40 M EUR plus tard, le programme français de déradicalisation se solde par un échec

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Le programme français visant à rééduquer les jeunes radicaux, qui a reçu un financement de 40 millions d’euros en 2016, s’est soldé par un échec, d’après un rapport rédigé par deux sénatrices, Esther Benbassa et Catherine Troendlé.

Le projet coûteux de déradicalisation des jeunes lancé par le gouvernement français en mai 2016 est « un fiasco total », la plupart des islamistes ne voulant pas être déradicalisés, ressort-il d'un rapport présenté par deux sénatrices, Esther Benbassa et Catherine Troendlé.

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Doté de 40 millions d'euros, le projet prévoyait la création d'une douzaine de centres de prévention, d'insertion et de citoyenneté (CPIC). Chaque centre devait accueillir entre 25 et 30 pensionnaires de moins de 30 ans qui pourraient y apprendre un métier, étudier les valeurs et l'histoire de la France, se professionnaliser et obtenir un suivi individualisé pendant une période de plusieurs mois. Ces centres « ouverts » devaient être fondés sur le volontariat des candidats au djihadisme.

Dounia Bouzar, anthropologue française, fondatrice du Centre de prévention contre les dérives sectaires liées à l'islam, qui a renoncé à sa collaboration avec le gouvernement français en février 2016, critique l'idée du gouvernement de fonder les centres de réinsertion sur le volontariat des djihadistes potentiels.

« Pourquoi me dit-on que les jeunes doivent être volontaires pour aller dans le centre de déradicalisation ? Mais vous connaissez un seul radicalisé qui est volontaire pour se déradicaliser ? Ça n'existe pas », a noté Mme Bouzar à Sputnik.

Selon les données officielles, la France compte environ 8 250 islamistes radicaux. Début septembre 2016, le Premier ministre français de l'époque Manuel Valls a annoncé que 900 Français souhaitaient se rendre en Irak et en Syrie pour y mener le djihad.

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Toutefois, seuls neuf de ces personnes « en voie de radicalisation » ont accepté d'aller au premier centre du genre aménagé dans le château de Pontourny, qui a ouvert à la mi-septembre 2016 à Pontourny, à Beaumont-en-Véron (Indre-et-Loir), non loin de Chinon. Pas un seul résident n'a suivi le programme complet à Pontourny sur dix mois. Pourtant, le centre emploie toujours 27 personnes — éducateurs, professeurs, psychologues et cuisiniers. Son fonctionnement exige 2,5 millions d'euros par an.

Mme Bouzar se demande en outre pourquoi les centres de déradicalisation créés par le gouvernement pour les jeunes majeurs sont des centres ouverts et non fermés, tout en insistant sur le fait qu'il s'agit de centres fermés avec des éducateurs et non de prisons, qui ne feront que compliquer la situation.

Le dernier résident du centre de Pontourny, Mustafa Savas, 24 ans, a obtenu en janvier dernier une permission de sortie avant d'être placé en garde à vue dans le cadre d'une opération antiterroriste dans le Bas-Rhin. Mustafa Savas était lié avec la filière djihadiste de Strasbourg, à laquelle appartenait Foued Mohamed-Aggad, l'un des kamikazes du Bataclan, en novembre 2015.

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Selon Julien Revial, un ancien employé de la Maison de la Prévention et de la Famille, une cellule de déradicalisation en Seine-Saint-Denis fermée en septembre 2016, de telles cellules ne sont qu'une vitrine médiatique dont s'est servi le gouvernement pour rassurer la population après les attentats en France. Il a déploré l'inconsistance des moyens publics versés à la déradicalisation par rapport à la médiatisation de la cellule. Excepté le ministère de l'Intérieur, « personne parmi les ministères ne se sentait préoccupé et concerné par ces questions », a-t-il confié à Sputnik.

La structure de Seine-Saint-Denis a aussi été un fiasco : promesses publiques jamais tenues, salaires rarement payés, exagération du nombre de radicalisés traités par la cellule et manipulation des familles de jeunes radicalisés.

Nadia Remadna, présidente de la Brigade des Mères qui a eu affaire à la cellule de déradicalisation en Seine-Saint-Denis, ne pense pas « que ce soit des centres de déradicalisation qu'il faut mettre en place mais travailler avec les écoles à partir de la primaire et faire un vrai travail de terrain ».

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