En analysant l'état actuel des relations russo-chinoises, le chercheur du Centre d'analyse des stratégies et des technologies Vassili Kachine a évoqué l'irréversibilité des relations entre la Russie et la Chine.
« Il me semble que si les tendances géopolitiques actuelles se maintiennent pendant quelques années et que la Russie reste isolée par ses partenaires occidentaux, elle nouera inévitablement des relations économiques, infrastructurelles et industrielles avec la Chine qu'il ne sera plus possible de couper. Déjà à l'heure actuelle, des centaines d'usines russes cherchent des partenaires dans l'Empire du Milieu. Et bientôt, une infrastructure solide relira nos deux pays ».
En effet, sur 140 milliards de dollars d'investissements directs de la Chine dans le monde, près de 5 milliards sont investis en Russie. La RPC est le quatrième pays mondial en termes de volume d'investissements dans l'économie russe. Et le projet de construction d'un chemin de fer à haute vitesse Moscou-Pékin, avec la participation des sociétés chinoises, commence clairement à prendre forme.
« Si en 2001 le volume commercial entre nos deux pays dépassait à peine 10 milliards de dollars, actuellement, il atteint 95 milliards, plus qu'avec l'Allemagne », a ajouté Vassili Kachine.
Une vision multilatérale du monde
Le récent rapprochement entre Moscou et Pékin a certes permis de compenser en partie les relations distendues entre l'UE et la Russie. Mais en même temps, les relations entre la Russie et la Chine ont une dynamique qui leur est propre, elles se nourrissent d'elles-mêmes dans de nombreux secteurs de l'économie, analyse Pierre Picquart, expert de la Chine et professeur à l'Université Paris-8.
« Il me semble qu'il s'agit de relations d'un type nouveau. Nous constatons que la Russie et la Chine ont des visions communes du monde", explique-t-il dans un entretien accordé à Sputnik. « Les deux pays ne sont pas anti-américains, ni anti-européens. Mais ils considèrent toutefois que l'hégémonie d'un seul bloc n'est pas à l'avantage du monde entier. Et ce type de coopération est en train de se renforcer. Les pays émergents (notamment la Chine et la Russie) sont en train de contrebalancer le rapport des forces existant, dominé par les Etats-Unis et l'Europe ».
Répondant au début de juin aux questions des journalistes russes sur l'union entre Moscou et Pékin, Yang Cheng, le vice-directeur du Centre d'études russes à l'Université pédagogique de la Chine orientale a indiqué que la Russie et la Chine sont des pays voisins qui sont arrivés à un « format amical » de relations.
« Il ne s'agit pas d'une union, car l'union impliquerait l'existence d'un « grand frère et d'un petit frère », d'un rapport, dans lequel l'un des deux pays est leader », a nuancé l'expert. « Quant aux relations russo-chinoises, il s'agit bien de relations de partenariat stratégique ».
Pour Pierre Picquart, cela s'inscrit tout à fait dans la logique de la diplomatie chinoise.
« La RPC a une vision multipolaire du monde et elle ne tient pas à s'arrimer à une union politico-militaire qui risque de provoquer des tensions avec l'Europe et les Etats-Unis. La Chine préfère plutôt de nouer des partenariats multiples. C'est aussi le cas de la Russie qui est un pays important pour la RPC », explique l'expert. « Il faut également remarquer que cette décision est prise dans l'intérêt de la Russie, pour qu'elle ne s'isole pas dans une alliance qui entrerait en rivalité avec les unions occidentales ».
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