En effet deux scandales viennent d'éclabousser simultanément deux des candidats déclarés à l'élection présidentielle, M. François Fillon et M. Emmanuel Macron. Ces scandales touchent à l'argent, sujet extrêmement sensible en France. Au-delà de la réalité de certains faits, réalité qui reste à établir, le scandale véritable porte en effet sur le rapport à l'argent de ces deux hommes politiques. L'un, François Fillon, fait campagne sur sa probité personnelle mais aussi sur sa volonté d'imposer une terrible politique de rigueur aux français. L'autre, Emmanuel Macron, se construit, par petites touches, un personnage de bon gestionnaire des fonds publiques, d'homme nouveau, voire — il le prétend dans ses discours — d'extérieur au « système ». En fait, c'est tut le discours tenu par ces deux candidats qui apparaît ainsi brutalement dévalorisé par les révélations de ces scandales.
Ce que l'on sait
Ô ministres intègres!
Conseillers vertueux
Il est très probable que dans les deux cas rien ne soit légalement reprochable tant à M. Fillon qu'à M. Macron. Mais, le problème moral reste entier. Il devient même un problème particulier en raison de la campagne que mène actuellement ces deux hommes et de la manière dont ils entendent, l'un et l'autre construire leur image.
Quant à Emmanuel Macron, ce candidat qui aime bien arguer de sa jeunesse et de sa prétendue pureté face au monde politique, le voici ramener à la réalité des faits. Il est un pur produit du « système » qu'il aime bien vilipender. Il fut banquier d'affaires, et des affaires il en a gardé visiblement le gout. Il a usé et abusé des avantages du pouvoir, que se soit comme conseiller de François Hollande puis plus tard comme Ministre. Pour lui, l'argent, les moyens matériels sont un dû. Et c'est le même homme qui, après avoir mis la main à la funeste « loi travail », après avoir prétendu lutter contre le chômage à coup d'autocars (à propos, combien de faillites aujourd'hui… ?), prépare l'ubérisation de la société française. Car, son projet économique n'est autre que celui de transformer la société française en société de service, grand rêve de la haute bourgeoisie qui depuis deux siècles ne cesse de se lamenter de ne plus être servie. Oui, à M. Fillon comme à M. Macron on a envie d'emprunter la plume de Victor Hugo et de dire, comme dans Ruy Blas :
« Bon appétit, messieurs!, (…)
Ô ministres intègres!
Conseillers vertueux!
Voilà votre façon
De servir, serviteurs qui pillez la maison!
Donc vous n'avez pas honte et vous choisissez l'heure,
L'heure sombre où l'Espagne agonisante pleure!
Donc vous n'avez ici pas d'autres intérêts
Que remplir votre poche et vous enfuir après!
Soyez flétris, devant votre pays qui tombe
Fossoyeurs qui venez le voler dans sa tombe! ».
Légitimité et souveraineté
Ces deux affaires sont symptomatiques de l'état de déliquescence moral de l'élite politique, ce que l'on appelle « l'establishment » dans notre pays. Elles appellent des réponses exemplaires, non tant point sur le plan pénal, car il y a fort à parier que la justice conclura que ces pratiques étaient légales, mais du point de vue de la légitimité du pouvoir. Elles pourraient avoir des conséquences considérables sur le résultat de l'élection présidentielle.
Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur.