Quand le président russe dit que la Turquie ne perdra pas que des tomates et des contrats pour ses compagnies du bâtiment, cela signifie sans doute que Vladimir Poutine entend aller plus loin dans les sanctions politiques, a déclaré à Sputnik le spécialiste français du monde turc Tancrède Josseran.
"Il se peut qu'il (Vladimir Poutine) se mette dans ce qu'il ne faisait pas auparavant et livre des armes à la branche syrienne du PKK – au PYD, Parti de l'union démocratique. Cela poserait un problème pour la Turquie, dans la mesure où cette branche syrienne du PKK est le PKK, et les armes russes peuvent se retrouver sur le territoire turc", a indiqué l'expert.
Et d'ajouter que le chef de l'Etat russe pourrait aussi mettre son veto au rapprochement qui s’était opéré depuis quelques mois ou même années entre la Turquie et le groupe de Shanghai.
"Tout le monde sait que les perspectives d’adhésion de la Turquie à l’Union Européenne sont mauvaises même s’il y a un accord qui a été signé récemment", rappelle M.Josseran.
L'expert attire par ailleurs l'attention au fait que le chef du Kremlin a pris un certain nombre de précautions.
"Vladimir Poutine fait bien la distinction entre le peuple et les dirigeants. Il a fait de nombreuses références aux amis que la Russie possède en Turquie", relève-t-il.
Tout indique, d'après M.Josseran, que le président russe ne veut pas que la critique de la Turquie d’Erdoğan dérape dans une compagne anti-Islam, la Russie ayant quelque 20 millions de musulmans parmi ses citoyens.
"C’est aussi pour cette raison que Vladimir Poutine fait référence à Allah, en disant que Allah a abandonné Recep Erdoğan", fait remarquer l'expert.
Selon M.Josseran, le différend actuel entre la Turquie et la Russie ne doit toutefois pas être trop exagéré et va progressivement s’estomper sur le temps, étant donné que ces deux pays ont trop d’intérêts en commun.
"Ce sont tout d'abord des intérêts économiques, Vladimir Poutine n’ayant pas annoncé qu’il allait suspendre la livraison du gaz ou du pétrole. 60% du gaz et 40% du pétrole en Turquie proviennent de Russie. Il y a une deuxième raison – géopolitique – la Turquie reste isolée à l’égard de l’Occident, et l’Occident continue à avoir une très mauvaise image de la Turquie et, surtout, d’Erdoğan. Malgré tout, Erdoğan doit faire avec la Russie", conclut l'expert.