Antisémitisme, homophobie, islamophobie, racisme : la France épinglée

© AFP 2024 THIERRY ANTOINEPhoto taken on December 13, 2009 shows the entrance to the Castres mosque which was desecrated overnight. Xenophobic neo-nazi propos were spray-painted on the wall, pigs trotters hung from the door handle and pigs ears stapled to the door. Graffiti at right reads, "France for the French".
Photo taken on December 13, 2009 shows the entrance to the Castres mosque which was desecrated overnight. Xenophobic neo-nazi propos were spray-painted on the wall, pigs trotters hung from the door handle and pigs ears stapled to the door. Graffiti at right reads, France for the French. - Sputnik Afrique
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Dans un rapport de ce Mardi 1er Mars, les membres de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (CERI) ont pointé une hausse alarmante des cas en France relevant du racisme, de l’islamophobie, de l’antisémitisme, de la xénophobie. Bref, la France est dans le collimateur.

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Se basant sur les données du Ministère de l'Intérieur et des différentes associations, la CERI (liée au Conseil de l'Europe) n'a pas mâché ses propos dans un rapport sur la situation en France. Le rapport dénonce deux choses, selon M. Michel Taube, spécialiste des droits de l'homme (fondateur du site www.opinion-internationale.com): la montée du racisme en France (sous toutes ses formes), et la banalisation des discours racistes venant de politiciens.

« Les formes que prennent les propos racistes concernent trois catégories de personnes: la minorité Rom, qui est souvent dénoncée par des leaders politiques ou par des personnes dans la société; les actes et les propos antisémites qui visent les Juifs; les représentants de l'Islam font l'objet d'atteintes à toutes les pratiques musulmanes, et des amalgames sont faits par des politiciens entre le contexte des attentats terroristes et les Musulmans. »

Selon le Conseil de l'Europe, les actes à caractère raciste ont augmenté de 14% entre 2012 et 2014, tandis que ceux antisémites ont explosés de 36% durant la même période. Quant à l'islamophobie et au rejet de la communauté Rom, plus difficiles à chiffrer, ils se banalisent, non seulement dans le cadre d'actes (18,5 % d'augmentation en 2015 par rapport à 2014), mais aussi dans les propos tenus par les politiques. Comme on pouvait s'y attendre, les propos de Mme Le Pen ont été blâmés, tout comme ceux de M. Copé.

​Concrètement, quelles sont les conséquences pour la France d'un tel rapport? M. Sasha Reingewirtz, Président de l'Union des Etudiants Juifs de France, nous répond:

« Ce rapport révèle une situation qu'on connait: une multiplication des actes racistes et antisémites depuis de nombreuses années, et qui révèle que notre pays est miné par un certain nombre de préjugés, de comportements et de pratiques de discriminations qui font qu'un certain nombre de minorités et de populations sont en but soit à du racisme, de l'antisémitisme, et ce qui est inquiétant c'est le nombre de violences liées à ces phénomènes.

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Je pense en particulier au rapport rendu par la délégation interministérielle à la lutte contre le racisme et l'antisémitisme, et par le Ministère de l'Intérieur, qui a montré qu'il y avait une explosion des agressions à caractère antisémite, islamophobe et raciste. »

Suite à ce rapport, la politique du gouvernement Valls devrait se faire à plusieurs niveaux, selon M. Reingewirtz:

« En terme de politique publique, l'éducation devrait être privilégiée et renforcée, en particulier dans les quartiers populaires, qui sont des territoires sous-administrés, et qui font qu'une perte de repères mène bien souvent à une défiance vis-à-vis de la République, et dans certains cas, à une influence de certains idéologues islamistes.

Deuxièmement, ne pas céder aux sirènes de l'extrême droite, ne pas appliquer en termes de programme ou en termes de politique publique, certaines idées, demandées par l'extrême droite, quand bien même elle est aujourd'hui à un niveau particulièrement inquiétant.

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Enfin, il est important de travailler sur la propagande de haine, surtout sur internet, puisqu'on observe aujourd'hui que la libération de la parole raciste et antisémite provient beaucoup du fait qu'internet est un milieu de plus en plus violent, où la parole attaque, cible et stigmatise; malheureusement aujourd'hui la législation n'est pas suffisante, et les pratiques des grands médias sociaux ne sont pas suffisamment claires, et les conditions d'utilisation aussi ne permettent pas d'enrayer ce phénomène. »

Ces formes d'intolérance ne se reflètent pas seulement dans les paroles ou les actes. Des décisions administratives entrainent elles aussi souvent des situations discriminantes, comme sur le port du voile, ou sur l'autorisation faite aux Roms de pouvoir élire domicile. Dans un cas comme dans l'autre, différents intérêts doivent être balancés (liberté de culte contre laïcité).

​La conception de la laïcité des autorités françaises et du droit français est-elle-même considérée comme « restrictive » dans ce rapport. Une laïcité que nous explique M. Taube:

« La France fait office d'exception dans le monde entier. (…) Officiellement, la neutralité de l'Etat français vis-à-vis de tous les cultes va de pair avec le fait de faciliter l'expression des cultes dans notre pays.

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Mais dans les faits, et dans l'histoire de France, il y a un conflit très profond entre l'Etat et les cultes; on a connu ça au 19ème siècle avec la guerre opposant l'Etat à l'Eglise catholique, et qui a donné lieu à la Loi de 1905, qui instaura la laïcité; aujourd'hui, l'Etat a un problème avec un autre culte, celui musulman.

Normalement, la laïcité entendue de façon ouverte et apaisée doit permettre à tous les cultes de s'exercer librement dans certaines limites; limites qui sont de ne pas multiplier les signes ostentatoires qui pourraient gêner d'autres citoyens. En France, il y a une ambiguïté certaine: il y a le droit, il y a les mentalités, et on est dans un Etat qui a peur des religions. (…) La France a donc ces tensions qui posent problème, et qui ne peuvent pas être comprises souvent dans le monde. »

Le fait est que la CERI se base sur la Convention Européenne des Droits de l'Homme; et de par son obligation contractuelle, la France ne peut certes pas se dérober.

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Mais cette approche n'est pas elle-même à l'abri de critiques, car en effet, les risques de communautarisme et de morcellement de la société sont les aboutissements de l'abandon des règles de la République. Verrait-on une France devenir un deuxième Liban?

La communautarisation touche le monde entier, selon M. Taube: on assiste à une augmentation des inégalités économiques et sociales, à un retour du religieux, et les gens ont tendances à se replier sur eux-mêmes et sur leurs semblables.

« Cela n'est pas propre à la France, et c'est un phénomène de fond, si on prend l'Angleterre, les Etats-Unis, certains pays arabes, où les minorités ont du mal également à s'exprimer; chacun doit avoir le droit d'exprimer ses origines, ses traditions, sa religion librement tout en étant républicain, ce qui est l'immense majorité des Français; il n'y a que certains groupuscules ou politiques démagogues qui voudraient nous faire croire le contraire.»

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La France est certes la « patrie des Droits de l'Homme », et dénonce régulièrement les atteintes faites aux minorités et aux étrangers dans d'autres pays. Epinglé à son tour, le gouvernement doit faire face à ses responsabilités, dans la mesure où il lui incombe de protéger ses citoyens de toute forme de discrimination; mais le gouvernement ne devrait pas plier sur ce qui fait la force de la République.

En cela, abandonner la laïcité reviendrait à abandonner la liberté de culte, indissociable l'une de l'autre.

Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur.

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