M. Marchal, agriculteur à Serres, en Meurthe-et-Moselle, a été le premier agriculteur en France à obtenir la reconnaissance de sa pathologie comme maladie professionnelle auprès du Tribunal des affaires de la Sécurité sociale des Vosges. Ce jugement a fait jurisprudence pour de nombreux professionnels malades des pesticides.
Néanmoins, la cour d'appel de Metz refuse de reconnaître le lien de causalité entre sa maladie et l'utilisation de pesticides.
Entre-temps, l'association "Générations Futures" a publié sa carte interactive des "Victimes de pesticides" en France. Pour François Veillerette, directeur et porte-parole de l'association, cette carte est issue d'un long combat.
"Ca fait huit ans qu'on travaille sur ce sujet. Nous avons commencé à travailler avec les agriculteurs, malades des pesticides. Il était très difficile de faire témoigner les agriculteurs, bien qu'on sache qu'ils avaient des problèmes. Au fil des années, on a réussi à collecter quelques témoignages", confie-t-il dans un entretien à Sputnik.
Par la suite, on a d'ailleurs réussi à aider ces agriculteurs à fonder leur propre association "Phyto-victimes".
"Et maintenant, nous avons ouvert un autre volet de notre activité: nous travaillons avec des personnes exposées non pas par leur métier, mais par leur environnement agricole", poursuit M. Veillerette. "Les gens nous appellent, parce qu'ils habitent à côté des champs, des vignes. On leur répondait, en donnant des conseils et consultations, et maintenant on a voulu rendre visible cette réalité d'exposition des gens dans les zones agricoles et des dangers qui peuvent y être liés".
Rien qu'hier, on a reçu 200 nouveaux témoignages.
Faut-il se réjouir de la parution d'une telle carte qui fait franchement froid dans le dos? Oui, parce qu'elle met un coup de projecteur sur les coins sombres et occultées de la campagne verdoyante. Et oui, parce que l'expression "se mettre au vert" ne doit pas devenir synonyme de "se mettre en danger".
Le problème réside dans le fait qu'aucun rapport sur la nocivité n'est catégorique à 100%. Il faudrait pouvoir comparer les effets sur la santé, sur une longue période, entre un groupe exposé à un groupe dit "contrôle" ayant le même mode de vie mais non exposé…
Pour comparaison, plusieurs procès sur l'amiante ou la cigarette ont été gagnés en France et dans le monde.
"Les procès sur la nocivité des pesticides sont plus difficiles à gagner que les procès sur l'amiante", confirme M. Veillerette. "Puis que mésothéliome est comme un marqueur de l'exposition à l'amiante. Alors que d'autres cancers peuvent être liés aux pesticides, comme à d'autres cas…".
C'est là-dessus que les avocats et les firmes jouent. Il faut que la justice accepte d'évoluer dans le niveau des preuves. Il faut qu'on puisse indemniser les agriculteurs exposés aux pesticides par leur environnement, maintient-t-il.
Sputnik n'a pas réussi à obtenir un commentaire du premier intéressé, Dominique Marchal. Malgré sa maladie, il continue tout de même à travailler à la ferme, mais reste injoignable par téléphone. Par contre, nous avons réussi à joindre son épouse.
Selon Mme Marchal, la situation où son mari a été mis est scandaleuse et inadmissible, déjà de ne pas répondre aux questions qu'ils avaient posées à l'Etat, sans parler d'y réagir de quelque manière. Il s'avère que l'Etat est indifférent au fait que 99% des paysans tombent malades à cause de l'utilisation des produits phytosanitaires.
C'est désormais le combat de madame et monsieur Marchal: faire reconnaître par l'Etat que les victimes de l'utilisation abusive des pesticides sont au même niveau que les victimes des attentats. Parce que de plus en plus de personnes tombent quotidiennement terrassées par ce mal invisible.