Durant le tournage, elle a arpenté 75 % du pays, visitant des zones sous contrôle gouvernemental ainsi que des zones contrôlées par les rebelles et des zones libérées et a pu s’entretenir avec des membres de l’opposition et des partisans du gouvernement, sans oublier les personnes neutres. Tout ça pour livrer enfin une vision objective de la situation dans un pays meurtri par la guerre.
Lors de sa dernière visite en Syrie avec son équipe de tournage, l’actrice est retournée à Alep pour refilmer une partie des matériaux perdus. Son arrivée a coïncidé avec la libération de la ville.
« À Alep, vous entendez une explosion toutes les 30 secondes. Tout le temps. En venant ici, un étranger se rend compte que six années passées dans de telles conditions ne peuvent pas être appelées une vie décente», raconte-t-elle.
Le documentaire « La voix de la Syrie » de la production bolivienne, montre la guerre « à travers de vraies personnes, des citoyens », estime Carla Ortiz. En Juin 2017, il sortira en même temps en Syrie et en Bolivie.
Selon l’actrice, les pays occidentaux se trompent en estimant que « le Moyen-Orient vit en conflit permanent, que c’est un problème insoluble et qu'il n'y aura jamais de paix. Nous avons oublié que les grandes puissances jouent toujours en fonction de leurs propres intérêts politiques et économiques ».
Elle poursuit: « Dans notre désir désespéré d'apporter de l’aide nous faisons confiance à des militants et des organisations des droits de l’homme, qui prétendent se trouver dans la zone de conflit, et pourtant, ils ne sont pas en mesure de communiquer de manière fiable ce que les Syriens vivent. »
Qu’est-ce l’opposition modérée en réalité?
Contrairement à ce que certains affirment, l’opposition modérée existe, assure Mme Ortiz. Sauf qu’en réalité elle est loin de ceux qu’on regroupe sous cette appellation.
« Ce sont tous ces gens qui, au début du conflit, ont demandé au gouvernement des réformes, et non pas la démission de leur président », explique l’actrice.
Pas un seul représentant des médias « autoritaires »
Carla se demande pourquoi tous ceux qui nous livrent l’information sur le conflit syrien n’ont pas voulu étudier le sujet plus en profondeur et avec objectivité.
« Je me suis retrouvée au beau milieu d’une fusillade, et les médias occidentaux dans les zones de conflit en Syrie, je n’en ai jamais vu », raconte Carla.
Et d’ajouter:
« Même les médias les plus autoritaires qui opèrent dans le pays, je ne les ai jamais vus dans des situations comme celles où je me suis retrouvée. Durant les derniers jours de mon séjour en Syrie, il y avait des membres des deux plus grandes chaînes qui ne sortaient pas de l’hôtel où je vivais ».
« Sur les six fronts où j’ai été et qui englobent Alep-Est, je n’ai vu personne excepté les journalistes de RT. Donc comment peuvent-ils couvrir la guerre pour la libération de la ville ou dire qu’ « Alep est en feu » s’ils ne sont pas sur place? Moi, j’étais là durant les fusillades et je peux vous en parler. Et eux, d’ où tiennent-ils leurs histoires?
Carla explique que les médias occidentaux « mettent l'accent sur le conflit militaire dans lequel apparaissent partout des références à la guerre civile, mais ils oublient de parler de tous ces groupes étrangers qui sont devenus une véritable source de déstabilisation ».
Elle raconte que quand elle est arrivée à Palmyre suite à sa libération de Daech, la cité avait tout d’une ville fantôme. Les gens dans les rues racontaient comment on leur coupait la gorge avec des boîtes de conserve.
Les enfants racontaient aussi leurs histoires à toute l’équipe.
« Nous avons fait beaucoup d'erreurs. Nous nous sommes fiés à des actualités sans vérifier leur sources et on a commencé à les répéter », déplore Mme Ortiz.
« Là-bas j’ai vu des chrétiens qui se liaient d’amitié avec des musulmans et des sunnites, qui sont devenus amis avec des chiites… La seule chose qu’ils veulent c’est la fin de la guerre et qu’on cesse de tuer leurs enfants », conclut-elle.