Libérées, les "épouses de Boko Haram" n'ont pas fini de souffrir

© AFP 2024 STRINGER Internally Displaced Persons (IDP) mostly women and children sit waiting to be served with food at Dikwa Camp, in Borno State in north-eastern Nigeria, on February 2, 2016.
Internally Displaced Persons (IDP) mostly women and children sit waiting to be served with food at Dikwa Camp, in Borno State in north-eastern Nigeria, on February 2, 2016. - Sputnik Afrique
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Il y a un an, en avril 2015, les forces armées nigérianes libéraient près de 300 femmes et fillettes retenues prisonnières par l'organisation terroriste Boko Haram.

Enfermées pendant des mois dans des conditions inhumaines d'esclavage sexuel, les femmes avaient alors pu commencer à reprendre leurs esprits dans un camp de réfugiés. Mais leurs souffrances n'étaient pas terminées. Slon Magazine reprend les principaux extraits d'un article du Washington Post, qui décrit le cauchemar que continuent de vivre les "épouses de Boko Haram".

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Boko Haram est une organisation terroriste qui sévit dans le nord-est du Nigeria depuis 2002 et a prêté allégeance à Daech en 2015. Ses membres, qui aspirent à créer un État islamique, s'opposent au mode de vie et d'éducation occidental. Au Nigeria, dont la moitié de la population est chrétienne, les islamistes de Boko Haram enlèvent des femmes et des fillettes puis les retiennent dans des conditions de violence et d'esclavage sexuel, avant de les convertir à l'islam et de les marier à leurs combattants.

En un an, les forces nigérianes ont repris à Boko Haram une partie des territoires que l'organisation contrôlait et libéré de nombreuses prisonnières. Les femmes espéraient que la société les accueillerait à leur retour: en effet, quand les terroristes avaient kidnappé 276 écolières nigérianes il y a deux ans, l'onde de choc s'était répandue dans le monde entier, y compris via la campagne "Bring Back Our Girls". Aujourd'hui, les Nigérians méprisent ces anciennes prisonnières et certains pensent même que, dans les veines des enfants nés après un viol, coule le sang de leurs pères terroristes. Ces enfants seront probablement rejetés par la société.

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Les femmes libérées suscitent également beaucoup de suspicions étant donné que les terroristes convertissaient de force leurs esclaves à l'islam, les forçaient à prier et les impliquaient dans l'activité terroriste. Les camps où elles vivent aujourd'hui sont contrôlés par des militaires nigérians et elles subissent constamment des fouilles et des interrogatoires. De plus, ces femmes sont retenues isolées des autres personnes sauvées. Même le personnel des organisations humanitaires n'est autorisé à leur rendre visite que sur autorisation spéciale des militaires, et ces organisations ont souvent peur de travailler avec d'anciennes prisonnières à cause de leur éventuel lien avec Boko Haram.

La méfiance envers les "épouses de Boko Haram" est renforcée par le fait que de nombreux attentats au Nigeria ont été commis par des femmes kamikazes provenant de cette organisation — et on ignore si elles le font volontairement après un "lavage de cerveau" en détention par Boko Haram ou si elles commettent des attentats sous la pression des terroristes.

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Selon les récits d'anciennes prisonnières, quand les forces nigérianes ont attaqué la colonie des terroristes, les islamistes ont ordonné aux femmes de fuir mais ces dernières n'ont pas obéi, dans l'espoir d'être sauvées. Conséquence: les membres de Boko Haram les ont lapidées, parfois à mort. Le processus de libération, en lui-même, peut être difficilement qualifié "d'opération de sauvetage": les troupes nigérianes ont brûlé des maisons où se trouvaient des prisonnières et beaucoup d'entre elles sont mortes.

De nombreuses femmes ont accouché d'enfants de leurs violeurs. Certaines sont mortes ou ont disparu, et leurs enfants ont été pris en charge par d'autres femmes. Cela affecte fortement la psychologie déjà affectée de ces dernières, car beaucoup d'entre elles n'avaient pas l'intention d'accoucher (qui plus est des terroristes) et ne souhaitaient pas élever les enfants des autres. Mais ces femmes n'ont simplement nulle part où aller: après les attaques de Boko Haram contre leur village, les maisons ont été pillées ou brûlées et leurs maris ont pu être tués. Depuis leur libération, certaines femmes cherchent à s'oublier en préparant et en consommant à grande dose des médicaments sous forme de sirop, ayant un effet narcotique.

Une thérapie de groupe est en cours dans le camp des anciennes "épouses de Boko Haram", et récemment le gouvernement a ouvert un centre de "déradicalisation" pour aider les anciennes prisonnières à s'adapter. Mais l'admission a été close après l'accueil de seulement 311 femmes — ce qui n'est pas du tout suffisant. Manifestement, l'espoir de redresser la situation des anciennes "épouses de Boko Haram" est très mince.

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