L'annonce publiée sur le site de l'Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) laisse entendre que l'appel d'offres, qui expire en décembre 2016, est adressé uniquement à des entreprises de bâtiment américaines. La décision de l'administration de Kiev de chercher des entreprises de bâtiment outre-Atlantique pose de nombreuses questions. Tient-elle à la politique ou à la pénurie d'architectes ? Ou bien l'Ukraine est-elle devenue totalement impuissante sans l'aide des Américains ?
L'analyste politique de l'organisation de suivi international CIS-EMO Stanislav Bychok est certain qu'en l'occurrence « une main lave l'autre ».
« La corruption n'existe pas seulement dans les pays de l'ex-Union soviétique ou dans le tiers monde. Elle existe aussi aux États-Unis. Mais là-bas elle est pour ainsi dire institutionnalisée : l'Amérique influe sur ses partenaires en distribuant des bourses ou des biens immobiliers à construire dans le cadre d'un appel d'offres. À vrai dire je ne comprends pas quel est ce bâtiment qui ne peut pas être construit par des sociétés ukrainiennes avec les fonds ukrainiens et qui peut être construit grâce à un appel d'offres de l'USAID », s'étonne l'expert cité par le site Life.
M. Bychok est sûr que s'il s'agissait de la zone de séparation dans le Donbass, on pourrait supposer qu'il serait question de « casernes de type nouveau » ou d'autres sites militaires.
« À Kiev il n'y a pas de pénurie de l'immobilier, aussi s'agit-il d'un schéma de corruption, d'autant plus que les choses ne déboucheront sur aucune construction que ce soit », est-il convaincu.
Le politologue estime que l'USAID cochera une nouvelle case de la rubrique « soutien à la démocratie en Ukraine » pour plusieurs millions de dollars et la partie ukrainienne, pour sa part, fera état de la poursuite de la coopération avec les ONG américaines. Les deux parties en sortiront gagnantes.
Selon Stanislav Bychok, dans ce cas l'économie et la corruption ont prévalu, laissant la politique au second plan.
Mais le politologue et analyste Alexandre Assafov ne partage pas ce point de vue.
« Tout délit laisse des traces financières. Si l'USAID cherche des sous-traitants aux États-Unis, il s'agit d'un gros site d'infrastructure qui n'a rien à voir avec l'activité humanitaire. Sa construction ne peut pas être confiée à des sociétés locales, qui abondent en Ukraine. Il s'agit évidemment de l'élargissement de l'infrastructure de l'ambassade américaine, dont la devanture cache l'activité de plusieurs services secrets des États-Unis, ce qui demande un projet approprié », estime l'expert.
Selon lui, tout aurait été plus simple, s'il s'était agi d'un blanchiment d'argent élémentaire. Un appel d'offres aurait été alors lancé pour un programme de lutte contre la corruption ou un projet humanitaire à l'intention des démunis ukrainiens, à l'approche de la saison de chauffage.
« Il n'aurait pas fallu alors inventer des histoires en lien avec la construction. Il est clair que les Américains ont, en effet, besoin d'élargir leur infrastructure, et ils souhaitent le faire dans des délais assez brefs », signale l'expert.
Rappelons qu'en 20 ans de présence en Russie, entre 1992 et 2012, l'USAID a réalisé des projets pour quelque 2,7 milliards de dollars. Le contrat avec l'USAID a été rompu suite à la position du ministère russe des Affaires étrangères qui avait accusé l'agence d'utiliser la distribution de bourses pour « tenter d'influer sur des processus politiques, les élections de niveaux différents et les institution de la société civile comprises ».
Le spécialiste de la politique étrangère américaine William Blum a révélé dès les années 1960 et 1970 les liens étroits entre l'USAID et la CIA dans le cadre des opérations étrangères.
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