La politique migratoire allemande
Le refus des engagements pris par le pays pour résoudre la crise migratoire, et donc la fermeture de la frontière bavaroise pour les réfugiés est désormais possible, estime Torsten Benner, directeur de l'Institut de recherche en politiques publiques de Berlin, dans un article publié dans le journal Politico.
Les partisans et les opposants de la politique migratoire de Mme Merkel ont l'intention de considérer la situation avec les réfugiés via l'idée d'un certain "jeu moral", où la chancelière fédérale prend l'initiative et essaye de payer pour les malheurs provoqués par son pays dans le passé, en ouvrant les frontières pour ceux qui ont perdu leur maison.
D'un certain point de vue, il s'agit d'"impérialisme moral" de Mme Merkel. Ses partisans, par contre, l'apprécient pour sa position "héroïque" qui avait produit des éclats de soutien à travers le monde. Cependant, les deux opinions sont loin de la véritable explication des motifs de la politique de "portes ouvertes".
Il y a déjà longtemps que la crise actuelle a commencé à s'accentuer. L'Union européenne ne portait pas l'attention nécessaire à la situation avec les migrants en Turquie, au Liban et en Jordanie, ainsi qu'à l'absence de sécurité à ses frontières extérieures et aux problèmes avec le système de gestion des migrants en Grèce, souligne l'expert.
Les dirigeants européens ne pouvaient pas parvenir à un accord concernant la répartition des flux migratoires, et les hommes politiques soutenant des idées antimusulmanes commençaient à se renforcer. L'Union européenne risquait de perdre tout contrôle sur la situation.
Le rôle de la chancelière fédérale Merkel
Selon l'observateur de Politico, Mme Merkel se rendait compte de la menace pour toute l'Europe, et en particulier pour l'Allemagne, pays qui avait dégagé les bénéfices les plus importants de l'intégration européenne.
Ayant décidé d'ouvrir les frontières aux réfugiés que la Hongrie avait refusé d'accueillir, Mme Merkel a pris le rôle libéral prépondérant pour l'Allemagne, et cette décision fut purement pratique et non romantique: le pays voulait gagner du temps pour que l'Union européenne puisse plus tard trouver une solution commune à la crise.
La chancelière fédérale a investi tout son capital politique dans cette décision et, aujourd'hui, elle doit le payer, en cherchant des réponses aux reproches qui lui sont adressés de la part des électeurs et des membres de son propre parti, explique l'analyste. Par ailleurs, les risques de rivalité politique augmentent. La cote du parti de la droite conservatrice Alternative pour l'Allemagne (AfD) a atteint jusqu'à 10%, et ce mouvement pourrait obtenir des mandats dans trois parlements régionaux même avant les élections de mars.
Dans le même temps, Berlin maintient sa pression sur les autres pays européens pour parvenir à un accord sur la répartition des migrants. Beaucoup de membres de l'union considèrent peut-être le problème comme purement allemand. Mais Berlin a partiellement conduit une telle situation, parce qu'il ne trouvait pas nécessaire la solidarité sur d'autres questions, souligne M.Benner.
La crise migratoire met en question les principes politiques des pays européens qui continuent d'en souffrir. L'Allemagne représente un cas particulier, car c'est le pays qui semble être la première destination des réfugiés. La crise actuelle est comparée par son ampleur à celle de l'époque de la Seconde Guerre mondiale.