La commission indépendante de l'Agence mondiale antidopage (AMA) a enquêté sur l'existence supposée d'un système de dopage aux JO de Sotchi en 2014 et a ensuite décidé que les sportifs russes devaient être privés de JO en 2016 de manière collective. Selon Pierre Sallet, le principal écueil dans l'affaire du dopage en Russie consiste en ceci que la communauté antidopage a oublié tous les fondements de ses règles juridiques alors qu'un des principes de base n'est autre que la sanction individuelle.
"Et dans ce cas-là la fédération internationale doit monter une procédure pour violation des règles antidopage et vous avez une période de suspension provisoire, ou une période de suspension qui doit être prononcée mais elle peut être prononcée après les Jeux olympiques ou avant, peu importe, ça dépend du traitement du dossier", poursuit-il.
Aujourd'hui il y a tout un tas de règles et un certain nombre d'entre elles ne sont pas respectées du point de vue juridique.
"Encore une fois, on a dit très tôt dans les médias: la sanction complète de la Russie au niveau des Jeux olympiques, ça aurait été une grosse erreur juridique parce que c'est vraiment du jamais vu et là la fédération internationale exclut certains athlètes sur des bases qui ne sont pas des bases du règlement actuel. J'allais dire quand vous dites: un athlète qui s'est dopé en Russie ne doit pas participer à des Jeux olympiques, pourquoi des athlètes qui sont dopés des autres nationalités qui y participent-ils? Vous voyez, la règle doit être la même pour tous", fustige M. Sallet.
Voici un nouvel épisode de la saga dopage: la perchiste Elena Isinbayeva a été suspendue par sa fédération alors qu'elle n'a jamais été contrôlée positive. Quelle valeur accorder à cette décision du CIO?
"C'est un drame, je ne suis pas là pour défendre les athlètes", confie M. Sallet. "Il y a les suspicions et les faits. Dans l'antidopage on ne se base que sur les faits. Donc factuellement s'il y avait quelque chose à lui reprocher, il aurait fallu qu'on ait des éléments comme quoi ses échantillons ont bien été manipulés, etc. On n'a aucun élément et encore une fois c'est là où il y a vraiment un vide juridique".
C'est comme si on écrivait le règlement au fur et à mesure du temps. C'est-à-dire que vous avez des règlements qui sont établis et c'est comme si on les changeait de jour en jour pour y coller ce qu'on souhaite, j'allais dire, obtenir comme résultat alors qu'on ne doit pas fonctionner comme ça.
"Ça ne remet pas du tout en cause les problèmes qu'il y a en Russie encore une fois, mais on doit faire avec nos règles et là on a oublié toutes nos règles". Même les instances qui se sont prononcées sur ces aspects d'exclusion générale, d'un point de vue juridique, elles ont assez de recul pour savoir que ça n'était pas entendable juridiquement.
On n'a jamais rendu une justice de cette façon dans le monde du sport, précise-t-il.
Un point très technique est abordé dans le rapport: la manipulation d'échantillons.
"Et pourquoi ça nous interpelle? Puisque sans doute il va falloir changer nos procès. C'est qu'en théorie, on a des scellés et en théorie, ces scellés sont inviolables. Est-ce qu'il y a un dispositif qui a été développé qui permet de lever ces scellés sans que ça soit visible? Peu importe mais en tout cas, encore une fois, pour les futurs droits des athlètes il faut savoir que les athlètes qui trichent s'emparent de tous les vices de procédure", résume l'interlocuteur de Sputnik.
Cela signifie que si un athlète contrôlé sur une compétition donne son échantillon en étant convaincu que celui-ci ne peut pas être manipulé et s'il apprend qu'en réalité il est potentiellement manipulable, un des premier recours dans une affaire de dopage sera de de dire: mais écoutez, moi je suis complètement clean, mon échantillon a été manipulé. Donc il va falloir revoir ces processus-là et cela va amener énormément de choses.