La France est-elle en voie de Trumpisation ?

© AFP 2024 JIM WATSONTrump supporter Kraig Moss sings in front of a large painting by artist Julian Raven during a Truckers for Trump convoy event for Republican Presidential Candidate Donald Trump in Des Moines, Iowa, January 28, 2016, ahead of the Iowa Caucus. With five days to go before the first vote in the US presidential nominations process in Iowa, Republican frontrunner Donald Trump is dominating the airwaves.
Trump supporter Kraig Moss sings in front of a large painting by artist Julian Raven during a Truckers for Trump convoy event for Republican Presidential Candidate Donald Trump in Des Moines, Iowa, January 28, 2016, ahead of the Iowa Caucus. With five days to go before the first vote in the US presidential nominations process in Iowa, Republican frontrunner Donald Trump is dominating the airwaves. - Sputnik Afrique
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« Un libéralisme économique assumé » conjugué à une « moindre ouverture au monde ». Faisant écho au dernier baromètre d’OpinionWay pour Sciences Po, le constat semble clair pour Les Échos : les français ne seraient « pas imperméables aux idées du nouveau président américain ». Le « Trumpisme » nous menace-t-il ?

Les Échos publient en exclusivité une analyse du dernier baromètre de la confiance politique réalisé par OpinionWay pour le Cevipof (le centre de recherches politique de Sciences Po). Des résultats que le politologue Pascal Perrineau, ancien directeur du Cevipof met en parallèle avec une étude similaire effectuée par l'institut de sondage en 2009. Il souligne un inversement de tendance au cours de ces 7 années.

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Si en 2009 une majorité de Français étaient partisans d'une ouverture du pays au « monde tel qu'il est », aujourd'hui c'est plus de protection qui est demandée. Selon l'étude, 43 % des 2 000 personnes interrogées estiment que la France doit « se protéger davantage du monde d'aujourd'hui », 4 points de plus par rapport à décembre 2015. Parallèlement, 63 % des interrogés estiment que l'état devrait faire « confiance aux entreprises et leur donne plus de liberté » pour faire face aux difficultés économiques, en progression de 3 points, transfuges de ceux qui plaide pour plus de contrôle et de réglementation (34 %).

Si l'article souligne que plus que 41 % de Français souhaiteraient « réformer en profondeur » le capitalisme, soit 4 points de moins, les partisans de la réforme « sur quelques points » prend 5 points et devient majoritaire avec 51 %. On relèvera d'autre part que 42 % des interrogés jugent qu'appartenir à l'Union européenne est « une bonne chose », une tendance en augmentation (+1 point) contre 24 % jugeant qu'il s'agit d'« une mauvaise chose ».

En somme, le message est le suivant: plus de libéralisme mêlé à plus de protectionnisme, ce qui peut apparaître comme un paradoxe. Un paradoxe que les journalistes des Échos ne sont pas les seuls à relever, c'est le cas également du philosophe, politologue et écrivain Alain de Benoist, qui sort cette semaine son 103e livre aux éditions Pierre — Guillaume de Roux: Le Moment populiste — Droite-gauche, c'est fini.

« Je ne vois pas comment on peut concilier les deux, le principe même de l'idéologie libérale reposant sur le libre-échange et la libre circulation des hommes et des capitaux, c'est-à-dire l'ouverture des frontières. »

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Quoi qu'il en soit, cette demande de plus de protectionnisme doublée d'une libéralisation du marché du travail peut s'expliquer par une vision peu optimiste que les Français partagent, dans une large majorité, pour leurs enfants: 60 % estiment que la situation économique s'est dégradée, contre 11 % qui estiment le contraire. 64 % estiment par ailleurs que les jeunes d'aujourd'hui ont « moins de chances » de réussir que leurs parents. 60 % des personnes interrogées estiment que leurs enfants vivront « moins bien » dans la société française de demain, contre seulement 6 % « mieux ».

Mais si le quotidien français fait alors un rapprochement entre ces craintes et aspirations des Français exprimées dans cette étude avec les ingrédients de la victoire électorale de Donald Trump aux États-Unis, Alain de Benoist juge le parallèle « étrange»:

« Je ne suis pas sûr que les Français soient très bien informés de la politique qu'entend suivre Donald Trump, les Américains eux-mêmes se posent beaucoup de questions et pour le moment il me parait trop tôt pour savoir dans quelle direction il va se diriger. »

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Trumpisme, un « terme extrêmement équivoque » juge Alain de Benoist, qui tient à y distinguer plusieurs dimensions: en premier lieu, le personnage qu'est Donald Trump, en deuxième lieu, le Trumpisme en tant que politique — l'auteur tenant d'ailleurs à rappeler les incertitudes qui demeurent aujourd'hui et qui empêche donc de la définir. Enfin, en troisième lieu, l'aspect qu'Alain de Benoist estime justement être « le plus intéressant », le « plus exportable »: le phénomène Trump.

« Le phénomène Trump ne doit pas être confondu avec le personnage Trump, c'est si vrai qu'à certains égards le phénomène Trump ressemble beaucoup au phénomène Bernie Sanders chez les Démocrates, c'est-à-dire une vague qu'on appelle communément populiste, qui est en fait une vaste vague de mécontentement, de mauvaise humeur vis-à-vis des élites politiques, économiques et médiatiques de ceux qui se considèrent comme en bas par rapport à "l'en haut" de ces élites, c'est au fond la définition même du populisme tel qu'on peut le voir se développer dans tous les pays d'Europe. »

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Le « Trumpisme » ne serait-il pas devenu simplement un nouveau qualificatif peu gratifiant, dans la rhétorique médiatique, afin d'affubler les idées que l'on qualifie communément de « populistes »? Pour Alain de Benoist, les choses ne sont pas si simples. Pour lui, le « Trumpisme » demeure avant tout un « effet de mode ».

Expert des mouvements populistes, qu'il estime être « mal étudiés » et « mal définis », il tient à souligner que ces derniers sont des mouvements très différents malgré un certain nombre de trains communs. Mais dans le cas de Donald Trump, Alain de Benoist tient à rappeler que « la scène politique française — ou européenne — et la scène politique américaines sont extrêmement différentes » un fossé, qui sépare les scènes politiques des deux côtés de l'Atlantique, qui rend « très difficile » à ses yeux la possibilité qu'un Trumpisme, en tant que tel, puisse être exporté en Europe.

« Je crois qu'il est un cas tout à fait à part, vous ne pouvez pas amalgamer Trump avec… je ne sais pas, Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon, Viktor Orban ou que sais-je. Qu'un mouvement populiste, qui est incontestablement tel, arrive à porter au pouvoir un personnage du type de Trump est déjà quelque chose d'assez exceptionnel, d'assez étrange et peu compréhensible pour les Européens. »

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Le Trumpisme, un épiphénomène politique plus qu'un populisme en somme? En tout cas, l'amalgame entre le programme du président-élu américain et les aspirations des Français semble bien hâtif.
Osons notre propre analyse:

Quand les Français réclament à être mieux protégés de la mondialisation et sont pourtant majoritairement favorables à l'Union européenne, n'expriment-ils pas le souhait que l'UE revienne à ses fondamentaux, une zone économique puissante, qui protège tous ses acteurs — entreprises et individus — face à ses rivaux au niveau planétaire?

Et quand ils souhaitent plus de liberté pour les entreprises, n'est-ce pas dans leur esprit plus d'opportunités d'emplois dans un pays en crise?

Bref, vu sous cet angle particulier, le supposé Trumpisme des Français n'a pas l'air si grave…

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