En premier lieu parce que l'unité nationale est de façade. Des millions de Français ont manifesté. Tous n'étaient pas « Charlie » pour la même raison. Beaucoup ne l'étaient pas du tout, mais tenaient à faire savoir qu'ils ne plieraient pas devant une bande de fanatiques et n'entendaient pas, notamment, s'autocensurer sous la menace. Cela témoigne d'un esprit de résistance partagé, pas de la cohésion d'une nation.
Ensuite parce que la démonstration de force en cours ne doit pas faire illusion. Si demain des islamistes décident de frapper de nouveau, ce ne sont pas les policiers et les militaires qui les perturberont.
D'une part parce que les terroristes auxquels nous serons sans doute confrontés auront grandi en France. Ils en connaissent les faiblesses, peuvent se noyer dans la foule, savent où acquérir et cacher des armes, frapper au bon moment.
D'autre part parce qu'ils rêvent d'une mort au combat « héroïque » face aux représentants d'une autorité et d'un pays qu'on leur a appris à haïr. Ils ne demandent qu'une chose, entraîner dans leur néant le plus possible d'ennemis, « croisés », juifs ou « keufs ».
Laurent Fabius, pour avoir le premier réclamé que l'on restreigne les dépenses militaires et que l'on encaisse « les dividendes de la paix », pourrait sembler particulièrement critiquable. Ce serait oublier que tous les gouvernements qui se sont succédé depuis une vingtaine d'années ont choisi de mener rigoureusement la même politique budgétaire, même lorsqu'ils prétendaient redresser la barre. Pas une loi de programmation militaire, orientant la politique de défense nationale de la France et les investissements financiers afférents, n'a ainsi été respectée.
Il faut aujourd'hui inverser la tendance. Viser, a minima, les 2% de PIB en matière de budget de la défense. Il ne s'agit plus de sauver l'outil militaire mais d'en reconstruire un autre. Il faut bâtir un dispositif s'appuyant sur des services de renseignement sensiblement renforcés, des capacités de projection adaptées à nos opérations extérieures et des troupes en nombre suffisant pour assurer efficacement la défense opérationnelle du territoire, mission première des armées mais délaissée depuis vingt ans. La classe politique française s'accorde sur un constat, celui que la France est en guerre. Elle a un devoir, protéger les citoyens. A défaut le contrat hobbesien sera rompu. Avec toutes les conséquences prévisibles d'un point de vue social et politique.
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