Après la destruction par la Turquie d'un avion russe, les positions d'Ankara ont faibli, et le pays ne prétend plus au statut de première puissance régionale, écrit pour Al-Monitor le journaliste turc Cengiz Çandar, spécialiste des problèmes du Proche-Orient.
"Les derniers doutes à ce sujet ont été dissipés par les récentes tentatives désespérées du Parti de la justice et du développement (AKP), au pouvoir en Turquie, d'éviter l'isolement international croissant du pays. Il s'agit entre autres d'une +décision irréfléchie+ d'Ankara d'adhérer à la coalition musulmane de l'Arabie Saoudite contre le terrorisme", constate M.Çandar.
Et d'expliquer que cette alliance, rejetée par des pays, tels que le Pakistan et la Malaisie, était, selon bien des analystes, une coalition sunnite que Riyad entendait exploiter pour affaiblir l'influence de l'Iran dans la région.
"Acceptant de se retrouver dans le même rang avec les Comores, le Mali et le Niger au sein d'une coalition conduite par l'Arabie Saoudite, la Turquie a perdu le droit de prétendre au statut de contrepoids sunnite à l'Iran", constate l'auteur.
Par ailleurs, le rapprochement de la Turquie avec Israël témoigne aussi de l'abandon, bien que non déclaré, par Ankara de ses prétentions à la domination régionale.
"La Turquie et Israël sont des pays qui ont besoin l'un de l'autre", a déclaré début janvier le président turc Recep Tayyip Erdoğan.
Selon le journaliste, le dirigeant turc a ainsi reconnu un changement de la situation géopolitique dans la région, en laissant clairement entendre que la Turquie n'y contestait plus le rôle de l'Etat hébreu.
M.Çandar se dit persuadé que les récentes démarches d'Ankara ne sont qu'une conséquence directe de l'affaiblissement de ses positions suite à la destruction fin novembre par l'aviation turque d'un bombardier russe au-dessus de la Syrie.
Certains estiment que les démarches turques à l'égard de l'Arabie Saoudite et d'Israël ont été positivement évaluées par les Etats-Unis. Quoi qu'il en soit, la récente visite en Turquie du général Joseph F. Dunford, chef d'état-major interarmées, a révélé la "principale source de préoccupation" dans les relations entre Washington et Ankara. Il s'agit en l'occurrence du soutien accordé par les Etats-Unis aux Kurdes.
A cette occasion, M.Çandar se réfère à l'expert américain pour la Syrie, Joshua Landis, qui a rappelé que comme contrairement à Erdoğan, les Peshmergas (milices kurdes) combattent le groupe djihadiste Etat islamique (EI, Daech), l'alliance entre Washington et le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) a une perspective à long terme.
"Ainsi, la Turquie et son président Erdogan qui perd de plus en plus ses positions sur la scène internationale ont devant eux des temps difficiles", conclut l'expert. miner dans la région, estime un journaliste turc.