Des attaques plus coordonnées, contrôlées par des lieutenants de confiance, parfois à distance — telle est la direction empruntée par ces nouvelles tactiques de l'Etat islamique, et les attentats récents à Beyrouth, à Ankara et à Paris en sont des exemples. Abdelhamid Abaaoud, cerveau présumé des attentats parisiens, a été l'un de ces lieutenants, jouissant de la confiance de ses chefs et ayant une certaine liberté en ce qui concerne le choix des cibles et le timing. Sa tâche clé était de surveiller les attentats de l'extérieur, et les services secrets craignent qu'il existe encore des lieutenants de confiance déployés dans plusieurs régions.
L'objectif des djihadistes n'a toutefois pas changé et consiste toujours à étendre le califat avec ses propres lois et pouvoirs.
La nouvelle approche, empruntée à Al-Qaïda, permettrait d'éviter des attentats, selon certains représentants des services secrets, car plus il y a de personnes engagées dans la préparation d'un attentat, plus il est probable qu'elles soient vite détectées.
Pourtant, ce qui ne laisse pas les services secrets dormir à poings fermés, c'est le fait que l'EI utilise, et avec habileté, un cryptage sophistiqué des systèmes de communication, capable de les induire en erreur. A en juger d'après l'une des dernières enquêtes du Bureau fédéral d'enquête américain (FBI), environ un tiers des communications islamistes sont transmises à travers des canaux cryptés.
De surcroît, les terroristes semblent varier les moyens de communication, et ainsi, même si des services secrets réussissent à les mettre sur écoute, des parties clés des conversations des terroristes leur échappent. Ensuite, l'Etat islamique ne néglige pas les réseaux sociaux pour "inspirer" et guider ses disciples à distance. Mais, comme les contacts directs n'ont pas lieu, il est difficile de prévoir et d'éviter des attentats planifiés, surtout compte tenu du fait que les djihadistes agissent avec une grande prudence et flexibilité.
Là est la principale différence entre l'Etat islamique et Al-Qaïda, dont l'ancien chef Oussama ben Laden s'occupait personnellement de l'organisation des attaques terroristes.
Selon un représentant de l'Université de Georgetown, Bruce Hoffman, cité par le Wall Street Journal, l'Etat islamique a aspiré depuis longtemps à changer de tactique pour pouvoir déclencher des attaques plus sophistiquées et coordonnées, dans le style d'Al-Qaïda. Aujourd'hui, estime-t-il, ils se rapprochent de ce but.
La prise de conscience de ce changement au sein de l'Etat islamique pourrait, comme laissent espérer des représentants des services de renseignement occidentaux, faire la lumière sur de multiples événements dramatiques de ces derniers temps, dont le crash de l'Airbus A321 dans le Sinaï égyptien.