Faut-il se résigner au terrorisme comme conséquence de la mondialisation?

DEVRAIT-ON ACCEPTER LE TERRORISME COMME EFFET SECONDAIRE DE LA MONDIALISATION?
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Le premier ministre français Manuel Valls a peint une scène sombre lors d’une interview après l’attaque de Nice. Il a declaré que la menace terroriste est maintenant une question centrale et durable, et que le terrorisme fera longtemps partie de la vie quotidienne.

Devrait-on être obligé d'accepter cette version de l'avenir? Quels autres choix aurait-on?

INVITES: Gaëtan Dussausaye est directeur national du Front National de la Jeunesse et membre du Bureau Politique du Front National. Djordje Kuzmanovic est secrétaire national du Parti de Gauche en charge des questions internationales et de défense.

Le terrorisme ferait-il partie de la vie quotidienne des Français?

Gaëtan Dussausaye: "Je ne suis pas d'accord avec les propos de Manuel Valls: c'est empreint d'un fatalisme assez coupable et criminel, de la part d'un responsable politique aussi important qu'un Premier Ministre de la République française; quand on a la responsabilité d'un gouvernement et de la politique d'un pays, on ne peut pas se dire que finalement, malgré les actions du gouvernement, il y aura à nouveau des morts et des victimes du terrorisme."

Djordje Kuzmanovic: "Ce propos est pour un Premier Ministre anxiogène et inacceptable; c'est le principe selon lequel le terrorisme va perdurer à l'infini, sans se poser des questions, et cela lui permet de produire des lois liberticides qui nuisent aux citoyens sans lutter contre le terrorisme"

Quelles sont les manières de lutter contre le terrorisme?

Gaëtan Dussausaye : "En réalité il n'y a pas de réelle mesure qui a été prise contre le terrorisme; la loi sur le renseignement, la loi sur le PNR (fichage de ceux qui prennent l'avion), alors que les terroristes en France ne viennent pas par avion. L'état d'urgence ne sert que pour une certaine durée, il faut mener de véritables actions, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui; le report de l'état d'urgence arrivera peu avant la campagne présidentielle, ce qui impliquera que des meetings seront interdits pendant la campagne."

Djordje Kuzmanovic : "En France, nous avons eu plus de 16 lois antiterroristes depuis 1982, et les dernières sont copiées sur le "Patriotic Act" des USA, adopté à la suite des attentats du 11 Septembre, et qui ne lutte pas contre le terrorisme mais qui permet de ficher des citoyens ou d'écouter leurs conversations; il en est de même de l'état d'urgence, qui a été prolongé hier de 6 mois, et qui a surtout empêcher les manifestations contre la loi El Khomri, et qui n'a entraîné que 5 arrestations dans la lutte contre le terrorisme."

Comment améliorer le renseignement?

Gaëtan Dussausaye: "C'était faisable, mais des réformes ont été menées sous Sarkozy et qui ont perduré sous Hollande: suppression des RG (renseignements généraux), on privilégie la théorie du renseignement telle qu'on l'apprend à l'université, alors qu'il faudrait revaloriser le renseignement de terrain et humain, des personnes qui ont de l'expérience et qui ont travaillé où le fondamentalisme islamiste sévit. Les RG pourront se focaliser sur les éléments dangereux et qui constituent une menace (les "fichés S", les personnes radicalisées), au contraire de lois liberticides qui cherchent à surveiller l'ensemble de la population."

Djordje Kuzmanovic "Le terrorisme a toujours existé; la guerre contre le terrorisme n'a aucun sens, mais on peut combattre les terroristes; or Manuel Valls, comme Nicolas Sarkozy, ne propose rien de concret; il y a des mesures très profondes à prendre: développer le renseignement humain (comme l'a souligné la commission parlementaire), arrêter d'utiliser les troupes françaises à se promener dans la rue sans avoir les possibilités de se battre contre les terroristes, donc stopper l'opération "Sentinelle" qui ne sert à rien, et se poser la question d'où viennent les terroristes, qui les a créés et qui les finance (en l'occurrence le Qatar et l'Arabie Saoudite); revoir nos alliances dans le Moyen-Orient, où nous ne faisons que suivre la politique des USA. Nous aurions levier d'action sur certains terroristes si nous prenions des mesures contres certains princes du Golfe qui ont des intérêts en France.

Que faire des personnes "fichées S"?

Djordje Kuzmanovic: "Il faudrait donner des moyens à la justice anti-terroriste; on a un problème avec des lois d'austérité, imposées par Bruxelles à notre budget; nous avons réduit nos effectifs policiers, militaires et alloués à la défense et à la justice anti-terroriste; or ce sont les juges anti-terroristes qui font les vraies procédures et qui permettent d'arrêter les terroristes. Le gouvernement ne s'y intéresse absolument pas.
Concernant les "fichés S", il faudrait poursuivre les mosquées illégales financées par le Qatar et l'Arabie Saoudite; il faudrait savoir ce qu'il s'y dit, or les RG ont été supprimés et on a créé un système complexe sans fichier central entre les différents services; dans les fiches S, il y a de tout: des personnes dangereuses, mais aussi des syndicalistes, des opposants. Ce terme est envoyé dans le discours public, alors qu'il ne recouvre pas grand-chose. Il faudrait un fichier central du renseignement anti-terroriste, qui n'existe pas.

Que faire face au financement du terrorisme?

Gaëtan Dussausaye : "Il est quand même incroyable qu'un pays comme la France puisse accepter le financement en provenance de pays étrangers pour des lieux de culte (officiels ou clandestins), pays connus pour avoir des liens extrêmement flous, voire conciliants, avec Daech. Il faudrait un acte fort de l'état qui interdise ces financements, il est hors de question que la France devienne la scène de théâtre des enjeux et d'influences entre les pays du Moyen Orient."

Djordje Kuzmanovic : "On a la preuve de l'implication du Qatar et du Koweït dans l'opération en Belgique (35 millions d'Euros servant à financer le terrorisme ont été interceptés), la Turquie reste une base arrière très complaisante concernant le financement de Daech: la famille d'Erdogan est largement impliquée dans l'achat de pétrole vendu par Daech. Nous avons des gouvernements qui donnent des blancs-seings démocratiques à Erdogan. Des mesures contre le terrorisme impliquent de couper son financement, mais cela implique de gros changement en termes géostratégiques. C'est la même chose aux USA: Al-Qaeda n'est pas née de rien, et même Hilary Clinton a reconnu que cela a été créé pour combattre l'URSS."

Le terrorisme est-il un "effet secondaire de la mondialisation"?

Gaëtan Dussausaye: "Il est évident qu'à partir du moment où il y a une multiplication des échanges, où la communication s'internationalise, il est certain que quand la France décide d'intervenir pour servir des intérêts plus qu'opaques dans le monde, il ne faut pas s'étonner qu'il y ait des répercussions sur son propre sol. Certains conflits qui peuvent exister dans certaines régions se retrouvent importés chez nous. Il n'y a pas que des mesures à prendre en France, il y a aussi toute une logique internationale, une révision de nos relations diplomatiques, de nos interventions militaires."

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