Le renoncement de François Hollande

© AFP 2024 IAN LANGSDON François Hollande dans la cour de l'Hôtel des Invalides à Paris
François Hollande dans la cour de l'Hôtel des Invalides à Paris - Sputnik Afrique
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François Hollande aura, pour une fois dans sa vie, pris une décision et créé la surprise. Alors que tout laissait penser qu’il annoncerait début décembre sa décision de se représenter, que le plan de cette campagne était déjà établi, il a annoncé le jeudi 1er décembre sa décision de ne pas se représenter.

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Au vu des sondages et de la perte de crédibilité et de légitimité qui le frappe, du risque de disparition pur et simple du parti « socialiste » s'il persistait à vouloir se représenter, cette décision est logique. Cela ne veut pas dire qu'elle ait été évidente. Dans l'allocution qu'a prononcé le Président de la République, on sent une grande tension ; la voix est blanche et le débit heurté. C'est un homme qui doit prendre au plus profond de lui-même qui parle. On le sent, la raison ne va pas dans le sens du cœur. Les deux s'affrontent. Mais, la raison a triomphé. Reconnaissons que c'était la chose la plus intelligente qu'il pouvait faire. C'était sans doute la seule.

Un Président déconsidéré

L'annonce de son renoncement rebat les cartes à « gauche » ; mais c'est un jeu pratiquement sans atouts que les autres prétendants devront désormais jouer. François Hollande laisse derrière lui un paysage dévasté, un P « S » en ruine, tant il est politiquement divisé et à court de projet. Aujourd'hui, la « gauche » de gouvernement est éparpillée.

Sa responsabilité est grande. L'obstination dont il a fait preuve pour imposer la loi « travail », ou loi El Khomri, avec un abus des procédures d'exception (l'article 49.3) n'est pas sans conséquences dans ce désastre. Et, ce n'est pas le seul problème posé par l'action, et parfois l'inaction, de ce Président. La volonté à faire passer une loi sociétale, le fameux « mariage pour tous » que rien n'imposait a aussi profondément divisé les français. Ajoutons y les abandons divers, qu'il s'agisse du renoncement représenté par le TSCG, voté dès l'automne 2012, ou de celui concernant le dossier d'ARCELOR-MITTAL, et mentionnons en passant par les diverses pantalonnades, de l'escapade en scooter à l'affaire Léonarda.

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En renonçant, François Hollande «évite une humiliation»
François Hollande a accumulé les erreurs, que ce soit sur le fond comme dans la forme. Quoi qu'il dise, son bilan est désastreux. Son image ne s'est d'ailleurs pas relevée des errements de sa pratique très personnelle, et très particulière, du pouvoir. Ainsi, ce qu'avait commencé le livre écrit par son ancienne compagne, Valérie Trierweiler, Merci Pour ce Moment, un autre livre l'achève avec les confidences égrenées devant Gérard Davet et David Lhomme dans Un Président ne devrait pas dire ça. L'ouvrage que l'on annonce d'Aquilino Morelle aurait sans doute été l'ultime clou dans son cercueil. Il avait promis une présidence « normale », alors qu'il aurait du dire « simple » ; il nous a offert une présidence oscillant entre le banal et le ridicule, si ce n'était les diverses tragédies qui ont endeuillé la France depuis le mois de janvier 2015. Il était devenu un homme détesté et haï, mais surtout méprisé.

On pouvait croire, jusqu'à l'annonce de ce soir, que tout glissait sur lui comme l'eau sur les plumes d'un canard. Il faut croire qu'il lui restait une once de conscience, un brin d'intelligence, un éclair de lucidité. En décidant de ne pas se représenter il a incontestablement pris une bonne décision. Mais la question que l'on peut se poser est de savoir si c'est peut-être bien la seule de son quinquennat.

