Le tollé a été encore plus large à cause de l'incompréhension totale de la part des citoyens russes. «Se ficher à un tel point de l'honneur national! La France a vraiment vécu!» déclarait intransigeant un chauffeur de taxi qui m'a emmené hier à mon rendez-vous. Madame Dugenou en cause avec ses voisins de palier et les retraités trouvent le sujet encore plus passionnant que les séries télévisées. Et enfin, au niveau qui n'est pas celui du plancher des vaches, au Ministère de la Défense, on avoue étudier les avatars de la pensée commerciale française cherchant à minimiser les pertes et sauver les meubles d'un contrat en perdition déclarée.
Gilles Lebreton est parmi les politiques honnêtes qui n'ont pas mâché leurs mots pour cracher leur amertume sur le perron dallé du Château. Cet eurodéputé FN se bat à fer émoulu en défendant bravement la France et sa province natale où les gens n'ont pas l'air de comprendre les beaux messieurs du gouvernement. Il a signé une déclaration qu'il rendit publique où M.Lebreton dresse le sombre bilan d'une affaire ténébreuse. Selon lui, les Mistral ont donné un coup de canif dans la réputation du complexe militaro-industriel français. Voici ce qu'il nous a confié dans un entretien en toute exclusivité:
Vous voyez, j'estime que si on met au clair ces événements-ci, il n'y a pas lieu à prendre le prétexte pour refuser de livrer les Mistral!
Je rajouterais que l'avantage de cette dernière solution si la France les reprenait pour elle, ce serait que l'on ne peut exclure une embellie future dans les relations entre la France et la Russie. Cela nous permettrait éventuellement dans l'avenir d'essayer de rattraper le coup si je puis dire. Le Président Hollande est extraordinairement impopulaire. Il y a la présidentielle dans deux ans. Je pense qu'il va les perdre. Nous sommes, entre la France et la Russie, dans une phase qui, malheureusement, n'est pas bonne sur le plan de nos relations. Mais il n'y a pas de raisons que les choses ne s'embellissent pas très prochainement! Par le passé, la France et la Russie ont eu de bonnes relations. Et il n'y a pas de raisons que cela ne puisse se reproduire.
Question. On est en rapports permanents avec toute l'équipe FN en Bretagne — Jean-Claude Blanchard, Christian Bouchet et d'autres personnalités — tout le monde pense qu'il y a gros à perdre pour la France en matière de renommée en tant qu'un armurier mondial fiable. Qu'en pensez-vous?
Gilles Lebreton. Vous avez raison d'évoquer cet aspect. Sur le plan de notre industrie d'armements, c'est assez catastrophique l'image que l'on donne puisque l'on va décourager nos acheteurs. Il est évident qu'on ne tient pas notre parole vis-à-vis de la Russie. Et demain si d'autres Etats sont tentés de signer des contrats pour la construction des navires à Saint-Nazaire, ils peuvent être amenés maintenant à réfléchir et peut-être à se tourner vers d'autres pays comme, par exemple, la Corée qui est un grand fabricant des navires de guerre. Moi-même j'ai été à Saint Nazaire parler à des ouvriers et je peux vous dire que là-bas il y a une très grande inquiétude pour l'avenir.
Commentaire de la Rédaction. Gilles Lebreton a cent fois raison de fustiger le gouvernement incompétent qui dirige la France et qui vend des éléphants trompant énormément une nation crédule. Ainsi donc la note s'avérerait autrement plus salée par rapport aux prévisions de M. Bricolage. C'est que les Russes ont largement contribué à la construction des malheureux navires: ils ont livré une grande partie des deux coques et les mécanismes qu'ils entendent récupérer maintenant.
Cependant l'audit international avance que la Défense russe pourrait faire valoir quelques clauses du contrat qui n'auraient pas été encore rendues publiques au niveau national en faisant plafonner le chiffre à plus de 5 Milliards d'euros! Le budget de la République a-t-il les réserves pour en assumer le coût? Et il y a pas mal de têtes brûlées parmi les politiques russes qui proposent de négocier avec la France en tenant compte de la livraison d'armements en Syrie et en Ukraine où la France est tout sauf la colombe de la paix!
La suggestion de Gilles Lebreton de trouver preneur pour ces bateaux-orphelins pourrait s'étoffer via la Chine qui, elle, serait en passe de réfléchir à cette acquisition. Si le tout se ficèle, la Chine les aurait à bas prix, un peu comme la ligne de production de l'avion régional Fairchild-Dornier bradée par les Allemands à Pékin pour quatre sous il y a 12 ans de cela. La Russie pourrait récupérer les bâtiments dans un port chinois moyennant une petite commission mais pour un prix largement inférieur par rapport aux dommages et intérêts qu'elle présenterait à la France. Résultat: Moscou fera payer à Paris une plaisanterie qui a tourné court. Comme quoi on ne badine pas avec les Russes!
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