Après le drame de Viry-Châtillon, l’exaspération des policiers

© AFP 2024 DAMIEN MEYER Police officers gather in front of the Police headquarters of Rennes on October 11, 2016, to protest against a fire bomb attack against French police officers that occured on October 9 in the southern Paris suburb of Viry-Chatillon.
Police officers gather in front of the Police headquarters of Rennes on October 11, 2016, to protest against a fire bomb attack against French police officers that occured on October 9 in the southern Paris suburb of Viry-Chatillon. - Sputnik Afrique
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« Ulcérés » suite à l’attaque au cocktail Molotov de plusieurs policiers, samedi à Viry-Châtillon dans l’Essonne, le syndicat Alliance Police nationale appelle à la grève du zèle et à de vraies réformes. Un drame de trop dans contexte de haine anti-flics et d’usure des forces dans la lutte antiterroriste.

Quatre blessés, dont l'un d'entre eux est toujours entre la vie et la mort. Tel est le bilan de l'embuscade dont ont été victime deux voitures de police samedi 8 octobre à Viry-Châtillon, dans l'Essonne. C'est en plein après-midi, au carrefour du « fournil » — dans le quartier de « la Grande Borne », qu'une quinzaine d'individus cagoulés se jettent sur les deux véhicules, brisent leurs vitres et y jettent des cocktails Molotov. Les agresseurs pousseront la sauvagerie jusqu'à bloquer les portes pour empêcher les policiers de sortir de leurs voitures en flammes.

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En France, le crime de la rue devient le quotidien?
« J'ai vu qu'on voulait vraiment nous tuer », confie Sébastien au micro de RTL ce matin. Ce brigadier de 38 ans, affecté au commissariat de Juvisy a raconté au quotidien Le Parisien comment les assaillants ont tenté jusqu'au bout d'empêcher les policiers de sortir des véhicules en feu. Il raconte comment après être parvenu à s'extirper alors que sa voiture prenait feu, il voit sa coéquipière, la tête ensanglantée après avoir été frappée au visage, passer à côté de lui, comment il voit, avant de lui venir en aide, l'un de ses collègues en train de brûler vif.

Ce collègue qui brule, c'est Vincent, 28 ans, dont le pronostic vital est aujourd'hui engagé: les poumons étant gravement touchés il a été plongé dans un coma artificiel à cause des douleurs insoutenables dues à ses brûlures. « Une greffe du visage sera certainement envisagée s'il s'en sort », a commenté un de ses collègues.

Un drame qui survient alors que les policiers étaient en train de protéger une caméra de surveillance à un carrefour du quartier particulièrement réputé pour sa dangerosité. Les délinquants du quartier avaient en effet coutume d'y pratiquer le vol à la portière avec violence. Comme le rappelle le criminologue Xavier Raufer, ce n'était pas la première fois que la police était la cible d'une attaque à ce point particulièrement sensible :

« Au mois de septembre, une voiture de police avait déjà été détruite, ce n'est pas la première fois. Ces exactions se produisent sans que le gouvernement ne fasse grand-chose. Depuis le 5 septembre et la première attaque de policiers […] — la caméra gênante pour les dealers a été installée en avril 2015 — et depuis lors, à de nombreuses reprises, les voyous ont agressé des passants, les gens qui passent avec leur voiture au carrefour, la police, etc. sans aucune réaction à la hauteur des attaques en question… à la fin un drame devait arriver. Eh bien, il est arrivé.  »

This picture taken with a mobile phone shows a police car burning after being set on fire during an unauthorized counter-demonstration against police violence on May 18, 2016 in Paris, as Police across France demonstrate today against the anti-cop hatred they say they have endured during a wave of anti-government protests since early March. - Sputnik Afrique
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Une inaction des autorités que condamne aujourd'hui Alliance Police nationale. Contrairement aux périphrases employées par plusieurs ministres, le syndicat majoritaire n'y va pas par quatre chemins. Dans un communiqué où il se déclare « ulcéré », il dénonce « une lâche tentative d'assassinat perpétrée par une bande de voyous ». En conséquence, Alliance appelle « tous les policiers » à se contenter d'un « service minimum » afin de constituer « un rapport de force » pour que des « Grenelles de la sécurité » soient mis en place dans chaque département.

Mais en quoi consiste au juste ce «  service minimum » ? Comme l'expliquait hier Fabien Vanhemelryck — Secrétaire général délégué Alliance Police nationale — sur le plateau de BFMTV : « arrêter les initiatives, à partir du moment où on n'a plus les moyens de travailler en toute sécurité », tout en continuant d'assurer les urgences et les appels. C'est donc en fait plutôt une « grève du zèle » — comme beaucoup d'autres l'appellent — qu'un « service minimum » à proprement parler.

