Depuis le début des négociations sur la crise migratoire, la Turquie est en position de force et essaie d'en tirer profit, estime Atlantico. Cependant, Roland Hureaux ne partage pas ce point de vue, tout en soulignant que l'hypothèse que la Turquie puisse entrer dans l'Union européenne "n'a aucun intérêt", le projet étant irréalisable pour le moment.
"Si tel était le cas, la Turquie serait autre chose que ce qu'elle est et l'Union européenne aussi. La Turquie aurait évacué Chypre, elle serait un vrai état démocratique, vraiment laïque où les femmes et les minorités religieuses seraient respectées. Dans ce cas, je pense qu'elle ne ferait pas la guerre à ses voisins, Syrie et Irak, par djihadistes interposés et, puisqu' il n'y aurait pas de guerre, le problème des réfugiés ne se poserait pas. La Turquie ne penserait pas non plus à islamiser l'Europe en nous envoyant des +migrants+", explique-t-il.
L'ancien diplomate français n'hésite pas à fustiger les hauts fonctionnaires de l'Union européenne: "La seule force d'Erdogan est la lâcheté des Européens qui, soit ont peur de troubles dans les banlieues qui pourraient être déclenchés par Erdogan (il en aurait menacé Hollande), soit sont subjugués par la puissance du lobby turc en Europe occidentale qui corrompt autant qu'il le peut nos classes dirigeantes".
D'après M.Hureaux, si la Turquie avait été admise dans l'Union européenne — et l'espace Schengen — elle ne serait pas allée chercher des migrants au Proche-Orient pour "les emmener en Europe".
"Quant au projet de libre circulation, il semble qu'il vole en éclats par lui-même, sous les coups de boutoir de la vague migratoire organisée par Ankara, mais aussi par la résistance d'un certain nombre de pays qui ne sont pas dans les mêmes dispositions accueillantes que Merkel: Pologne, Hongrie, Slovénie, Croatie, Autriche et maintenaient Grèce", ajoute-t-il.
Avant de conclure: "En tous cas, même sans la guerre au Proche-Orient, la possibilité d'une émigration massive turque aurait à elle seule posé des problèmes au cas où la Turquie aurait été dans l'espace Schengen, ce qui n'a d'ailleurs jamais été envisagé sérieusement".