François Hollande et le champ de ruines

François Hollande laisse donc derrière lui un champ de ruines. Les prétendants ne seront pas à la fête. Manuel Valls, piaffant d'impatience, va donc certainement déclarer sa candidature à la primaire du parti « socialiste ». Mais, il n'est plus le même homme qu'en 2012. Il a été usé par la fonction de Premier-ministre. Chez lui désormais les éléments de langage remplacent la politique, et les tics prennent le pas sur le langage. S'il était choisi, sa candidature dégouterait une partie des militants de la « gauche », et il n'aurait d'autre choix que de disputer à Emmanuel Macron, voire à François Bayrou, les débris d'un socialo-centrisme, lointaine réminiscence de la « troisième force » de la IVème république.

Arnaud Montebourg veut incarner quant à lui la « gauche » du P »S », encore que cette position lui soit contestée tant par Benoît Hamon que par d'autres candidats. Arnaud Montebourg, tout comme Valls, était lui aussi présent à la primaire de 2011, mais il avait réuni sur son nom 17% de suffrages alors que seulement 5% s'étaient portés sur celui qui allait devenir le Premier-ministre. Son bon résultat de l'époque l'avait mis en selle. Il fut Ministre que ce soit dans le gouvernement d'Ayrault ou de Manuel Valls, avant d'être démissionné avec pertes et fracas à l'été 2014.
S'il n'a rien oublié de son passage au gouvernement, il n'a rien appris non plus. En particulier, il n'a rien appris sur l'incompatibilité qu'il existe entre l'euro, et la politique que ce dernier impose, et la tache de redressement productif qu'il s'était fixé. Cette incapacité à nommer ses adversaires le condamne à des gesticulations où il peut retrouver les postures de l'ancien avocat pénaliste qu'il fut mais certes pas convaincre les français. De plus, sur la gauche, la place est déjà prise. La position de Jean-Luc Mélenchon, qui — lui — semble avoir compris que l'euro n'est pas simplement une monnaie mais constitue en fait un instrument de gouvernance au service de la finance et de l'austérité, est autrement plus cohérente et autrement plus forte.

Élysée - Sputnik Afrique
À gauche, quel droit d’inventaire… pour quel candidat ?
Ni Manuel Valls, qui représente la ligne social-libérale de François Hollande, ni Arnaud Montebourg dont le discours se réduit à des formules, ne peuvent espérer incarner une alternative crédible à François Fillon. Fort de son succès à la primaire de la droite et du centre, ce dernier propose un programme d'ajustement économique au cadre de l'euro et de l'Union européenne. Si l'on pense que ce programme va provoquer une catastrophe sociale et ne résoudra aucun des problèmes économiques auxquels la France doit faire face, il faudra lui opposer une autre cohérence. Mais de cela, ni Manuel Valls ni Arnaud Montebourg ne sont en l'état capables.

Le discours dans lequel François Hollande a annoncé son renoncement a insisté sur l'unité des français, alors que sa politique a largement contribué à les diviser. Il a présenté comme un adversaire fondamental le protectionnisme alors que ce dernier est pratiqué par nombre de pays et constitue un instrument légitime pour un pays cherchant à reconstruire son industrie. Ainsi, jusqu'au bout, François Hollande aura menti, travesti la réalité, inventé de fausses peurs pour faire oublier de vrais ennemis. Il convient donc de tourner la page, de renvoyer François Hollande et son quinquennat aux livres d'histoire, dans lesquels — n'en doutons pas — ils seront considérés comme les symptômes d'une France abaissée, tant économiquement que socialement, tant politiquement que moralement.

Il convient de préparer l'avenir. Il convient d'opposer au programme de François Fillon qui provoquerait, s'il était appliqué, des déchirures irréparables dans le tissu social français, une autre cohérence bâtie sur la compréhension que rien ne sera possible tant que la France restera dans l'euro. Cette autre cohérence doit être construite dans la reconnaissance que la Souveraineté est première pour reconstruire une véritable Démocratie, qui seule est capable d'assurer aux français une véritable Sécurité. Laissons les morts enterrer les morts, et Hollande enterrer la ligne social-européiste qu'il a incarnée à la suite de Jacques Delors. Il est temps de passer à autre chose.

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