Le syndicat revendique quatre points pour répondre aux problèmes, trop fréquents, tels que celui survenu à Viry-Châtillon :

• Le recentrage immédiat du Policier dans son cœur de métier

• La révision des textes sur la légitime défense,

• Une réplique sans concession de la police et de la justice

• Un renfort d'effectifs conséquent afin d'assurer la reconquête du territoire.

​Par « recentrage immédiat du Policier dans son cœur de métier », Alliance entend que la Police soit employée de manière effective aux missions qui incombent à un agent de la force publique : « assurer la sécurité des personnes et des biens » et non pas « faire de la garde statique, garder des hôpitaux, garder des portes, faire la circulation », ou encore le transport de détenus, comme l'explique Fabien Vanhemelryck. Faire de la garde statique, un cas de figure qui s'apparente à la situation de samedi où les policiers ont joué les vigiles dans une cité où tout porteur d'uniforme est une cible de choix. Si Manuel Valls a rendu hommage aux policiers lors de sa tournée des commissariats de Viry en compagnie de son ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve, pour Philippe Capon, Secrétaire général d'UNSA Police, les belles promesses politiques doivent laisser place aux actes :

« Je pense que le discours politique c'est une chose, moi ce que je vois ce sont mes deux collègues gravement blessés — dont un qui lutte aujourd'hui contre la mort — […] Le tout sur une mission qui aurait pu être faite autrement. Garder un pylône avec une caméra, ce n'est pas le boulot de la police […] on a inutilement exposé nos collègues dans le cadre de leurs fonctions […] dans un quartier où on a des problèmes depuis 20-25 ans. »

Et ce n'est pas tant ces évènements qu'Alliance entend condamner, mais toutes ces agressions auxquelles sont de plus en plus confrontées les agents de police au quotidien, des évènements qui ne trouvent pas d'écho dans les médias — et suscitent encore moins de réaction de la part des décideurs politiques — faute d'une gravité suffisante pour attirer les caméras.

« Il faut savoir qu'au 31 décembre 2015, la police nationale a eu à dénombrer en opération de police 5 736 blessés, presque 6 000 pour les chiffres officiels du ministère de l'Intérieur. Ce sont des faits qui arrivent tous les jours. »

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Un bilan qui ne comprend pas les nombreux policiers blessés lors des manifestations contre la loi Travail. Une « haine anti-police » qui ne se limite donc pas aux seuls petits caïds des cités, un phénomène contre lequel Alliance tire depuis longtemps la sonnette d'alarme.Mais l'aggravation de la violence va de pair avec la diminution des moyens des forces de l'ordre au profit de leur réaffectation à la lutte antiterroriste, selon le criminologue Xavier Raufer, qui revient sur le phénomène :

« Ce que je dis et ce que je répète, depuis l'attaque de Charlie Hebdo et de l'Hyper cacher au début du mois de janvier 2015, le gouvernement français est tétanisé — à moitié paralysé — par ces affaires-là. Donc il a réagi en mettant toutes ses forces dans la bataille du terrorisme, avec des succès moyens, puisqu'on en est à 239 morts depuis le mois de janvier 2015. Mais [rien n'est mis sur] le front de la sécurité au quotidien, du maintien de l'ordre dans les cités pratiquement hors contrôle, celles où la loi ne s'appliquent plus, dont la Grande Borne de Viry-Châtillon. »

En guise d'illustration du manque de moyens alloué aux forces de l'ordre en charge de la sécurité des personnes au quotidien, Xavier Raufer souligne que si les auteurs de cette attaque se sont rendues coupables d'actes dont la gravité devrait les exposer en temps normal à plusieurs décennies d'emprisonnement, aucune arrestation n'a encore eu lieu…

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« Du moment où les individus ont des cagoules, on ne sait pas quoi faire, ce qui prouve qu'il n'y a aucune espèce de renseignement recueilli à l'intérieur de cette cité. S'il y avait eu du renseignement, on aurait su quels étaient les noms et les physiques qui étaient sous les cagoules et donc on aurait pu les arrêter rapidement après ce crime gravissime. »

« L'autorité de l'État sera assurée. Il n'y a pas de zone de non-droit », affirme Manuel Valls.

À voir, pour Philippe Capon : « Il n'y a pas de zone de non-droit, mais il y a des zones où la police ne peut pas faire son travail, donc ça dépend ce qu'on appelle zone de non-droit. »

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