Tout en racontant son histoire poignante, Sacha montrait les images d'une "grève" des ouvriers qui ressemblait davantage à une simple conversation pendant une pause-cigarette. Les représentants de la chaîne ont tenté de contacter la compagnie du constructeur mais en vain, et quelques jours plus tard les Allemands ont appris que les migrants avaient reçu tous les retards de salaire.

Cela n'a pas semblé suffisant aux journalistes. Se référant à la presse norvégienne, ARD a affirmé que la construction du stade Krestovski de Saint-Pétersbourg se déroulait avec la participation de travailleurs nord-coréens qui vivraient dans des conditions inhumaines et devraient reverser une grande part de leurs revenus aux autorités de leur pays. Une fois de plus les journalistes n'ont pas apporté de preuves.

En revanche, devant le stade Loujniki de Moscou, les journalistes ont rencontré un groupe de travailleurs coréens dont l'un a confié venir de Corée du Nord et travailler en Russie depuis trois semaines. Il n'a mentionné aucun retard de salaire ou tout autre problème. Bien évidemment, le visage du seul travailleur à avoir communiqué avec la presse a été minutieusement caché et il est donc impossible d'identifier son origine.

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Il est aberrant de présenter cet aveu comme un scoop, qui plus est après les commentaires de la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères Maria Zakharova pendant sa conférence de presse jeudi dernier.

"En ce qui concerne les conditions d'embauche et de séjour des travailleurs nord-coréens, dont il était question dans les documents envoyés à différentes structures internationales tellement "préoccupées" par les droits de l'homme, elles sont réglementées par la loi du travail et de migration, à l'application desquelles veillent les autorités russes compétentes chargées de la migration. Il y a donc des personnes qui veillent au respect des droits des travailleurs en Russie", a-t-elle déclaré.

Maria Zakharova a répété que la Russie était prête à organiser des briefings avec la participation des organisateurs de la Coupe du Monde de football pour leur faire visiter les sites des futurs matchs. "Tout ce que vous voudrez. Simplement, cessez d'écrire des aberrations. Nous sommes prêts à présenter toutes les informations nécessaires", a ajouté la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères.

L'interview manquée

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C'est comme ça qu'on donne des interviews aux journalistes russes (vidéo)
Le film aurait pu s'arrêter là mais les journalistes allemands avaient besoin de remplir une demi-heure de temps d'antenne et ils se sont donc rendus au congrès de la FIFA à Bahreïn, où ils ont tenté une nouvelle fois de poser plusieurs questions au président de la fédération Gianni Infantino sur le respect des droits des travailleurs en Russie. Cette tentative a échoué. Peu de temps avant la diffusion il aurait été proposé aux journalistes de rencontrer la secrétaire générale de la FIFA Fatma Samoura, mais les spectateurs n'ont pas vu cette interview car la proposition aurait été faite "trop peu de temps" avant la diffusion.

Cette "investigation sulfureuse" se termine par les images du match d'ouverture au stade Krestovski où les journalistes ont découvert de nombreuses lacunes, comme le toit "qui ne s'est pas ouvert". Apparemment, les visiteurs n'ont pas compris qu'il avait été spécialement fermé pour protéger les spectateurs du vent glacial qui soufflait ce jour-là.

Les journalistes n'ont pas omis de mentionner que seulement 20 000 spectateurs avaient été admis à assister à la rencontre parce que le niveau supérieur des tribunes n'était pas prêt à accueillir les supporters. Ils n'étaient visiblement pas au courant des directives de la FIFA qui préconisent de mettre en service les stades en augmentant progressivement le nombre de visiteurs afin de vérifier le fonctionnement de tous les systèmes. Le seul problème que les Allemands ont mentionné à juste titre concerne la qualité de la pelouse, qui laisse encore à désirer. Toutefois, au moment de la diffusion de ce reportage cette question n'était déjà plus d'actualité.

L'ARD et ses attaques sur le dopage

Ce "documentaire" est loin d'être le premier film de la chaîne ARD sur l'état prétendument déplorable du sport russe. Début décembre 2014, elle avait sorti un reportage parlant du "dopage omniprésent" dans l'athlétisme russe, dont les principaux protagonistes étaient Vitali Stepanov, ancien collaborateur de l'Agence russe antidopage (Rusada), et son épouse Ioulia qui avait été disqualifiée à long terme pour usage de produits interdits. Après la sortie du film, l'entraîneur de longue date de l'équipe de Russie de marche athlétique Viktor Tcheguine a perdu son poste. De nombreuses célébrités de cette équipe ont été écartées des pistes, notamment les champions olympiques de 2012 Sergueï Kirdiapkine et Olga Kaniskina.

Les informations fournies par le couple Stepanov ont suscité l'intérêt de l'Agence mondiale antidopage (AMA), qui a créé une commission dirigée par le professeur Richard McLaren pour enquêter sur les épisodes mentionnés dans le film. L'AMA a finalement statué qu'une "culture du dopage" s'était établie dans le sport russe et que l'usage de produits interdits dans le pays était couvert par les fonctionnaires sportifs. A la même époque, certains ont déclaré que Rusada aurait remplacé les échantillons pendant les JO 2014 de Sotchi avec l'aide des agents du Service fédéral de sécurité (FSB).

En novembre 2015, la Fédération russe a été exclue pour une durée indéterminée de la Fédération internationale d'athlétisme (IAAD), et l'AMA a retiré son accréditation à Rusada.

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Hajo Seppelt, pour sa part, a continué de diffuser des films sur le sport russe même s'ils n'ont pas rencontré le succès du premier. Il n'y mentionnait que des faits antérieurs, faute d'avoir pu trouver des preuves récentes de la culpabilité des athlètes russes.

Le dernier reportage de Seppelt diffusé en janvier s'appuie sur le témoignage d'un nouvel informateur, le coureur Andreï Dmitriev, qui a déclaré que certains entraîneurs écartés du sport professionnel continuaient de travailler avec des athlètes de l'équipe de Russie. En particulier, Andreï Dmitriev a mentionné le nom de Vladimir Kazarine — disqualifié à vie par l'AMA.

"Cette situation est exagérée par monsieur Dmitriev. Après la décision de l'IAAF nous avons coupé tous les financements à Kazarine — les cotisations d'entraînement, les salaires, etc. Il a pris son argent et est parti où bon lui semblait. Il aurait pu partir avec l'équipe des USA sur un stade pour s'entraîner, payer une location et travailler avec n'importe qui", a répondu le président de la Fédération russe d'athlétisme Dmitri Chliakhtine.

Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur de l'article repris d'un média russe et traduit dans son intégralité en français.

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