Un an après, le succès et la polémique sont toujours là. Faut-il y voir un livre-phénomène, ou la révélation d'un malaise en France?
Le malaise, tel est le vrai résumé du livre. Le malaise en France à l'égard de l'Islam, des musulmans et de leur place dans la société française. Un malaise à l'égard de soi-même et de l'autre. Islamophobie, ou pas? Chacun est libre d'interpréter l'ouvrage selon ses propres valeurs.
Certains diront que c'est l'effet de « retour de bâton » par rapport aux attentats; face à ces personnes, il faut dire que l'Islam est une religion, et non pas une organisation terroriste.
Ce malaise est-il sociétal, ou est-il seulement personnel?
Pour en parler avec nous, M. Claude Sicard, auteur de « L'Islam au risque de la démocratie ».
Ce malaise ne peut être que réel, dans la mesure où il s'agit pour les uns et pour les autres d'identité; lorsque des musulmans arrivent dans la vieille Europe, ils gardent leur identité; les civilisations musulmane et occidentale sont deux civilisations importantes et en lutte depuis l'apparition du prophète.
Au final, la revanche sur la colonisation crée l'attachement à l'identité. La polémique ne contribue-t-elle pas à ce malaise?
Ce qui contribue davantage au malaise, ce sont les attentats de Charlie Hebdo et du 13 novembre, parce que les européens ont tendance à faire trop vite des amalgames. Ceux qui ont lu le Coran et qui connaissent l'Islam savent que beaucoup de passages sont hostiles aux occidentaux; il est donc difficile de faire le partage entre ce qui vient de Houellebecq et ce qui vient d'autres.
Il s'agit de l'Islam. La différence entre Mahomet et Jésus, c'est que dans le Christianisme, la relation est entre père et fils, alors que dans l'Islam il s'agit d'un rapport d'obéissance à un maître, sans que l'on demande d'aimer, mais de respecter la loi. On est proche d'une soumission.
Le livre de Houellebecq se passe dans le futur en 2022. Science-fiction ou réalité? Si la barrière est vague, il existe bel et bien une Union des Musulmans de France. Doit-on crier au loup? Pas vraiment, surtout que cette « union » (gimmick serait le terme plus exact) ne récolte guère beaucoup de « likes »; on ne peut le comparer au parti de la « Fraternité Musulmane » décrit par Houellebecq.
En effet, plutôt que de rejeter l'autre, pourquoi ne pas s'affirmer soi-même? Pourquoi ne pas établir un Islam unique de France, laïc et républicain, hors de toute politique, au lieu d'un communautarisme jouant le jeu de l'exclusion, et donc de l'extrémisme?
L'affirmation de soi est toujours une réponse à un malaise, n'en déplaise à tous ceux dont le nom finit par « phobe ».
Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur.