Le début de la fin pour l’Etat islamique ?

© AFP 2024 Sajjad HussainDes militants brûlent un drapeau du groupe Etat islamique djihadiste
Des militants brûlent un drapeau du groupe Etat islamique djihadiste - Sputnik Afrique
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Au milieu de l’année 2013, alors que l’armée syrienne connaissait une forte dynamique victorieuse, une nébuleuse terroriste s’ancre dans le nord de la Syrie en y chassant les rebelles dits modérés.

Au milieu de l'année 2014, cette nébuleuse surpasse ses alliés locaux (principalement le Front al-Nosra) et proclame le Califat qui s'étend sur une grande partie des territoires irakiens et syriens sous son contrôle, analyse d`Alexandre Latsa.

Disposant de quelques milliers d'hommes à ses débuts, l'Etat islamique va rapidement s'étendre. Par une communication habile, il va créer un incroyable appel d'air en attirant sur les territoires irakiens mais surtout syriens des milliers de combattants, notamment étrangers. Très rapidement l'armée syrienne se retrouve débordée par le nombre de combattants ennemis et incapables de faire face aux méthodes de combat de Daech qui multiplie les attentats-suicides tandis que ses combattants sont suspectés de combattre sous l'emprise de drogue.

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Cette poussée de l'Etat islamique se fera malgré l'entrée en action d'une coalition internationale qui dès août et septembre 2014 verra les grandes puissances procéder à des bombardements pour tenter de freiner l'avancée de la nébuleuse. Cette campagne de bombardements s'avèrera vaine puisqu'entre aout 2014 et septembre 2015, l'Etat islamique passera du contrôle de 10% à près de 50% du territoire syrien comme on peut le constater sur cette carte.

L'échec de l'armée syrienne et des frappes de la coalition internationale à endiguer l'extension de l'EI conférera à l'organisation une aura d'invincibilité qui, associée aux vidéos d'exécutions violentes de ses ennemis, contribuera à accroître son influence internationale au sein d'un monde islamiste radical en quête de guerre sainte. Seuls les Kurdes, dans le nord du pays, semblaient parvenir à repousser l'EI, l'infanterie bénéficiant il est vrai du soutien actif de la coalition internationale, qu'il soit aérien ou logistique, notamment lors de la terrible bataille de Kobane durant l'automne 2014.

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Au cœur de l'été 2015, beaucoup se demandaient si l'EI n'allait pas arriver à assiéger Damas, encercler Alep et s'approcher de la côte syrienne et de l'Alaouitistan d'Assad, réduisant la Syrie a une sorte d'Israël alaouite. L'EI semblait lancer toutes ses forces vers le centre du pays, en prenant d'assaut les grands axes stratégiques syriens, que l'on pense à la prise de Palmyre ou l'incroyable densité des assauts de l'EI sur Deir ez-Zor. Une pression que les milliers de frappes de la coalition internationale n'arrivaient pas à faire diminuer, faisant dire à la diplomatie russe que la coalition avait durant un an bombardé le désert.

Pourtant, en septembre 2015, un événement a modifié la donne: la Russie est entrée en guerre en Syrie. Concentrant lors des deux premiers mois ses frappes sur la partie ouest du pays, pour libérer l'étau sur la côte et permettre à l'armée syrienne d'amorcer une reprise du contrôle des axes allant d'Hama à Alep, la Russie devrait dans un avenir proche augmenter ses frappes sur l'est du pays et l'EI-stan qui s'étend d'Alep à la frontière irakienne.

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Les frappes russes, qui ont au cours des deux premiers mois été d'une grande efficacité, ont aussi permis de porter un coup d'arrêt à l'extension de l'EI. Autour d'Alep, à Deir ez-Zor ou autour de Palmyre, l'appui aérien russe a permis aux forces loyalistes d'étendre pour la première fois depuis plus d'un an leur offensive vers l'Est et vers la zone grise. Ceci a modifié les dynamiques entre les forces loyalistes et l'EI, alors que les forces d'Assad subissaient défaites sur défaites face aux kamikazes de l'EI.

Depuis le début des frappes russes et pour la première fois depuis le début du conflit l'EI recule.

En octobre et novembre 2015, deux terribles attentats contre un avion de ligne russe et des civils à Paris vont contribuer à l'établissement d'un nouveau consensus global non pas sur la Syrie, mais sur la lutte contre l'Etat islamique. Ce nouveau consensus voit en premier lieu la France développer une forme de coordination militaire accrue pour vaincre l'EI avec la Russie,

Ironie de l'histoire, cette coalition militaire intervient quelques mois seulement après que la France ait refusé de vendre les Mistrals à la Russie et alors que la Russie est toujours sous sanctions. Peut-on imaginer que cette coopération entraine la réouverture de notre ambassade à Damas et l'envoi d'officiers de liaison auprès de l'Etat-Major syrien ou que nos troupes n'agissent sous contrôle opérationnel des russes comme l'explique général Pinatel?

L'accroissement massif des frappes russes et françaises au cours des derniers jours s'est accompagné de la destruction du réseau logistique servant à transporter le pétrole syrien produit dans les zones sous contrôle de l'EI. Cette guerre financière contre l'EI devrait porter atteinte aux capacités du groupe à recruter, former et administrer son armée et les territoires qu'il occupe.

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Disposant d'entre 30 à 100.000 hommes selon diverses estimations, l'EI aurait perdu entre 4 et 5.000 hommes lors de la bataille de Kobane en décembre 2014. Les frappes de la coalition auraient permis la liquidation de quelques 10.000 combattants en 14 mois tandis que depuis le début de ses frappes la Russie aurait, quant à elle, déjà éliminé un gros millier de combattants. Selon des sources au sein de l'EI, alors que jusqu'à 3.000 combattants rejoignaient l'organisation chaque jour à la période faste, ce flux serait tombé à 50-60 actuellement. Dans le meme temps et pour accroître sa force de frappe, la Russie a elle augmenté de 50 à 69 le nombre de ses avions de combat opérant en Syrie sans compter les bombardiers stratégiques ou les redoutablement efficaces hélicoptères Mi-24 permettant d'accompagner au plus proche l'infanterie.

Au-delà de l'axe Paris/Moscou, Washington et Ankara ont entamé une campagne visant à nettoyer toute présence de l'EI au sein de la frontière syro-turque au nord d'Alep. Cet autre événement essentiel devrait considérablement affaiblir l'EI et contribuer à transformer le territoire syrien en nasse de plus en plus fermée dont la seule possibilité de sortie pour les combattants de l'EI serait le sud et la Jordanie ou alors l'Irak. Mais l'intense surveillance militaire et aérienne russo-occidentale ne laisse plus aux combattants la possibilité de circuler dans la même impunité qu'auparavant.

Il est bien sur difficile de faire de prévisions au sujet d'un théâtre stratégique aussi mouvant mais une chose est certaine: non seulement l'EI n'est plus en position de s'imposer en Syrie ou Irak, mais il semble surtout sur le point de subir un assaut sur de multiples fronts.

Peut-on envisager que, grâce à l'action de la Russie, nous assistions au début de la fin de l'Etat islamique en Syrie et en Irak?

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